L’exhortation apostolique post-synodale « Africae Munus », un appel fort à se nourrir et à proposer la Parole de Dieu

1. Pourquoi nous intéresser à l’appel de Benoît XVI à permettre aux personnes, communautés, paroisses en Afrique, de rencontrer la personne de Jésus dans la lecture priante de la Parole de Dieu

Bien des choses émerveillent le prêtre fidei donum que je suis en arrivant à Madagascar (mars 2010) : comme le nombre des fidèles dans les églises, leur jeunesse, leur ferveur, la qualité des chants, les kilomètres faits à pied pour venir célébrer, l’engagement des prêtres dans des conditions dures.

Venant du Brésil (2005 – 2009) et ayant été marqué par la manière dont l’Eglise en Amérique Latine a mis la Parole de Dieu au centre de sa vie, aidant toutes les familles, même les plus pauvres à l’avoir et à la méditer à plusieurs chaque semaine au sein des « Cercles Bibliques » qui se réunissent par quartier, hameau, je suis questionné par contre par « l’absence de la Parole de Dieu » dans la pastorale de l’Eglise malgache.

Il faudrait être plus malgache dans l’expression, le dire moins brutalement, souligner les chants imprégnés de la Parole de Dieu, l’effort de tel ou tel diocèse, comme celui de Farafangana qui finance la moitié du prix de la Bible pour que les catholiques aient la Bible chez eux et la parole forte de leur évêque, Mgr Benjamin Marc Ramaroson, au Synode sur la Parole de Dieu à Rome en 2008, qui souligne la capacité des pauvres à

« Commenter cette parole (celle de l’Evangile) et on est souvent surpris par la profondeur de certains commentaires spontanés qui pourraient bien étonner des spécialistes. Parfois, la richesse de ces commentaires, marqués par une profondeur spirituelle qui ne trompe pas, rappelle ceux des Pères de l’Église. Ce n’est pas une exégèse scientifique mais une exégèse dans son sens premier, c’est-à-dire une interprétation qui aide à accueillir l’enseignement d’un texte dans sa pureté. »[1]

Pour autant, après avoir posé la question dans toutes les « fiangonana » de notre district (paroisse rurale) de Befeta (diocèse Fianarantsoa), force est de constater que presqu’aucune famille n’a la Bible ou le Nouveau Testament, que nombre de catéchistes et professeurs de l’Eglise catholique ne l’ont pas[2], et que, lors de la retraite que j’ai prêchée pour les prêtres du diocèse d’Ambanja en août 2011, plus de la moitié sont venus sans Bible. Lors des retraites de Première Communion ou lors du congrès du F.E.T. (Mouvement Eucharistique des Jeunes), pas un texte d’Evangile n’a été médité à part pendant l’eucharistie, et, si les jeunes faisant un engagement dans le cadre du F.E.T. ont « promis de lire l’Evangile », aucun ne l’avait, mis à part 3 aînés, sur une assemblée de plus de 350 enfants et jeunes.

Avec le Père Wilson André Rakotonirina, prenant conscience de ce manque, cherchant à vivre le charisme du Père Chevrier, fondateur de l’association des prêtres diocésains du Prado, qui appelle à passer des heures à rencontrer Jésus dans l’Evangile, nous avons pris des initiatives pour « mettre l’Evangile dans les mains des pauvres », en particulier des enfants les appelant à annoncer l’Evangile en le mettant en théâtre (voir http://bruno-cadart.com/fr/index.html .

Aussi, ai-je été intéressé de voir l’appel du Pape Benoît XVI pour que toutes les familles aient la Bible et que tous les chrétien catholiques prient en lisant l’Evangile chaque jour.

2. L’appel à rencontrer la personne de Jésus dans l’Evangile, un appel qui traverse toute l’exhortation apostolique post-synodale « Africae Munus »

Il y a de multiples angles pour lire la récente exhortation apostolique post-synodale « Africae Munus », mais il ne fait pas de doute que l’un de ces angles est de repérer à quel point Benoît XVI insiste sur la Parole de Dieu lue et proposée personnellement et en Eglise comme source pour répondre aux défis dans lesquels l’Eglise est appelée à vivre la mission en Afrique (ailleurs aussi).[3]

Ainsi, après une introduction dans laquelle le Pape évoque les nombreux défis du continent africain avec réalisme mais avec un regard de foi et d’espérance, conscient des richesses de l’âme africaine et dans l’action de l’Esprit Saint pour que les chrétiens en Afrique deviennent toujours plus le sel de la terre et la lumière du monde, dès le début du chapitre 1 de la première partie, Benoît XVI appelle l’Eglise à « porter le message de l’Évangile au cœur des sociétés africaines » (§ 15) et il inscrit le Synode de l’Afrique dans la lignée du Synode consacré à la Parole de Dieu :

« Il est heureux que Dieu ait permis que le deuxième Synode pour l’Afrique soit célébré juste après celui qui a été consacré à la Parole de Dieu dans la vie et la mission de l’Église. Ce Synode a rappelé l’impérieux devoir du disciple d’écouter le Christ qui appelle à travers sa Parole. Par elle, les fidèles apprennent à entendre le Christ et à se laisser orienter par l’Esprit Saint qui nous révèle le sens de toutes choses (cf. Jn 16, 13). En effet, la « lecture et la méditation de la Parole de Dieu nous enracinent plus profondément dans le Christ et orientent notre ministère de serviteurs de la réconciliation, de la justice et de la paix ». Comme le rappelait ce Synode, « pour devenir ses frères et sœurs, il faut être de “ceux qui écoutent la Parole de Dieu et la mettent en pratique” (Lc 8, 21). Écouter authentiquement, c’est obéir et œuvrer ; faire naître dans la vie la justice et l’amour ; offrir dans l’existence et dans la société, un témoignage conforme à l’appel des prophètes – qui unissait sans cesse Parole de Dieu et vie, foi et rectitude, culte et engagement social ». Écouter et méditer la Parole de Dieu, c’est désirer la laisser pénétrer et former notre vie pour nous réconcilier avec Dieu, pour permettre à Dieu de nous conduire à une réconciliation avec le prochain, chemin nécessaire pour la construction d’une communauté de personnes et de peuples. Sur nos visages et dans nos vies, que la Parole de Dieu prenne vraiment chair ! » (§ 16)

Tout au long de son exhortation, Benoît XVI méditera cette parole de l’Evangile à plusieurs reprises. Sans être exhaustif, on citera ici les béatitudes (§ 26 et 27) et l’appel à être le sel de la terre et la lumière du monde, la parabole du Fils Prodigue pour appeler à la conversion et à la réconciliation qui trouve sa source en Christ (§ 20), la rencontre de Zachée pour inviter le juste à entrer dans l’ordre de l’amour-agapê (§ 25), l’appel à se réconcilier en « naissant d’en-haut » à l’école de Nicodème (§ 30), l’appel à se lever fait à l’Afrique comme au paralytique de Luc (§ 31) ou à être porté comme le paralytique de Marc, image de l’Afrique qui a aussi besoin d’être portée (§ 98). C’est tout le chapitre III qui se base sur la méditation de la scène saisissante que l’Evangile de saint Jean nous présente au chapitre 5, près de la piscine de Bethesda. L’Eglise en Afrique n’a pas seulement à se laisser porter, mais à entendre l’appel de la foule à Bartimée : « Confiance, lève-toi, il t’appelle ! » (cf. Conclusion)

3. L’Église a besoin de témoins qui soient profondément enracinés dans le Christ, et qui se nourrissent de sa Parole et des Sacrements

Il ne s’agit pas seulement de lire l’Evangile mais de le vivre et d’accueillir l’appel constant du Christ à la conversion (§ 32).

La Parole de Dieu n’est pas seulement « objet » à connaître et à vivre mais « acteur » de la conversion et de la réconciliation :

« La réconciliation n’est pas un acte isolé mais un long processus grâce auquel chacun se voit rétabli dans l’amour, un amour qui guérit par l’action de la Parole de Dieu. Elle devient alors une manière de vivre, en même temps qu’une mission. Pour réussir une véritable réconciliation, et mettre en œuvre la spiritualité de communion par la réconciliation, l’Église a besoin de témoins qui soient profondément enracinés dans le Christ, et qui se nourrissent de sa Parole et des Sacrements. Ainsi, tendus vers la sainteté, ces témoins sont capables de s’investir dans l’œuvre de communion de la Famille de Dieu en communiquant au monde, au besoin jusqu’au martyre, l’esprit de réconciliation, de justice et de paix, à l’exemple du Christ. » (§ 34)

« (…) Ainsi mûrissent des hommes et des femmes de foi et de communion faisant preuve de courage dans la vérité et l’abnégation, et illuminés par la joie. Ils donnent alors un témoignage prophétique d’une vie cohérente avec leur foi. Marie, Mère de l’Église, qui a su accueillir la Parole de Dieu, est leur modèle : par son écoute de la Parole, elle a su entendre les besoins des hommes et intercéder pour eux dans sa compassion. » (§ 35)

Il faut inculturer l’Evangile en effectuant un discernement approfondi pour identifier les aspects de la culture qui font obstacle à l’incarnation des valeurs de l’Évangile, tout comme ceux qui les promeuvent. (§ 36) et sans oublier « que l’Esprit Saint est l’authentique protagoniste de l’inculturation, « c’est lui qui préside de manière féconde au dialogue entre la Parole de Dieu, qui s’est révélée dans le Christ, et les requêtes les plus profondes qui jaillissent de la multiplicité des hommes et des cultures ». L’Esprit Saint fait que l’Évangile soit capable d’imprégner toutes les cultures, sans se laisser asservir par aucune. (§ 37)

Reprenant l’exhortation « Dei Verbum », soulignant de nouveau que « la Parole et l’Eucharistie sont corrélées intimement au point de ne pouvoir être comprises l’une sans l’autre » (§ 40), Benoît XVI écrit :

« L’Écriture Sainte atteste en effet que le Sang versé du Christ devient, par le baptême, le principe et le lien d’une nouvelle fraternité. Celle-ci est à l’opposé de la division, du tribalisme, du racisme, de l’ethnocentrisme, etc. (cf. Ga 3, 26-28). L’Eucharistie est la force qui rassemble les enfants de Dieu dispersés et les maintient dans la communion… » (41)

4. Que les divers acteurs se nourrissent de la Parole de Dieu

Dans la partie sur le « vivre ensemble », pour chacune des réalités évoquées, il va souligner l’importance de la lecture de la Parole de Dieu.

La famille…

« sanctuaire de la vie » (§ 42), « lieu propice pour l’apprentissage et la pratique de la culture du pardon, de la paix et de la réconciliation » (§ 43), elle est invitée à « puiser inspiration et force dans l’eucharistie » et à donner « toute sa place à la prière, personnelle et communautaire », car « le dialogue avec Dieu ouvre le cœur au flot de la grâce et permet à la Parole du Christ de passer à travers nous avec toute sa force ! Pour cela, l’écoute assidue et la lecture attentive de l’Écriture Sainte au sein des familles sont nécessaires. » (§ 45)

De plus « la mission éducative de la famille chrétienne [est] un vrai ministère, grâce auquel l’Évangile est transmis et diffusé, à tel point que la vie familiale dans son ensemble devient chemin de foi et en quelque sorte initiation chrétienne ou école de vie à la suite du Christ. Dans la famille, consciente d’un tel don, comme l’a écrit Paul VI, “tous les membres de la famille évangélisent et sont évangélisés”. En vertu de ce ministère d’éducation, les parents, à travers leur témoignage de vie, sont les premiers hérauts de l’Évangile auprès de leurs enfants. […] Ils deviennent pleinement parents en ce sens qu’ils engendrent non seulement à la vie selon la chair mais aussi à celle qui, à travers la renaissance dans l’Esprit, jaillit de la Croix et de la Résurrection du Christ ». (46)

Les vieillards…

sont invités à contribuer à annoncer l’Evangile (§ 50).

Les hommes…

sont appelés à respecter les femmes et « à garantir le développement personnel de tous les membres de la famille, berceau et moyen le plus efficace pour humaniser la société, lieu de rencontre de plusieurs générations. » et à ce que « Par la dynamique créatrice de la Parole de Dieu même », grandisse leur sens des responsabilités, jusqu’à s’engager concrètement dans l’Église. (§ 53) « La qualité et le rayonnement de votre vie chrétienne dépendent d’une vie de prière profonde, nourrie de la Parole de Dieu et des Sacrements. » (§ 54)

Les femmes…

Elles sont trop souvent humiliées par des pratiques ancestrales (§ 56), et lesquelles « il conviendrait que les comportements à l’intérieur même de l’Église soient un modèle pour l’ensemble de la société » (§ 56). Benoît XVI leur écrit : « Vous, les femmes catholiques, vous vous inscrivez dans la tradition évangélique des femmes qui assistaient Jésus et les apôtres (cf. Lc 8, 3) ! Vous êtes pour les Églises locales comme leur colonne vertébrale » (§ 58) « mettez-vous constamment à l’école du Christ comme Marie de Béthanie pour savoir reconnaître sa Parole (cf. Lc 10, 39). » (§ 59)

Les jeunes…

Par rapport aux jeunes, « don et trésor de Dieu », « capables de recevoir le message du Christ, même s’il est exigeant et marqué par la Croix (§ 60), Benoît XVI écrit : « Nous devons aider les jeunes à acquérir l’intimité et la familiarité avec les Saintes Écritures, pour qu’elle soit comme une boussole qui leur indique la route à suivre. C’est pourquoi ils ont besoin de témoins et de maîtres, qui marchent avec eux et qui les forment à aimer et à communiquer à leur tour l’Évangile surtout aux jeunes de leur âge, devenant ainsi eux-mêmes des annonciateurs authentiques et crédibles ». (§ 61)

Et, s’adressant directement à eux :

« Pour acquérir le discernement, la force nécessaire et la liberté de résister à ces pressions, je vous encourage à mettre Jésus-Christ au centre de toute votre vie par la prière, mais aussi par l’étude des Saintes Écritures, la pratique des Sacrements, la formation à la Doctrine sociale de l’Église, ainsi que par votre participation active et enthousiaste aux rassemblements et aux mouvements ecclésiaux. » (§ 63)

« Quand il s’agit de vous orienter dans votre choix de vie, quand la question d’une consécration totale se pose à vous – par le sacerdoce ministériel ou la vie consacrée –, appuyez-vous sur le Christ, prenez-le pour modèle, écoutez sa Parole en la méditant régulièrement. » (§ 64)

Les enfants…

Il n’y a que pour les enfants, que Benoît XVI ne parle pas explicitement de la nécessité pour eux de prier avec l’Evangile.

Mais, dans sa rencontre avec les enfants, samedi 19 novembre, dans l’après-midi, à la paroisse Sainte-Rita de Cotonou, il est très explicite et leur dit :

« Qu’est-ce que la prière ? C’est un cri d’amour poussé vers Dieu notre Père avec la volonté d’imiter Jésus notre Frère. Jésus partait à l’écart pour prier. Comme Jésus, je peux moi aussi trouver chaque jour un endroit calme où je me recueille devant une croix ou une image sacrée pour parler à Jésus et l’écouter. Je peux aussi utiliser l’Évangile. Je garde ensuite dans mon cœur un passage qui me touche et va me guider durant la journée. Rester ainsi un peu de temps avec Jésus, lui permet de me remplir de son amour, de sa lumière et de sa vie ! Cet amour que je reçois dans la prière, je suis appelé à le donner à mon tour à mes parents, à mes amis, à tous ceux avec qui je vis, même à ceux qui ne m’aiment pas, et aussi à ceux que je n’apprécie pas beaucoup. Chers enfants, Jésus vous aime ! Demandez aussi à vos parents de prier avec vous ! Parfois, il faut les pousser un peu. N’hésitez pas à le faire. Dieu est si important ! »

5. La Parole de Dieu dans divers tâches pour l’Eglise d’Afrique

Appelant à lutter contre l’analphabétisme

qui représente l’un des freins majeurs au développement, Benoît XVI écrit : « Alphabétiser l’individu, c’est en faire un membre à part entière de la res publica, à la construction de laquelle il pourra contribuer, et c’est permettre au chrétien d’accéder au trésor inestimable des Saintes Écritures qui alimentent sa vie de foi. » (§ 76)

Appelant à un dialogue œcuménique

Benoît XVI écrit : « Le dialogue œcuménique vise donc à orienter notre marche commune vers l’unité des chrétiens, en étant assidus à l’écoute de la Parole de Dieu, fidèles à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières (cf. Ac 2,42). » (§ 89)

Dans un contexte de montés des mouvements syncrétistes et des sectes

il appelle à évangéliser en profondeur l’âme africaine (§ 91), et, après avoir appelé à accueillir les richesses des religions traditionnelles avec discernement (§ 92), il alerte sur le fléau de la sorcellerie qui, s’appuyant sur les religions traditionnelles, connaît actuellement une certaine recrudescence. Il invite l’Église qui est en Afrique, à travers une catéchèse et une inculturation profonde, à guider les personnes vers la découverte de la plénitude des valeurs de l’Évangile. (§ 93)

« La mission d’évangélisation de l’Église en Afrique puise à plusieurs sources :

les Saintes Écritures, la Tradition et la vie sacramentelle. » (…) Un chrétien qui s’alimente à la source authentique, le Christ, est transformé par Lui en « lumière du monde » (Mt 5, 14), et il transmet Celui qui est « la lumière du monde » (Jn 8, 12). (§ 95)

6. Recevez le casque du Salut et le glaive de l’Esprit, c’est-à-dire la Parole de Dieu

« Pour réaliser la tâche que nous sommes appelés à accomplir, faisons nôtre l’exhortation même de saint Paul : « Tenez-vous donc debout, avec la vérité pour ceinture, la justice pour cuirasse, et pour chaussures le zèle à propager l’évangile de la paix ; ayez toujours en main le bouclier de la foi, grâce auquel vous pourrez éteindre tous les traits enflammés du Mauvais ; enfin recevez le casque du Salut et le glaive de l’Esprit, c’est-à-dire la Parole de Dieu. Vivez dans la prière et les supplications ; priez en tout temps, dans l’Esprit » (Ep 6,14-18). » (§ 96)

Aux évêques,

« Votre premier devoir est de porter à tous la Bonne Nouvelle du Salut, et de donner aux fidèles une catéchèse qui contribue à une connaissance plus approfondie de Jésus-Christ. » (§ 103)

Aux prêtres :

« Face à la complexité des situations auxquelles vous êtes confrontés, je vous invite à approfondir votre vie de prière et votre formation continue ; que celle-ci soit à la fois spirituelle et intellectuelle. Devenez des familiers des Saintes Écritures, de la Parole de Dieu que vous méditez chaque jour et que vous expliquez aux fidèles. Développez aussi votre connaissance du Catéchisme, des documents du Magistère ainsi que de la Doctrine sociale de l’Église. Vous serez ainsi capables, à votre tour, de former les membres de la communauté chrétienne dont vous êtes les responsables immédiats pour qu’ils deviennent d’authentiques disciples et témoins du Christ. » (§ 109) et vivez les exigences évangéliques (§ 112)

Les saints africains et leur engagement pour la cause de l’Évangile jusqu’au martyre

Du travail des missionnaires, « ont surgi de nombreux saints africains qui sont autant de modèles dont il faut s’inspirer davantage. Il serait souhaitable que leur culte soit ravivé et promu. Leur engagement pour la cause de l’Évangile s’est parfois réalisé avec héroïsme, au prix même de leur vie. Une fois encore s’est vérifiée l’affirmation de Tertullien : « Le sang des martyrs est semence de chrétiens». Je rends grâce au Seigneur pour ces saints et saintes, signes de la vitalité de l’Église en Afrique. » (§ 113)

Les diacres permanents, les religieux et les séminaristes

Il est étonnant de voir que la méditation de l’Evangile n’est pas ou est peu mentionnée pour les diacres permanents, religieux, séminaristes.

Les catéchistes, africains qui ont évangélisé les africains (§ 125)

 sont invités à témoigner par leur vie et Benoît XVI leur écrit : «  En assimilant vous-mêmes les Saintes Écritures et les enseignements du Magistère, vous parviendrez à offrir une catéchèse solide, à animer des groupes de prière et à proposer la lectio divina aux communautés dont vous avez le soin. Votre action deviendra alors cohérente, persévérante et source d’inspiration. » (§ 127)

Pour les laïcs qui ont un grand rôle à jouer dans l’Église et dans la société,

et dont le témoignage chrétien ne sera crédible que s’ils sont des professionnels compétents et honnêtes, Benoît XVI demande « que des écoles ou des centres de formation biblique, spirituelle, liturgique et pastorale soient organisés dans les diocèses. Je souhaite de tout cœur que les laïcs qui ont des responsabilités d’ordre politique, économique et social, s’arment d’une solide connaissance de la Doctrine sociale de l’Église qui fournit des principes d’action conformes à l’Évangile. » (§ 128) Appelés à vivre la sainteté dans le monde, pour que la personne humaine et le bien commun demeurent effectivement au centre de l’action humaine, politique, économique ou sociale, attachez-vous profondément au Christ pour le connaître et l’aimer, consacrant du temps à Dieu en priant et en recevant les Sacrements. Laissez-vous éclairer et instruire par Dieu et par sa Parole. (§ 129) Dans le travail professionnel qui n’est pas d’abord un moyen de profit mais une participation à l’œuvre créatrice de Dieu au service des hommes, soyez « le sel de la terre » et « la lumière du monde » et dans votre vie quotidienne, pratiquez l’option préférentielle pour les pauvres selon l’esprit des Béatitudes (cf. Mt 5, 3-12), pour voir en eux le visage concret de Jésus qui vous appelle à le servir (cf. Mt 25, 31-46).. (§ 130)

7. Que chaque fidèle du Christ prenne l’habitude de la lecture quotidienne de la Bible !

Quand Benoît XVI commence son troisième chapitre, dans lequel il « veut revenir sur certains points qui ont déjà été abordés auparavant de manière diffuse » (§ 147), il commence, en tout premier, par cet appel à permettre aux africains de rencontrer la personne du Christ, en particulier dans sa Parole :

L’Evangile de saint Jean nous présente au chapitre 5 une scène saisissante, près de la piscine de Bethesda. « Sous ces portiques gisaient une multitude d’infirmes, aveugles, boiteux, impotents, qui attendaient le bouillonnement de l’eau » (v. 3), c’est-à-dire l’occasion de la guérison. Il se trouvait parmi eux « un homme qui était infirme depuis trente-huit ans » (v. 5), mais qui n’avait personne pour l’aider à se plonger dans la piscine. Et voici que Jésus entre dans sa vie. Tout change lorsque Jésus lui dit : « Lève-toi, prends ton grabat et marche ! » (v. 8). « Et aussitôt, dit l’évangéliste, l’homme fut guéri » (v. 9). Il n’avait plus besoin de l’eau de la piscine. (§ 148)

L’accueil de Jésus offre à l’Afrique une guérison plus efficace et plus profonde que toute autre. Comme l’apôtre Pierre l’a déclaré dans les Actes des Apôtres (3, 6), je redis que ce n’est ni d’or, ni d’argent que l’Afrique a d’abord besoin ; elle désire se mettre debout comme l’homme de la piscine de Bethesda ; elle désire avoir confiance en elle-même, en sa dignité de peuple aimé par son Dieu. C’est donc cette rencontre avec Jésus que l’Église doit offrir aux cœurs meurtris et blessés, en mal de réconciliation et de paix, assoiffés de justice. Nous devons offrir et annoncer la Parole du Christ qui guérit, libère et réconcilie. (§ 149)

Repartant encore du Synode sur la Parole de Dieu, Benoît XVI continue :

« Ignorer les Écritures, c’est ignorer le Christ ». La lecture et la méditation de la Parole de Dieu nous donnent non seulement « la science éminente de Jésus-Christ » (Ph 3, 8), mais encore, elles nous enracinent plus profondément dans le Christ et orientent notre service de la réconciliation, de la justice et de la paix. La célébration de l’Eucharistie dont la première partie est la liturgie de la Parole, en constitue la source et le sommet. Je recommande donc que l’apostolat biblique soit promu dans chaque communauté chrétienne, dans la famille et dans les mouvements ecclésiaux. (§ 150)

Que chaque fidèle du Christ prenne l’habitude de la lecture quotidienne de la Bible ! Une lecture attentive de ma récente Exhortation apostolique Verbum Domini, fournira des indications pastorales utiles. On veillera donc à initier les fidèles à la vénérable et fructueuse tradition de la lectio divina. C’est la Parole de Dieu qui peut aider à la connaissance de Jésus Christ et opérer les conversions qui aboutissent à la réconciliation, puisqu’elle passe au crible « les sentiments et les pensées du cœur » (Hb 4, 12). Les Pères du Synode encouragent les communautés chrétiennes paroissiales, les CEV (CCS), les familles et les associations et les mouvements ecclésiaux à des moments de partage de la Parole de Dieu. Ils deviendront ainsi davantage des lieux où la Parole de Dieu qui édifie la communauté des disciples du Christ, est lue ensemble, méditée et célébrée. Cette Parole régénère sans cesse la communion fraternelle (cf. 1 P 1, 22-25). (§ 151)

A partir de cette Parole de Dieu accueillie, de la Personne du Christ rencontrée dans sa Parole, Benoît XVI appelle à aller jusqu’à la rencontre du Christ Verbe fait chair dans le sacrement de l’eucharistie et de la réconciliation avant d’appeler l’Eglise à s’engager dans l’évangélisation (ad gentes et nouvelle évangélisation) afin que la physionomie du continent africain se modèle toujours plus sur l’enseignement toujours actuel du Christ, vraie « lumière du monde » et authentique « sel de la terre » (§ 159) en annonçant « la personne de Jésus » (§ 160) et il écrit :

« L’Évangile de Jésus Christ, Fils de Dieu » (Mc 1, 1) est le chemin sûr pour rencontrer la Personne du Seigneur Jésus. Scruter les Écritures nous permet de découvrir toujours plus le véritable visage de Jésus, révélation de Dieu le Père (cf. Jn 12, 45), et son œuvre de salut. « Redécouvrir la centralité de la Parole divine dans la vie chrétienne nous fait retrouver la signification la plus profonde de ce que le Pape Jean-Paul II a rappelé avec force : poursuivre la missio ad gentes et entreprendre de toutes nos forces la nouvelle évangélisation ». (§ 161)

Conduite par l’Esprit-Saint, l’Église en Afrique doit annoncer – en le vivant – le mystère du salut à ceux qui ne le connaissent pas encore. L’Esprit Saint que les chrétiens ont reçu au Baptême est le feu d’amour qui pousse à l’action évangélisatrice. Après la Pentecôte, les disciples « remplis de l’Esprit Saint » (Ac 2, 4) sont sortis du Cénacle, où, par peur, ils s’étaient enfermés, pour proclamer la Bonne Nouvelle de Jésus Christ. (§ 162)

Les Pères synodaux ont souligné que l’évangélisation « consiste essentiellement à rendre témoignage au Christ dans la puissance de l’Esprit par la vie, puis par la parole, dans un esprit d’ouverture aux autres, de respect et de dialogue avec eux, en s’en tenant aux valeurs de l’Évangile ». Pour ce qui est de l’Église en Afrique, ce témoignage doit être au service de la réconciliation, de la justice et de la paix. (§ 163)

L’annonce de l’Évangile doit retrouver l’ardeur des débuts de l’évangélisation du continent africain, attribuée à l’évangéliste Marc, suivi par une « foule innombrable de saints, de martyrs, de confesseurs et de vierges ». Avec gratitude, il faut se mettre à l’école de l’enthousiasme de nombreux missionnaires qui, pendant plusieurs siècles, ont sacrifié leur vie pour apporter la Bonne Nouvelle à leurs frères et sœurs africains. Au cours de ces dernières années, l’Église a commémoré en différents pays le centenaire de l’évangélisation. Elle s’est justement engagée à diffuser l’Évangile à ceux qui ne connaissent pas encore le nom de Jésus-Christ. (§ 164)

L’Église qui chemine en Afrique est appelée à contribuer à la nouvelle évangélisation également dans les pays sécularisés, d’où provenaient auparavant de nombreux missionnaires et qui aujourd’hui manquent malheureusement de vocations sacerdotales et à la vie consacrée. (§ 167)

L’Esprit Saint ne manque pas de susciter aussi en Afrique des hommes et des femmes qui, rassemblés en différentes associations, mouvements, et communautés, consacrent leur vie à la diffusion de l’Évangile de Jésus-Christ. Les Pasteurs ont le devoir de veiller afin que ces nouvelles expressions de la fécondité pérenne de l’Évangile s’insèrent dans l’action pastorale des paroisses et des diocèses. (§ 168)

8. Conclusion : « Aie confiance ! Lève-toi, Il t’appelle ! » (Mc 10, 49)

Que ces paroles vous redisent la dignité de votre vocation d’enfants de Dieu, membres de l’Église une, sainte, catholique et apostolique ! Cette vocation consiste à répandre dans un monde souvent enténébré la clarté de l’Évangile, la splendeur de Jésus-Christ, vraie lumière qui « éclaire tout homme » (Jn 1, 9). En outre, les chrétiens doivent offrir aux hommes le goût de Dieu le Père, la joie de sa présence créatrice dans le monde. Ils sont aussi appelés à collaborer avec la grâce de l’Esprit Saint, afin que le miracle de la Pentecôte se poursuive sur le continent africain, et que chacun devienne toujours plus un apôtre de la réconciliation, de la justice et de la paix.

Dans son allocution lors de la signature de l’exhortation et de sa remise aux évêques d’Afrique, il enfonce le clou dans un texte très court centré totalement sur l’appel à rencontrer la personne du Christ dans sa Parole :

« Une des premières missions de l’Église demeure l’annonce de Jésus-Christ et de son Évangile ad gentes, c’est-à-dire l’évangélisation des personnes qui sont éloignées de l’Église d’une manière ou d’une autre. Je souhaite que cette Exhortation vous guide dans l’annonce de la Bonne Nouvelle de Jésus en Afrique. Celle-ci n’est pas uniquement un message ou une parole. Elle est surtout l’ouverture et l’adhésion à une Personne : Jésus-Christ, le Verbe incarné. Lui seul possède les paroles de la vie éternelle (cf. Jn 6, 68) ! À l’exemple du Christ, tous les chrétiens sont appelés à refléter la miséricorde du Père et la lumière de l’Esprit Saint. L’Évangélisation présuppose et entraîne aussi la réconciliation, et elle promeut la paix et la justice. »

Et dans son discours aux évêques du Bénin le dimanche 20 novembre :

« C’est le visage crucifié et glorieux du Christ qui doit tous nous guider, afin de témoigner de son amour pour le monde. Cette attitude demande une conversion constante pour donner une force nouvelle à la dimension prophétique de notre annonce. À ceux qui ont reçu la mission de guider le peuple de Dieu, il incombe de la susciter et d’aider à discerner les signes de la présence de Dieu au cœur des personnes et des événements. Que tous les fidèles fassent la rencontre personnelle et communautaire avec le Christ, pour s’en faire les messagers ! Cette rencontre avec le Christ doit être solidement enracinée dans l’accueil et la méditation de la Parole de Dieu. En effet, l’Écriture doit occuper une place centrale dans la vie de l’Église et de chaque chrétien. Je vous encourage donc à faire de sa redécouverte une source de renouvellement constant, afin qu’elle unifie la vie quotidienne des fidèles et qu’elle soit toujours plus au cœur de toute activité ecclésiale. »

[1]      Mgr Benjamin Marc Ramaroson, Synode sur la Parole de Dieu, intervention le 7 octobre 2008.

[2]      Plus d’un quart ne l’a toujours pas achetée alors que, depuis un an, il n’y a pas une messe où je n’ai appelé à l’acquérir, vendant 3 000 Ariary le Nouveau Testament acheté 7 000 Ariary à Fianarantsoa.

[3]      Cf. le Document d’Aparecida pour l’Eglise d’Amérique Latine et l’exhortation apostolique Dei Verbum suite au Synode de 2008 sur la Parole de Dieu.

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