Dimanche 5 octobre, ce fut l’élection des Préfets et Vice-Préfets et des conseillers municipaux dans tout le Brésil, et donc à Dores. La période électorale est un temps éprouvant. J’ai été soumis à de multiples pressions, et j’ai eu besoin de prendre un temps de relecture, de remettre par écrit ce qu’il m’avait été donné de vivre tous ces derniers mois, comment j’avais tenté de me laisser guider par l’Esprit Saint.
Dans les journaux, en particulier dans de récents articles du journal La Croix[1], il est souvent question de la violence qui règne au Brésil, un des pays les plus meurtriers du monde, tant du côté des bandes des favelas, que des propriétaires ou politiques, que de la police. La corruption est aussi dénoncée. Comment cela se manifeste au quotidien dans une zone rurale et en temps électoral ?
Dores do Rio Preto n’est pas dans les régions de plus forte violence ou de plus forte corruption que sont les grandes villes ou les régions ayant de grands propriétaires comme en Amazonie, dans le Para et dans d’autres états, mais c’est une réalité marquante que j’ai encore mieux perçue pendant ces derniers mois de campagne électorale.
Pour mémoire, Dores est une paroisse rurale, à la frontière entre les Etats de l’Esprit Saint, du Minas Gerais, de Rio de Janeiro, au pied du Pico da Bandeira, dont l’église principale est située à Dores do Rio Preto. C’est une municipalité de 6 800 habitants sur un territoire de 80 km x 15 km, avec une ville principale de 2500 habitants, deux gros villages, et le reste en habitat dispersé.
Novembre 2005 : Arrivée au Brésil et découverte de la corruption généralisée
Je viens d’arriver au Brésil, à Guaçui. Lourival, diacre permanent, homme qui sent bon l’Evangile, me conduit chaque soir dans les communautés pour célébrer la messe du mois. Comme nous empruntons une piste défoncée qui relie Guaçui (25 000 h) à la ville voisine (4 000 h) distante de 25 km, il m’explique que cette route existe sur les cartes, que les crédits ont été débloqués, qu’ils ont « disparu » et que la route n’a jamais été construite. Il n’est pas possible de faire une deuxième demande de subvention auprès du ministère de l’Equipement.
Quelques temps après, un « chemin rural goudronné » va être fait avec une subvention du ministère de l’Agriculture, installation meilleure que la piste totalement impraticable en période de pluie, mais totalement inadaptée à la communication entre deux villes. Deux voitures légères se croisent difficilement, le tracé n’a pas été redressé, et, un an après sa construction, il y a déjà eu plusieurs accidents graves.
Dimanche 4 Mars 2006 : Visite de familles dans la Communauté Saint Sébastien du Cêrro et découverte des séquelles des élections dans les communautés
3 février : avec Juarez, outre la paroisse de Guaçui, nous venons de recevoir la charge de la paroisse de Dores. Lors de la première messe dans la communauté rurale Saint Sébastien de Cêrro, Catia, ministre de l’Eucharistie vient demander de l’aide : son amie Nelsia, femme d’un candidat malheureux au poste de Vice-Préfet (équivalent du 1er adjoint) ne lui parle plus depuis les élections de 2004.
4 mars : premières visites dans une communauté de Dores. Nous allons avec Katia visiter Nelsia et les deux se réconcilient. Nelsia demande que nous l’accompagnions visiter plusieurs familles, voisins immédiats, avec lesquels elle ne parle plus depuis la dernière campagne électorale (cf. courrier collectif de mars 2006). Je découvre ainsi les divisions surgies des élections précédentes.
Août 2006 : Premier contact avec le Préfet, Carloman, lors de la visite pastorale de Dom Célio
Visite pastorale de l’évêque. C’est notre première rencontre avec Carloman, le Préfet de Dores. Il explique comment, en 2 000, il a trouvé une préfecture (mairie) tellement endettée que les personnes originaires de Dores étaient refusées dans les hôpitaux voisins du fait que Dores ne remboursait pas les frais.
Très en confiance et très sympathique, il a parlé aussi de sa foi, de la mort de sa première épouse, de son remariage avec une femme qu’il a aidée à se séparer d’un mari pervers qui agressait sexuellement les blessés dans l’ambulance municipale. Carloman a beaucoup aidé cette femme et ils se sont aimés. Il a dit comment des personnes « bien croyantes » avaient jugé sa femme et comment elle avait arrêté de participer à la messe et renoncé à ses engagements dans la « Pastorale de l’enfant » (prévention de la mortalité infantile). Je suis repassé le voir, lui et sa femme, et il a commencé à revenir à la messe. Une relation amicale est née entre nous.
Mars 2007 : Ninho, opposant à Carloman, condamné par la justice à une peine de substitution à la prison : travailler pour la paroisse
Ninho, Président d’un parti d’opposition à la liste de Carloman, est condamné pour injures graves pendant la campagne électorale de 2 004. De par la lenteur de la justice, la condamnation intervient 3 ans après.
La justice demande à l’église de lui trouver une peine de substitution à la prison et Ninho devient « chauffeur du Père Antenor », prêtre qui a fait son « année pradosienne » en habitant avec nous. Pendant 6 mois, Ninho va conduire Antenor pour aller célébrer les messes du vendredi, samedi et dimanche soir. Lui qui n’allait plus à l’église depuis longtemps, a passé de longues heures à partager avec Antenor et avec nous, à aller à la messe.
Par la suite, j’ai beaucoup entendu parler des divisions très fortes que provoquent les élections, plus douloureuses encore dans une municipalité rurale de 6 800 habitants. Lors des élections 2004, il y a eu des menaces de mort et plusieurs candidats ne se déplaçaient pas sans « garde du corps ». Juliana, la fille de Carloman a été sérieusement blessée à la face suite à une bagarre. Des élections de 2004, il reste de multiples blessures, et des procès, qui continuent à venir au tribunal ces jours-ci.
En 2000, un candidat a abattu en pleine rue un opposant et n’a jamais été inquiété. La justice manque de moyens et 70 % des homicides ne sont suivis d’aucune investigation. De plus, quand un coupable est arrêté, trop souvent, s’il a des appuis financiers et politiques, il peut continuer à vivre impunément. Ainsi, la responsable d’une des communautés rurales est veuve avec 4 enfants à charge et l’assassin de son mari est en liberté. Il a passé un mois seulement en prison et n’a rien payé. J’ai déjà entendu en confession 2 personnes pour meurtre et qui n’ont jamais été inquiétées. Cela explique aussi toutes les vengeances personnelles en cas d’agression.
Il y a des juges corrompus, d’autres débordés. Il y a aussi des personnes de qualité exceptionnelle et qui risquent leur vie pour que justice soit faite. La Procureur et la juge qui exercent à Dores en ce moment sont deux personnes de très grande qualité.
Avril 2007 : Long partage avec Carloman à propos de la fête paroissiale
Le Conseil Pastoral Paroissial (C.P.P.) souhaite écrire une lettre pour demander au Préfet qu’il n’y ait plus de fête organisée par la ville et les commerçants en même temps que la fête patronale de la paroisse. La raison est que la dimension religieuse de la fête était très perturbée par la dimension commerciale. J’insiste pour que nous allions porter cette lettre et profitions de cette occasion pour un dialogue avec Carloman. Cela a de nouveau été un moment de partage très confiant et la demande du C.P.P. rejoignait un souhait du Préfet, malgré les pressions des commerçants pour qui cette mesure allait se traduire par une perte de bénéfices.
1er octobre 2007 : mort par suicide de Juliana, une des filles de Carloman.
Juliana, fille de Carloman, se suicide. Elle et son compagnon étaient soupçonnés d’usage et trafic de drogue, de vols de troupeaux et autres délits, et, semble-t-il, pas sans raison. Elle ne travaillait plus à la mairie de Dores parce qu’une loi anti népotisme l’interdisait. Manière de détourner la loi sur le népotisme, elle travaillait à la mairie d’Espera Feliz, ville à 9 km de Dores, dans l’Etat voisin du Minas Gerais. La mairie est tenue par le même groupe de familles que Dores, de même que Guaçui est aujourd’hui administré par le neveu de Carloman.
Très perturbée, sans doute même délirante, Juliana a passé des heures dans les dernières semaines de sa vie à se confier à ses amis, évoquant aussi sa mort. Divorcée, elle avait laissé la charge de sa fille à Carloman. Le lundi 1er octobre, elle est passée à l’école en faisant appeler sa fille de 13 ans pour lui annoncer de manière voilée son suicide. Elle s’est rendue à Espera Feliz et a exigé du garde qu’il ouvre la mairie hors des horaires habituels, lui a demandé de lui préparer une tisane. Sans qu’il la voie, elle a pris un produit désherbant utilisé pour les haricots, puis s’est agenouillée devant lui, lui a demandé de prier avec elle et a dit qu’elle venait d’absorber le poison. Bien qu’ayant été transportée immédiatement à l’hôpital, elle est morte dans l’heure qui a suivi.
Cette mort a perturbé nombre de personnes. Elle a aussi été récupérée par des personnes de l’opposition, y compris par Ninho, le « chauffeur de Padre Antenor », disant publiquement qu’il irait « piétiner sa tombe » et que sa mort était une très bonne nouvelle.
Lors des obsèques, j’ai choisi le texte de la passion de Jésus dans l’Evangile de Marc en commençant au couronnement d’épine (Mc 15,16-41). Je me suis abstenu de toute allusion à la vie de Juliana, de tout éloge, et j’ai commenté le don de Jésus de sa vie pour tous, demandant si nous serions du côté de ceux qui en rajoutent à la souffrance du Christ et qui l’insultaient, ou du côté de Simon de Cyrène qui aide à porter la Croix. J’ai aussi commenté cette phrase du centurion romain reconnaissant, à sa mort, la divinité de Jésus : « Vraiment, cet homme était fils de Dieu ». J’ai élargi cette affirmation pour dire que, par sa mort et sa résurrection, Jésus nous restaure tous, quelle que soit notre histoire, dans notre condition de fils de Dieu. L’Eglise était comble.
Ce moment m’a beaucoup rapproché de Carloman qui a longuement partagé toutes les persécutions subies avant et après les dernières élections. J’ai passé du temps à écouter les plus proches et à les aider à sortir du « délire » de Juliana.
En 2007, dans cette municipalité de 6 800 habitants, ce sont 4 personnes qui se sont suicidées en ingérant ce produit herbicide. Une autre, jeune mère de famille, se remet lentement de l’ingestion de soude. Je n’ai pas de chiffre officiel, mais le taux de dépressions est extrêmement élevé.
Fin 2007 : Annulation du mandat du Préfet de Guaçui, nouvelles élections et découverte du « clientélisme » lié aux emplois dépendant directement du Préfet
Le Préfet de Guaçui élu en 2004, qui avait habité plusieurs années à la maison paroissiale avec le prêtre précédent, et avait été largement appuyé par l’Eglise, voit son élection cassée pour diverses irrégularités électorales après une longue bagarre judiciaire. Nouvelle élection que le neveu de Carloman va gagner. Je découvre les campagnes électorales brésiliennes : les voitures de son qui sillonnent les villes inondant de décibels qui finissent par taper sur le système nerveux pour appeler à voter pour leur candidat, les pauvres payés pour tenir des drapeaux aux coins des rues, et puis, le lendemain des élections, de multiples personnes qui perdent leur emploi d’un instant à l’autre : tous ceux qui ont un poste lié au Préfet. Il ne s’agit pas seulement des directeurs de cabinets, mais aussi des femmes de ménage des écoles quand elles sont payées sur un poste dépendant du Préfet et non sur un poste titularisé.
Décembre 2007 : décision en C.P.P. d’une lettre ouverte au Préfet de Dores pour les vœux et lancement de la Campagne de Fraternité « Choisis donc la vie »
Je convaincs Elisa, coordinatrice, et l’ensemble du Conseil Pastoral Paroissial (C.P.P.), d’écrire une lettre adressée à Carloman et à tous les habitants de Dores à publier dans le journal paroissial pour présenter nos vœux et parler de l’engagement de l’Eglise Catholique, en particulier à Dores au service de la vie.
Dans cette lettre, nous présentions la « Campagne de Fraternité 2008 » de l’Eglise du Brésil dont le thème était : « Fraternité et défense de la vie » – « Choisis donc la vie » (Dt 30,19).
Ces campagnes de Fraternité sont une originalité de l’Eglise du Brésil. Elles sont lancées dans tout le Brésil le mercredi des cendres, mais s’étendent sur toute l’année et pas seulement sur la période du Carême. Ce sont des campagnes de sensibilisation sur un problème social, occasion d’une collecte, occasion aussi de peser sur l’Etat pour faire adopter des lois. Des publicités à la télévision, des émissions, relaient cette campagne.
En 2006, l’Eglise avait provoqué une réflexion sur la place des personnes ayant un handicap dans la société et dans l’Eglise. En 2007, elle avait porté sur la défense de l’Amazonie, au niveau écologique, social, et visait l’appui aux diocèses d’Amazonie. L’année prochaine, elle portera sur la sécurité publique et la violence.
Dans notre lettre aux habitants de Dores, nous mettions cette Campagne de Fraternité en lien avec les efforts que nous faisions pour développer la Conférence Saint Vincent de Paul (réalité très forte et dynamique au Brésil) et la Pastorale de l’Enfant, pour fonder la Pastorale de la Sobriété, pour accueillir les ouvriers qui construisaient l’usine hydroélectrique sur une des cascades de Dores, pour appuyer, à la demande de notre évêques, l’action de Dom Luiz Cappio au service des pauvres qui allaient être affectés par la transposition du Fleuve Saint François.
Nous valorisions tous les efforts publics en faveur de la vie auxquels j’avais essayé d’être présent : passage de la « Caravane de Programme d’Eradication du Travail Infantile » (appuyé par la municipalité), foire culturelle du lycée local, etc. Nous évoquions aussi notre préoccupation de faire naître un « dialogue œcuménique à Dores et notre regret qu’aucun Pasteur n’ait même répondu à la lettre que nous avions envoyée en septembre 2007 invitant à un déjeuner pour se connaître.
Et nous écrivions :
« La Campagne de la Fraternité n’appartient à personne et tous ceux qui veulent s’y associer seront bienvenus. Nous ferons l’ouverture officielle durant la Messe des Cendres et nous invitons tous ceux qui le souhaitent à venir.
L’année 2008 est année d’élections municipales. Vous savez tout ce que ce moment peut provoquer comme divisions et violences. Nous pensons nous engager pour proposer tant aux candidats qu’aux électeurs de faire des élections d’octobre 2008, à Dores do Rio Preto, un moment de croissance de la démocratie et de la fraternité, un moment de respect de chacun.
Nous pensons organiser une rencontre de réflexion de tous les candidats qui l’accepteront pour réfléchir aux « règles des candidats qui veulent servir la vie fraternelle à Dores » dans la manière de faire campagne. Nous comptons sur vous (Carloman), pour nous proposer le meilleur moment pour réaliser cette rencontre. Votre opinion sur cette initiative nous intéresse.
Nous allons aussi faire une conscientisation pour un autre climat durant la campagne électorale, pour une valorisation du service politique, pour le respect des autres candidats, le rejet de tout ce qui est clientélisme, corruption, achat de votes, etc., au cours des messes. »
Nous avons rencontré Carloman avec ce projet de lettre ouverte pour qu’il puisse réagir et nous suggérer des corrections avant sa publication. Il l’a accueillie très favorablement. La lettre a été lue à toutes les messes de janvier et diffusée dans la revue paroissiale.
Février 2008 : rencontre de manière séparée des probables futurs candidats à la charge de Préfet et Vice-Préfet
Comme à chacune des rencontres suivantes, je me suis fait entourer par Elisa, Coordinatrice Paroissiale connue pour être d’une famille du côté de Carloman, et par Rita, responsable de la pastorale des jeunes, de la catéchèse, connue pour être d’une famille du côté de l’opposition à Carloman, toutes les deux connues pour être « un peu à distance », libres, non engagée dans toutes les « guerres » passées. J’ai reçu séparément Claúdia et Edinho pour réfléchir à partir de la « Lettre à Carloman et aux habitants de Dores » sur le projet de réflexion avec les politiques.
Claúdia est adjointe de Carloman, fille d’une famille de commerçants, et candidate désignée à la succession de Carloman. Ce dernier ne peut se représenter, ayant déjà fait deux mandats consécutifs. Claúdia est considérée comme sans religion par les gens. Elle est divorcée. Le fils de Claúdia a fait sa confirmation l’année passée. Elle pratique lors des mariages ou baptêmes auxquels elle est invitée. Elle pratique de temps en temps à l’Eglise Maranata[2]. Elle a accueilli très favorablement notre projet. Elle a accepté la perspective de deux rencontres : l’une début juillet, juste après le dépôt officiel des candidatures, avec les seuls candidats aux postes de Préfet et Vice-Préfet (Préfet et premier adjoint) ; la deuxième, au mois d’août, avec tous les candidats. Claúdia est la conseillère qui a reçu le plus de votes en 2004. Elle est présentée par une coalition de droite.[3]
Edinho est afro-américain. Il a été Vice-Préfet de Carloman en 2000. C’est avec lui que Carloman a remis sur pieds les finances de la mairie de Dores. Il y aurait eu un engagement de Carloman à ne se présenter qu’une fois. En 2004, Edinho s’est présenté contre Carloman et la campagne a été très violente, non pas tant entre ces deux hommes, mais entre les partisans des deux côtés. Edinho est ingénieur à la Samarco, très grande entreprise brésilienne aux multiples branches, dont l’extraction et la commercialisation de Minerais de Fer. Un « mineroduc » construit par la Samarco transporte le minerai de fer en solution aqueuse dans des canalisations qui traversent Dore et Guaçui et viennent de la région de Belo Horizonte pour aller jusqu’à un port proche de Vitoria, 500 km plus loin. C’est une source d’emplois importante pour les régions traversées, au moment de la construction des canalisations. La deuxième canalisation vient d’être faite, d’autres sont en projets. La Samarco participe aussi à des projets de développement dans les municipalités traversées. La rencontre avec Edinho est aussi très conviviale et il se dit très intéressé par notre projet. Il est présenté par une coalition des partis de gauche dont le Parti des Travailleurs, parti du Président Lula.
Février 2008 : Première rumeur sur ma sympathie en faveur du Préfet
Dans cette même période, une rumeur insistante lancée par Ninho, ex « chauffeur de Antenor », me présente comme lié à Carloman. Un soir, je vais frapper à sa porte et utilise l’humour pour qu’il mette fin à cette rumeur :
– « Ninho, j’entends dire que tu me diffames dans toute la ville : tu dis que je suis du côté de Carloman parce que j’ai célébré les obsèques de sa fille Juliana et que je n’aurais pas célébré les obsèques du frère d’Edinho. Or, je suis venu prier silencieusement au salon funéraire mais la famille, liée à l’Eglise Maranata, n’a rien demandé. J’ai un service à te demander : si tu pouvais parler encore plus mal de moi pour que je puisse te poursuivre en justice et bénéficier de nouveau d’un chauffeur… »
Il m’a fait entrer, touché par l’humour et l’affection. Il a raconté toutes les « persécutions », selon lui, faites contre lui par Carloman. Il a expliqué comment Carloman lui avait enlevé son emploi, comment la mairie était au service de quelques familles, comment le dernier tirage « au sort » de lots de terrains avait bénéficié exclusivement à des personnes de la famille, comment l’autorisation de vendre d’autres terrains avait été gelée, tant qu’un membre d’une des familles au pouvoir, n’avait pas vendu tout un terrain qu’il avait mis en lotissement. Il m’a proposé de venir déjeuner chez lui sans me dire qu’il allait inviter toute sa famille et ses amis, touché par ma visite.
Je lui explique notre projet de vivre une campagne différente, dans le respect. Quelques jours après, il me dit qu’il ne se sent pas capable de vivre les élections sans déraper, qu’il a le sang chaud et qu’il a décidé de ne pas se présenter. J’étais émerveillé, même si je pensais que l’idéal était de se présenter, mais sans déraper. Quelqu’un cassera mon émerveillement en m’expliquant qu’une condamnation de justice lui interdisait de se présenter cette année.
Samedi 20 février 2008 : Le C.P.P. Décide l’interdiction de tout don public et confirme tout le travail sur le Denier de l’Eglise
J’ai déjà largement abordé cet aspect dans les courriers précédents. Je le mentionne ici parce qu’il est essentiel dans le cadre de l’annonce de l’Evangile dans le monde politique. Il rend impossible à quelque candidat que ce soit de faire pression sur les communautés. Les dons sont acceptés, mais ils doivent être faits dans le secret de l’enveloppe du denier de l’Eglise.
C’est la mise en œuvre d’une réflexion lancée au niveau du diocèse mais qui n’a jamais abouti ailleurs et qui reste en discussion dans le diocèse.
C’est dans ce même C.P.P. que nous avons confirmé la décision de partager 5% des revenus du denier de l’Eglise avec la Conférence Saint Vincent de Paul chargée en notre nom de vivre la charité et que nous avons arrêté les loteries que faisaient telle ou telle famille, communauté, au profit d’une famille dans la nécessité. Elles étaient invitées à se faire accompagner par la Conférence Saint Vincent de Paul.
Mars 2008 : lettre contre l’incitation à boire et 2ème rumeur me situant comme lié à Carloman
Mardi 4 mars, une publicité tapageuse avec une « voiture de son » qui sillonne sans cesse la ville, invite les jeunes à un bal où ils pourront acheter la bière pour 50 centimes de real. La Coordinatrice Paroissiale de la Pastorale de la Sobriété suggère la rédaction d’une lettre de protestation à adresser au Propriétaire du bal, à la Procureur, au Conseil de Protection des Mineurs, au Préfet, pour demander que des mesures soient prises pour protéger les jeunes. Le bal est prévu pour le Samedi Saint après la Veillée pascale. 2 000 jeunes de toute la région sont attendus. C’est à chaque fois un moment de beuverie où les mineurs entrent malgré la loi, où il y a aussi de la drogue. A chaque fois, des jeunes meurent dans des accidents sur le chemin du retour. La ville voisine d’Espera Feliz (état du Minas Gerais) qui accueillait ce type de manifestations a pris des mesures plus strictes et les organisateurs se sont repliés sur Dores.
La lettre est signée par Marinei (Coordinatrice Paroissiale de la Pastorale de la Sobriété), Maria-José (Coordinatrice de la communauté de base de Dores), sa sœur Elisa (coordinatrice paroissiale) et moi-même. Elle est très bien reçue par la Procureur, le Service de Protection de des Mineurs et Carloman, le Préfet.
Ce que je ne savais pas, c’est que les trois signataires sont de familles liées à la mairie alors que le propriétaire de la salle de bal est lié à l’opposition. Je suis sûr qu’aucune des trois n’a fait cela avec une arrière pensée politique, mais parce qu’elles sont elles-mêmes touchées par la maladie alcoolique dans leur famille, et dans le cadre de notre travail de sensibilisation à ce fléau qui atteint pratiquement toutes les familles de Dores.
Je saurai lors de ma visite à la Procureur de la République, en juillet, que, avant même de recevoir notre courrier, elle avait demandé une inspection des salles des deux bals qui devaient avoir lieu cette semaine là par la commission de sécurité, se préoccupant aussi de la situation. La commission a interdit les deux bals au dernier moment. Le propriétaire est convaincu que l’inspection est la conséquence de notre courrier, envoyée de manière opportuniste par l’autre groupe politique.
A partir de là, le propriétaire a montré largement la lettre qu’il avait reçue et a lancé une forte campagne contre moi et mon lien avec Carloman. Il est venu nous voir mais ne nous a pas cru. Il a cru à mon absence d’arrière-pensées, mais était convaincu que j’avais été manipulé par les amis de Carloman. Nous avons fait un communiqué affiché dans l’Eglise pour rappeler que nous n’avions pas demandé l’interdiction du bal mais alerté sur la protection des mineurs et sur l’incitation à boire. Rien n’y a fait.
Quelques semaines plus tard, j’ai appris que le propriétaire avait refusé d’être parrain de baptême en réaction à cet évènement. Cela a été l’occasion d’aller lui rendre visite pour qu’il entende notre préoccupation et l’absence de dimension de politique partisane, même si les partisans de Carloman s’étaient beaucoup réjoui de l’évènement. Il m’a invité à déjeuner. Entre temps, il avait réformé la salle de bal et m’a demandé de la bénir. L’affaire s’est calmée et nous sommes devenus « amis ».
Mai : Aller ou ne pas aller célébrer à la scierie de Baba et lettre « Zachée, descends vite ! »
Dans mon courrier précédent (mai 2008), j’ai largement fait écho à cette question : aller ou ne pas aller célébrer la messe de Santa Rita dans la fazenda de Baba, Jean-Baptiste, patron d’une scierie qui employait 60 personnes sans les déclarer. J’ai rendu compte de la lettre remise à Baba et publiée partiellement dans le journal paroissial, sans que le nom de Baba n’apparaisse, pour questionner sur de multiples situations d’injustice sociale et intitulée : « Zachée, descends vite ! ».
Je reste bouleversé par le chemin de cet homme dont témoignent ceux qui travaillent dans la scierie. Tous ont des papiers et les conditions de travail ont profondément changé. Des personnes m’ont dit qu’il n’arrêtait pas de parler de cette lettre qu’il avait reçue comme une bénédiction. Il a dit qu’il s’était senti « aimé » dans cette démarche, qu’il restait étonné de voir un prêtre s’intéresser ainsi à la vie des gens, et qu’il ne voudrait pas être un employeur injuste. Si lui s’est « converti », je lui ai répété qu’il me provoquait moi-même à me convertir et à entrer dans ce regard de Jésus sur Zachée.
J’ai aussi relu l’étude d’Evangile sur ce qui a aidé Pierre à se laisser conduire par l’Esprit Saint : un des éléments de discernement est d’avoir entendu l’appel de Dieu à ne déclarer immonde ou impur aucun homme.
Jeudi 12 juin 2008 : Mariages dans une communauté rurale où un futur candidat offre le gâteau de mariage et fait de nombreuses photos
Je célèbre l’un des 24 mariages de cette année de personnes qui ne s’étaient pas mariées à cause du coût des taxes pour se marier tant à l’Eglise que pour le mariage civil qui se fait devant le notaire. Par décision du Conseil Pastoral Paroissial, nous avons arrêté de recevoir ces taxes et faisons une demande de dispense de mariage civil auprès de l’évêque pour toutes ces personnes.
A la fin de la célébration, je m’aperçois qu’il y a un gâteau grandiose offert par Nelsinho, membre de cette communauté de base, candidat à la réélection comme conseiller municipal. Sa femme est l’assistante sociale. Pendant toute la campagne, elle va largement utiliser sa fonction pour appuyer la candidature de son époux. Là, c’est l’occasion rêvée pour se montrer en « bienfaiteurs ». Cela correspond à la manière normale de faire campagne, mais c’est justement ce que les évêques appellent à changer.
Samedi 21 Juin 2008 : C.P.P. pour réfléchir sur les élections.
Comme l’annonçait le journal de janvier, nous avons lancé une réflexion au niveau de l’Eglise. Le Conseil Pastoral Paroissial a fait « Révision de vie » à partir des questions suivantes :
– Quelles ont été les difficultés lors des élections municipales de 2004 (sans entrer dans une polémique partisane) ?
– Que pouvons-nous transformer et comment l’Eglise peut concourir à éviter ces divisions ?
– Si j’ai une responsabilité dans ma communauté (coordonateur, ministre de la parole, de l’eucharistie, etc.), puis-je exercer ma charge et me présenter aux élections ?
– En ayant en tête les trois questions précédentes, essayer de faire une liste de « conseils » pour bien vivre les élections qui arrivent, les « dix commandements de l’électeur et du candidat » ?
La troisième question avait pour but de pousser à ne pas arrêter la fonction en Eglise, mais de la vivre en ne mélangeant pas tout. Elle visait à travailler à être « ministre de la parole », « ministre de la communion », non seulement dans l’Eglise, mais au sein de son parti, appelant à vivre les élections autrement.
Après un temps de réflexion par carrefours, la mise en commun a été un grand moment. Tous ont été enthousiasmés par ce partage et chacun est reparti avec comme mission de provoquer la même réflexion au Conseil (mensuel) de la Communauté de Base (C.P.C.) et de faire un conseil éventuellement élargi à toute la communauté dans les petites communautés. Chacun était chargé d’apporter le résultat de la réflexion de sa communauté au Conseil Pastoral Paroissial de Juillet. Un projet de synthèse de la réflexion devait être soumi au C.P.P de juillet, enrichi de la réflexion des Communautés de Base, et publié dans le journal paroissial d’août.
Samedi 12 juillet : C.P.P où nous étudions la brochure des évêques de l’Etat de l’Esprit Saint « Construire la démocratie »
Fin juin, les évêques des 4 diocèses de l’Etat de l’Esprit Saint publient et diffusent très largement une brochure remarquable sous le titre : « Construire la Démocratie – Elections 2008 ».
Au moment de rédiger la synthèse de la réflexion du C.P.P., nous décidons de reproduire le maximum d’éléments de la brochure des évêques en complétant avec les éléments de réflexion de notre Conseil qui n’apparaissent pas dans la brochure. Cela évite que la réflexion sur la corruption apparaisse comme celle d’un prêtre français, ou d’une paroisse isolée, et cela lui donne toute la force du travail fait à l’échelle de l’état de l’Esprit Saint et du Brésil entier.
Ce qui n’apparaît pas dans la brochure des évêques, c’est toute la réflexion faite par les gens de Dores sur l’importance du respect de celui qui pense différemment, sur l’alerte contre les fausses rumeurs et calomnies, sur l’appel à ne pas « diaboliser » l’autre liste. Il semble que nous ayons la chance, à Dores, d’avoir deux listes de qualité.
Le principal argument qu’utilisera Claúdia sera justement de faire peur aux électeurs parce que le maire qui avait été si catastrophique avant Carloman, était du même bord politique qu’Edinho, même s’il ne se présentait plus. Cet argument aura un poids très fort.
Le C.P.P. a commencé par une écoute des 16 responsables qui, dans chaque communauté, sont parvenus aux mêmes réflexions que le C.P.P. dans un climat de paix profonde et de joie.
Elisa a confessé qu’elle pensait qu’il valait mieux ne pas aborder la question politique, que c’était trop dangereux, que je ne connaissais pas le « peuple de Dores ». Cependant, elle dit sa joie du chemin fait.
Nous avons ensuite fait la lecture de la Brochure des évêques qui résonnait si fort avec notre réflexion.
L’éditorial de Dom Célio, pour l’édition de notre diocèse, valorise très fortement la vie politique et appellent les chrétiens à participer activement aux élections à venir, à se former :
« Notre participation comme chrétiens, doit être non seulement comme électeurs, mais aussi directe, conformément au Document de la CNBB (Conférence Nationale des Evêques du Brésil) n° 67, « Tous et chacun ont le droit et le devoir de participer à la vie politique, pour autant dans la diversité de formes, niveaux, fonctions et responsabilités. […] L’opinion très répandue que la politique est lieu de danger moral obligé, ne justifie absolument ni le scepticisme, ni l’absentéisme des chrétiens pour la chose publique. ». Au contraire, cette parole du Concile Vatican II est très signifiante : « L’Eglise loue et apprécie le travail de ceux qui se dévouent au bien de la nation et qui prennent sur eux le poids de telles charges au service des hommes. » (Doe. 67 – n. 50)
Cette brochure sur les élections se propose de nous aider à découvrir les critères basiques dans la formation de notre conscience politique, pour la mise en œuvre d’une véritable démocratie dans nos municipalités. La démocratie est un processus lent qui se construit par la participation des personnes qui apprennent à s’organiser et à mobiliser la société. L’expérience de participation populaire dans la politique advient par l’intermédiaire des mouvements sociaux, syndicats, pastorales sociales et partis politiques. Elle ne peut pas être perdue par l’action néfaste de politiques qui cherchent le pouvoir et les avantages personnels à tout prix.
Cherchez à étudier le contenu de cette brochure sur les élections dans toutes les occasions que vous aurez dans nos communautés ecclésiales. Passez l’information à d’autres personnes. Nous insistons sur la nécessité de notre participation active, nous conscientisant sur notre responsabilité de voter, et de voter bien. Nous avons la certitude que chacun est responsable pour le bon climat qui doit régner pendant ce temps, qui ne doit pas provoquer de divisions, bagarres, malentendus dans nos communautés. Nous communautés doivent être un exemple d’une saine citoyenneté qui soit être exercée par tous. »
Le contenu de la brochure est le suivant :
- Une introduction sur le pourquoi d’une prise de parole de l’Eglise dans le domaine politique en partant d’une méditation sur la vie du Christ, en rappelant l’histoire de la prise de parole de l’Eglise au Brésil : la défense des droits humains pendant la dictature, la campagne pour le retour à la démocratie et la participation à la Constitution en 1988, le projet de loi 9 840 contre la corruption, la journée du « Cri des exclus » depuis plus de dix ans, le plébiscite sur la Dette Extérieure, le projet « Faim zéro », le travail des pastorales sociales (avec la pastorale des prisons, la pastorale de la terre, la pastorale de l’enfant, pour ne citer que celles-là, qui interviennent dans des situations critiques de la vie du peuple), la campagne des citernes dans le Nordeste semi-aride, les prises de paroles de la CNBB dans des questions éthiques (politique sociale, avortement, cellules souches, violence et autres thèmes), la campagne (qui a échoué) pour une loi interdisant la possession d’armes en 2005.
- La brochure se présente clairement comme n’intervenant pas dans le choix de tel ou tel parti.
- Suit une réflexion sur ce qu’est la politique, ce qu’est une démocratie, comment la vie démocratique est toujours à construire.
- Un autre chapitre présente l’année électorale comme année d’espérance parce que c’est l’occasion de faire des projets, de confirmer les politiques qui ont agi dans le sens du bien public et de se libérer des autres.
- Le chapitre suivant insiste sur l’importance des élections municipales parce que c’est à ce niveau que l’on peut élire une équipe qui combatte la misère, qui agit sur tout ce qui touche à la vie de chacun : emploi, santé, éducation, logement, etc.
- Le chapitre suivant explique le fonctionnement du pouvoir au Brésil : exécutif, législatif, judiciaire et la place du « Ministère Public ».
- Il explique le rôle du Préfet (équivalent du maire en France) et des Vereadores (Conseillers), ce qu’ils doivent faire et ce qu’ils ne doivent pas faire. Il présente les Lois Organiques d’Action Sociale.
Quand nous avons lu « Ce que ne doit faire ni le Préfet, ni les conseillers », cela a été un fou rire général : il s’agissait justement de la description de la pratique « normale » des politiques lors des élections passées. Voici la traduction de ce paragraphe et du suivant sur les critères de choix proposés par les évêques :
- Ce que ne doit pas faire le Préfet ou les conseillers
- Assistancialisme social : fournir des gadgets, des paires de lunettes, fauteuils roulants, appareils dentaires, colis de nourriture et autres produits de nécessité de base pour une famille, etc.
- Attribuer des consultations médicales, des places en ambulance, des remèdes en échange de votes.
- Tromper l’électeur en utilisant les services publics pour lui fournir un bénéfice comme si c’était le conseiller qui faisait ce don.
- Transporter les électeurs pour changer de lieu de vote.
- Critères pour choisir un(e) candidat(e) :
- Choisissez un candidat qui n’échange pas le vote ou n’achète pas le vote (colis alimentaire, remède, promesse d’emploi, miracle, argent, chirurgie, ligature de trompe, vasectomie (méthodes de stérilisation très répandue au Brésil et dans les pays pauvres). Cette attitude constitue un « crime électoral » selon la loi 9840.
- Choisissez un candidat qui n’est pas compromis dans des détournements d’argent public ou dans des actes de corruption.
- Choisissez un candidat qui a une histoire politique, qui défend les intérêts de la majorité de la population, qui participe à des mouvements et groupes d’appui et de lute en faveur des droits de la majorité.
- Choisissez un candidat qui défend la vie depuis la conception jusqu’à son terme naturel.
- Choisissez un candidat qui a des propositions bien définies par écrit dans un programme que vous pourrez lui rappeler quand il sera élu.
- Assistez aux programmes et débats politiques, en effet, ils vous aident à connaître les propositions défendues par les candidats.
- Attention au candidat qui a une campagne très chère, qui accepte de l’argent d’entreprises corrompues pour faire campagne. (Note : des lois ont limité de manière drastique les possibilités pendant la campagne d’organiser des grands spectacles. Cela permet de ne plus favoriser ceux qui ont de l’argent et de tenter de limiter les abus et détournements de fonds.
- Attention au candidat qui utilise la religion ou qui se présente membre d’un « ministère d’Eglise » ou de pastorale pour être élu. Observez s’il a toujours été un chrétien véritable ou s’il est un chrétien de façade.
- Ne votez pas pour un candidat ou une candidate qui répond d’un procès criminel ou a été condamné.
- Ne votez pas pour un candidat qui privilégie les gens de sa parenté et ne pensent qu’à acquérir un poste et le salaire qui va avec, avec l’argent public.
- Ecoutez les personnes, mais, rappelez-vous que le vote est libre et secret. Ne laissez pas d’autres prendre la décision à votre place (c’est souvent l’employeur, le logeur, le chef de famille, qui décide du vote des plus pauvres). Soyez responsables et conscients de votre vote.
Le chapitre suivant insiste encore sur tout ce qui est « crime électoral », rappelle la loi qui oblige à présenter ses comptes de campagne sur Internet à diverses dates de la campagne, à déclarer sa richesse personnelle et conclue :
- En résumé, votez pour qui
- Défend la dignité de la personne et de la vie.
- Est honnête et fidèle dans ses projets, y compris dans son appartenance politique (note : beaucoup changent de parti quand un autre semble permettre un accès plus facile au mandat convoité).
- Honore ses engagements et est transparent.
- Est déjà engagé dans la vie politique publique.
- A la capacité d’administrer (un certain nombre de candidats se présentent sans le niveau scolaire suffisant pour pouvoir administrer vraiment).
- Est déjà engagé dans la défense des intérêts de la population.
- A une campagne modeste et ne dépense pas de l’argent de manière inconsidérée.
Le chapitre suivant montrait la progression du Brésil dans la capacité à casser des élections d’hommes corrompus : + 320 % de 2002 à 2006.
En annexe, la brochure présente la Loi 9840 contre la corruption proposée et votée avec l’appui ou à l’initiative (je ne sais pas) de la CNBB et de l’ensemble des catholiques.
La brochure reproduit une suggestion des évêques de la CNBB à constituer des « Comités Loi 9840 » dans chaque municipalité « pour sortir du traditionnel cercle vicieux de la corruption ».
Cette brochure, et l’article que nous avons préparé pour la « Caminhada Paroquial » notre journal paroissial, ont été accueillis avec enthousiasme et tous se sont engagés à lire cet article dans les Cercles Bibliques[4].
Il a aussi été décidé que l’homélie de la messe mensuelle du mois d’août dans chaque communauté de base serait une réflexion à partir de la présentation de cet article, un appel fort à dire « non » à toute forme de corruption et « oui » au respect de l’autre.
A chaque fois, j’ai montré comment c’était un faux calcul que d’accepter un « cadeau » d’un candidat, comment le candidat faisait le cadeau avec de l’argent qu’il avait détourné, pour avoir le pouvoir pour lui, comment le candidat ne visait pas le service de tous, comment celui qui se faisait « acheter pour une paire de sandales » (cf Amos 8), était perdant. J’ai rappelé le rôle des politiques, travailler pour qu’il y ait un service de santé accessible à tous, des conditions de travail qui permettent à chacun une vie décente, mais non pas favoriser telle ou telle personne, encore moins pour acheter son vote.
Dans l’éditorial de ce projet de numéro pour le mois d’août, basé sur la méditation de la rencontre entre Philippe et le ministre éthiopien (Ac 8) que nous avions méditée tout au long du mois de juillet, j’écrivais :
« Je voudrais mettre en valeur l’attitude de Philippe quand il va en mission sur la route de Gaza, parce que nous avons une indication très forte pour vivre la mission à Dores : Il se laisse conduire par un messager de Dieu. Il s’approche de l’Ethiopien. Il fait attention à lui, jusqu’à savoir d’où il est, ce qu’il fait. Il accepte de cheminer avec lui, de monter sur son char. Il annonce le Christ en partant de la recherche de cet homme et cultive ce que Dieu avait déjà préparé dans le cœur de cet homme en éclairant par la Parole de Dieu.
Cela doit nous inciter chacun, dans notre vie quotidienne, à être attentifs à la soif de l’autre, à savoir accompagner cette soif. Nous savons que cela n’est pas possible si nous ne prenons pas plus de temps pour lire la Parole de Dieu : personnellement, dans les Cercles Bibliques, dans la participation à la lecture des Actes des Apôtres. Pourquoi y a-t-il si peu de personnes de Dores qui viennent quand beaucoup participent dans les communautés rurales ?
Vivre l’Evangile dans les élections
Cela nous provoque aussi dans la perspective des élections. Avec l’aide de tous les habitants de Dores, nous voulons « faire des prodiges » (en référence aux apôtres dans les Actes), ensemble, être capables de vivre des élections dans un climat totalement différent des autres années.
Evidemment, l’Eglise ne donnera aucune indication de vote partisan. Mais elle veut cheminer avec toute la population de Dores et contribuer à vivre des élections à la lumière de l’Evangile, faisant de cette campagne électorale un moment de croissance de la citoyenneté et de la fraternité à Dores. Philippe est monté à bord du char de l’Ethiopien. Nous voulons participer à ce moment important de la vie de notre commune.
Vous trouverez ci-après le fruit de la réflexion du Conseil Pastoral Paroissial et des Conseils Pastoraux des Communautés de base. Nous espérons que cette réflexion contribuera à la qualité du débat à Dores. Vous trouverez aussi de larges extraits de la brochure des évêques de l’Etat de l’Esprit Saint : « Construire la démocratie – élections 2008 ».
Arrêter de ridiculiser les politiques
Je voudrais souligner une chose : il nous faut arrêter de ridiculiser les politiques : leur service est essentiel. Il nous faut aussi arrêter de faire « tomber » les politiques en acceptant ou en demandant des avantages personnels en échange de notre vote.
Le ministère de diacre, bien au-delà de la possibilité pour le diacre de célébrer des baptêmes, des mariages, de prêcher, d’annoncer la Parole de Dieu, a pour objectif de signifier la présence de l’Eglise dans le monde du travail, dans la société, aux côtés des personnes exclues, pauvres, ou à distance de la foi. A Guaçui, le Diacre Lourival a demandé la possibilité à Dom Célio de se présenter aux élections pour être conseiller. Dom Célio l’a confirmé dans cette demande. Cela ne signifie en aucun cas que les habitants de Guaçui doivent voter pour lui, qu’il y aurait une « liste catholique ». Cela signifie que, dans la personne du Diacre Lourival, l’Eglise catholique manifeste l’importance, la noblesse, de cet engagement politique, de ce service.
Pour des politiques qui arrêtent avec des offres équivoques
Pourvu que les candidats qui se présenteront à Dores entrent dans la même attitude que Simon le magicien de ce chapitre 8 des Actes, et qu’ils se convertissent, qu’ils arrêtent ces pratiques du passé pour tenter d’attirer les votes, qu’ils deviennent de véritables politiques, serviteurs de l’intérêt public et non de leur intérêt personnel. Nous demandons par exemple, à ce que les dons « équivoques », comme les gâteaux de mariage dans les communautés ou autres dons, faits par les candidats aux élections cessent.
Philippe a laissé l’Ethiopien et a continué la mission plus en avant, évangélisant les autres villes. Il nous faut aussi aller de l’avant, devenir de véritables disciples et missionnaires[5]. Vivre des élections totalement différentes à Dores… c’est possible grâce à l’engagement concret de chacun de nous. »
Padre Bruno
Mercredi 23 juillet : rencontre avec la Procureur de la République
Pour être sûrs que notre initiative soit bien perçue et pour lever quelques questions sur nos droits pendant la campagne électorale (une rumeur disait qu’elle interdisait toutes les fêtes, y compris la fête de la paroisse, pendant cette période), nous[6] avons rencontré Dr Ana, Procureur de la République, pour lui présenter la brochure des évêques, le projet de journal paroissial d’août.
Elle a accueilli avec beaucoup d’intérêt notre démarche tout en répétant plusieurs fois combien il me faudrait être prudent. Je savais qu’elle était elle-même très critiquée et peut-être en danger. C’était aussi l’occasion de lui faire part qu’elle n’était pas seule à essayer de contribuer à un autre climat, que le travail de conscientisation dans les communautés pouvait l’aider à prendre plus de « risques ».
C’est une femme remarquable qui a multiplié, tout au long de la campagne, les réunions publiques de formation sur la démocratie, tenant le même discours que nous et sans que ça soit le fruit d’une concertation entre nous.
Vendredi 25 juillet : rencontre à la maison paroissiale des 2 candidats à la charge de Préfet, des 2 candidats à la charge de Vice-Préfet, des 2 directeurs de campagne.
Cette rencontre faisait suite aux rencontres faites en février séparément avec Claudia puis avec Edinho. Elle a eu lieu dans un climat très cordial. Nous avons présenté le projet d’article du journal paroissial et offert des brochures des évêques de l’Etat de l’Esprit Saint aux deux listes.
Nous avons réfléchi sur les risques de rumeurs, calomnies, polémiques dévastatrices et j’ai suggéré de se rencontrer en cas de polémique pour y mettre un terme, surtout si elle partait d’une rumeur, d’une interprétation erronée.
J’ai aussi dit que je risquais d’être moi-même pris dans la tourmente, que je pouvais me tromper dans mes paroles ou attitudes, et qu’ils seraient toujours les bienvenus pour m’alerter, que je n’aurai pas peur de le reconnaître publiquement si c’était le cas.
Le climat a été si bon que nous avons terminé en nous donnant la main et en priant le Notre Père.
Mardi 29 juillet : Ligatures de trompe et visite de Lani de la liste d’opposition
Dès le mois de juin, allant célébrer dans la communauté Sainte Isabelle, j’apprends que la ministre de l’Eucharistie n’est pas là : « elle a été opérée. » Comme j’arrive toujours largement en avance, je vais chez elle. De quoi as-tu été opérée ? Ligatures de trompe…
Innocent, je ne pense à rien. C’est Sandra, la responsable de la Communauté, qui m’explique qu’elle a fait partie d’un groupe de 9 femmes emmenées sans rencontre préalable du médecin, sans réflexion avec le couple, sans examen préopératoire, sans suivi non plus, dans un hôpital de l’état de Rio de Janeiro, le tout offert par un candidat aux élections. Elle a 4 enfants.
Le lendemain, messe à la communauté voisine. Valdinei, dont j’ai célébré le mariage il y a quelques mois et qui vient d’avoir son premier enfant, n’est pas là pour faire chanter. « Il a été opéré… » Cette fois-ci, stérilisation pour un homme. Par « pur hasard », il est métayer sur la propriété de Carloman.
Ce même 25 juillet, alors que je viens de recevoir les candidats pour le poste de Préfet et de Vice-Préfet, Lani vient me rencontrer. Femme à la vie bien perturbée, malade de l’alcool et souvent ivre sur la voie publique, elle a témoigné récemment dans le journal paroissial de comment son fils de 10 ans l’avait aidé à se libérer et l’avait fait revenir à l’Eglise. Elle a fait sa communion et faire les lectures à la messe. Elle vient me féliciter pour le travail fait et explique qu’elle est engagée aux côtés de Edinho, le candidat d’opposition.
Elle vient alerter sur le fait que l’autre liste fait des « crimes électoraux », en particulier des ligatures de trompe et donne le nom des deux candidates impliquées, montre les ordonnances.
Sebastiana, responsable de la liturgie de l’Eglise de Dores, belle-sœur d’Elisa et Maria-José, viendra me demander d’interdire à des personnes engagées dans les élections d’être lecteurs à la messe. Je me suis absolument opposé à cette demande.
Quelques jours après, alors que Lani a de nouveau été vue ivre dans la rue, et parce qu’elle fait ce travail pour la liste d’Edinho de pister les « crimes électoraux », des gens sortiront de l’Eglise au moment où elle fait la lecture. La chose étant suffisamment publique, le dimanche suivant, l’évangile s’y prêtant, j’ai mis en valeur le choix du Christ de venir pour les malades et les pécheurs. J’ai évoqué les jugements portés dans la communauté de Dores et me suis réjouis que tous puissent faire des lectures, que des gens malades de l’alcool ou en difficultés le puissent aussi, signe que nous étions l’Eglise du Christ. J’ai ajouté « que je n’avais jamais vu quelqu’un faire la lecture et devenir pire pour cela. Le seul risque qu’il court, en faisant la lecture, c’est que cela l’amène à se laisser toucher par la Parole et à se convertir. »
Sebastiana qui demandait à ce qu’on trie les lecteurs est celle qui va le plus scandaliser par son comportement dans les élections.
Autres rencontres de candidats en cette fin de mois de juillet et début du mois d’août
Du fait de l’initiative prise, quelques candidats ont pris contact pour réfléchir sur leur campagne, demander conseil, comme Zé Faria. Candidat de droite de la communauté Saint Sébastien du Cêrro, il fait un travail remarquable pour promouvoir une culture biologique du café sans tous les agro-toxiques qui détruisent la nature et ceux qui les manipulent (dépression, atteintes neurologiques, dermatologiques). Il promeut la « cueillette sélective » du café, qui consiste à ne cueillir que les grains réellement mûrs pour produire un café de qualité. Cela oblige, pour chaque pied de café, à passer 4 fois cueillir presque grain à grain qui sont mûrs.
J’ai invité Luiz, ministre de la Parole à Dores, « modérateur de la campagne » d’Edinho à échanger sur le travail du C.P.P. puis je l’ai questionné plus directement :
– « Je ne sais pas si ce sont des rumeurs sans fondement, mais les gens parlent beaucoup de toi et de ta manière d’avoir vécu la campagne électorale 2004. Ils ne sont pas élogieux. Je ne compte pas chercher à savoir ce qui est vrai ou non, mais je voulais t’appeler à être « ministre de la Parole » au sein de ta liste, et te situer de manière juste. »
– « Padre, je ne sais pas qui t’a informé, ni ce qui t’a été dit, mais tout est vrai ! J’ai vraiment eu plein d’agissements erronés. Mais j’ai réfléchi. J’ai entendu le travail du C.P.P., j’ai lu la brochure des évêques, j’ai beaucoup aimé, et je reviens différent. Je m’engage à aider notre coalition à aller dans ce sens. Mon rôle de modérateur est, entre autres, de commencer toute réunion par un temps de prière entre personnes d’Eglises différentes.[7] »
Sans donner son nom, j’ai cité les paroles de Luiz en homélies dans toutes les communautés pour inviter à ne pas enfermer l’autre dans tout ce qui avait été si difficile il y a 4 ans et éviter que la campagne reparte sur les anciennes blessures.
Un autre ministre de la Parole, que j’ai aussi largement cité, est venu dire :
– « Padre, j’avais accepté de recevoir de l’argent d’un candidat de la liste d’Edinho pour payer mon permis de conduire. N’ayant pas la somme, je conduis sans permis. Mais, après avoir participé au C.P.P. et lu la brochure des évêques, j’ai été redonner l’argent. »
Mercredi 30 juillet, rencontre chez Carloman
Mercredi 30 juillet, j’avais rendez-vous avec Carloman pour faire le point sur la demande de matériel, de bus pour transporter les gens des communautés rurales à Dores, pour la fête de Dores. La rencontre s’est faite à son domicile, en raison de nos relations amicales, amicales ne signifiant absolument pas que je m’étais situé « de son côté ».
Il me fait part de sa joie du travail que nous faisons pour un autre climat électoral. Je lui fais alors part de ma préoccupation parce que ce travail va être en échec du fait du comportement de candidats de la majorité sortante. Je lui parle de mes visites dans les communautés où j’ai rencontré des personnes ayant été opérées de ligatures de trompe. Je l’alerte sur le fait que c’est en contradiction avec les engagements pris ensemble, que cela va déclencher une guerre avec l’autre liste. Je lui demande s’il ne pourrait pas intervenir et demander à ceux qui ont triché de se retirer de la course. Il est au courant que l’autre liste a déposé une plainte au tribunal et qu’elle a produit des preuves, des enregistrements d’entretiens avec plusieurs femmes réalisés par Lani.
Il a eu un moment d’énervement et m’a lancé d’un ton sec : « Dans l’Eglise, aussi, il y a des gens qui font des fautes ». J’ai d’abord dit que je n’avais pas parlé en jugeant ou en condamnant, mais comme ami, pensant qu’il était la personne qui pourrait faire réfléchir Claudia et demander à ce que cette candidate se retire, en lui disant de se représenter dans 4 ans en revenant différente. Cela ôterait à l’autre liste la possibilité d’utiliser cette fragilité de la liste de Claúdia et cela éviterait que le climat électoral ne se détériore. J’ai aussi témoigné de la décision prise dans une communauté de suspendre un ministre de la Parole ayant fait des malversations graves lors de travaux dans une Eglise.
Sans s’en rendre compte, Carloman explique comment, lors d’une hospitalisation, il a été contacté par un médecin qui lui a proposé de travailler pour lui. Il explique que c’est lui qui a communiqué ce tuyau à la liste de Claúdia… « Après, ce qu’ils en ont fait, je ne suis pas responsable. »
L’une des deux candidates mises en cause était la petite fille de l’actuel Vice-Préfet de Carloman, fille d’une ministre de l’eucharistie.
Le hasard a voulu que notre entretien rapidement redevenu cordial ait été interrompu par l’entrée du Vice-Préfet. Manifestement, il y a ensuite eu une réunion entre les responsables de la Liste de Claúdia pour voir comment me faire taire, et comment faire face au dépôt de plainte par l’autre liste.
La candidate responsable des ligatures de trompe est passée à la maison paroissiale en mon absence pour enquêter auprès de la femme de ménage, savoir qui passait à la maison paroissiale, ce que je disais, en faveur de qui j’étais.
Vendredi 1er août : Premières pressions reçues de la liste de Claudia
L’ouverture officielle de la campagne a eu lieu ce 1er août.
Ce vendredi matin 1er août, Maria-José, coordinatrice de la Communauté de Dores, demande à me voir. C’est une femme de foi profonde, dont l’époux est très impliqué dans la campagne. Elle a plus de distance avec la politique mais elle m’explique qu’elle a été « envoyée » par la liste de Claudia, celle qui se présente pour succéder à Carloman, pour m’alerter par rapport à Lani qui dit des choses fausses. Elle me prévient que la candidate ne se retirera pas, qu’elle a sa conscience pour elle, et que la liste de Claudia est très remontée contre moi. Elle me demande d’arrêter de parler de ligatures de trompes et autres corruptions.
Samedi 2 août : Nouvelle intervention forte pour me demander de ne pas me mêler de politique
Nous avons la réunion du Conseil Pastoral pour les Affaires Economiques. A la sortie, 3 membres j’estime et qui m’estiment demandent à me voir, 3 personnes de foi profonde :
– Elisa, sœur de Maria-José, Coordinatrice de l’ensemble de la paroisse. La famille est une des familles riches de la ville. Ils sont négociants en café, la richesse du coin, très engagés en politique du côté de Claudia. Elisa exprimera à plusieurs reprises sa peur de ce qui se passe dans les élections, des réactions de son mari, de ses frères, de plusieurs de ses beaux-frères et belles sœurs, sa honte devant leurs agissements. Elle n’est pas d’accord avec les pratiques de sa famille, mais ne voit pas comment on peut intervenir. Elle est témoin au jour le jour de la violence des propos de sa famille me concernant ou concernant la liste d’Edinho. Elle est convaincue par la démarche que nous avons lancée mais confesse régulièrement sa peur, tout en confirmant que ça valait le coup.
– Ana-Rosa : c’est la comptable de la paroisse. Elle est embauchée par la mairie. Elle soutient Claudia.
– José-Paulo : c’est l’intendant de la paroisse, celui qui suit tous les travaux. Il est responsable des services techniques et de la voirie de la ville. De très nombreux membres de sa famille sont embauchés par la mairie. J’ai été alerté sur le fait que, chaque fois qu’il y a des travaux faits par l’Eglise, c’est toujours à quelqu’un de sa famille qu’il fait appel. C’est un homme profondément bon.
Ils viennent me mettre en garde très fortement pour ne pas me laisser influencer par l’autre liste. Comme j’explique une nouvelle fois que je n’avais eu besoin de personne pour m’informer, que j’avais tout vu par moi-même, ils me demandent de ne pas intervenir, de ne plus rencontrer personne parce que les gens parlent. Ils m’alertent sur le fait que j’allais « diviser la paroisse, ne plus être en mesure d’annoncer l’Evangile, que des gens parlent de ne plus donner au denier de l’Eglise, etc.
J’avais été vu en train de parler avec Lani dans la rue d’autant plus facilement que je ne me cachais pas. Je lui demandais le nom d’une personne malade qu’elle souhaitait que j’aille visiter.
Je les ai remerciés et appelés à ne jamais hésiter à revenir m’alerter, mais qu’il me faudrait ensuite décider en conscience de mon attitude.
Quand Ana-Rosa et Elisa sont parties, José-Paulo est resté en arrière et m’a fait asseoir de nouveau : « Sois prudent, tu ne connais pas le coin, ta vie peut être en danger. N’oublie pas qu’un prêtre précédent a été poignardé ».[8]
S’il m’était difficile d’apprécier la réalité du risque physique encouru, je ne me suis jamais senti menacé et je n’ai jamais ressenti de sentiment d’insécurité depuis que je suis au Brésil, si ce n’est chaque fois que je suis dans les grandes villes avec une valise et bien identifiable comme étranger. J’avais repéré, notamment dans le chemin avec Baba, de la scierie, que, si j’arrivais à ce que l’autre se sente aimé, si je prenais les initiatives pour cela, s’il sentait que l’interpellation se basait sur l’Evangile, il était possible de questionner.
Ce qui m’était plus dur, c’est de percevoir que ceux qui étaient privilégiés, et ce n’est pas une critique, ceux qui sont du même milieu dont je suis originaire et dont j’ai tant reçu, qui possèdent la formation, l’argent, le pouvoir, qui étaient engagés en Eglise, étaient justement ceux qui piétinaient les lois, achetaient les votes, défendaient leurs intérêts.
L’autre liste, tout au long de la campagne n’a pas pu faire les mêmes « crimes électoraux », non pas d’abord par vertu, mais faute d’argent, comme le reconnaissait humblement l’un d’entre eux. Le contre témoignage donné par ceux qui auraient justement dû donner un témoignage d’Evangile me touchait plus profondément.
Ce qui m’était aussi difficile, c’était de ne plus savoir où étaient situés mes plus proches collaborateurs, ces personnes que j’aimais : leurs conseils étaient-ils des conseils pour me protéger ou pour m’intimider et défendre leurs intérêt ? Etaient-ils encore engagés avec moi dans ce chemin pour des « élections totalement différentes » ? Qu’est-ce qui restait vrai quand tous, comme un seul homme, disaient vouloir vivre des élections totalement différentes, sans corruption, quand, dans le même temps, dans les deux coalitions, il se passait tout autre chose ? Etait-ce un rideau de fumée extérieure pour mieux pouvoir tricher et apparaître vertueux ?
Ma crainte n’était pas d’abord pour ma vie, même si je ne pouvais pas éliminer cette hypothèse qui me semblait peu probable. Je craignais qu’à tout moment, je sois mis hors d’état d’exercer mon ministère, soit par la calomnie, soit en coupant le denier de l’Eglise.
Je craignais surtout de ne pas arriver à me laisser conduire par l’Esprit Saint, d’agir à partir de mes convictions et pas en me laissant guider par le Christ. Comment savoir si je devais effectivement me taire, ne plus sortir à la rencontre des gens, des politiques en particulier ? Ces visites de Maria-José, puis des trois autres, étaient-elles des visites de « personnes envoyées par Dieu » et à accueillir comme telles pour se laisser guider par elles, pour reprendre les critères réfléchis avec toutes les communautés au mois de septembre sur « comment agir avec l’Esprit de Dieu » à la lumière de la rencontre entre Pierre et Corneille (Ac 10 et 11) ? Devais-je plutôt continuer à parler, questionner, obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes (Ac 4,19-20 ; 5,18-20.29)
Samedi 2 août : refus de la démission de Néné, ministre de la Parole, engagé dans la coalition de Claúdia
Au début de l’après midi, Néné, ministre de la Parole mais aussi très engagé dans la liste de Claúdia, est venu me voir pour demander à être relevé du ministère pendant toute la période électorale. Il était au courant de la polémique me concernant. Sa fille, sans aucune formation pour cela, sans être passée par les concours administratifs normaux, est secrétaire municipale à la culture.
Je lui ai dit que ce n’était pas dans la tempête qu’il nous fallait quitter le navire et que c’était justement maintenant qu’il fallait être ministre de la parole, qu’il avait aussi à témoigner de l’Evangile au sein de sa coalition. Je l’appelais à s’appuyer sur l’Esprit Saint et à travailler à le recevoir en prenant le temps de prier, de lire la Parole. Nous avons évoqué l’Evangile du mercenaire et du Bon Pasteur et il est reparti en acceptant de continuer sa charge.
Samedi 2 août : visite de Marcio demandant l’autorisation de faire un hommage pour le « jour des prêtres »
En fin d’après midi, Marcio, chef de la principale entreprise qui construit l’usine hydroélectrique de Dores, totalement étranger à la ville, originaire de Uberlandia a 1000 km de Dores, à l’ouest du Minas Gerais, venait me demander l’autorisation de lire un « hommage pour la fête des prêtres ». Le mois d’août est mois des vocations au Brésil et chaque dimanche est fête d’une des vocations. Le premier est fête des prêtres. Les autres années, personne n’avait rien fait.
Il a commencé en disant qu’il savait que je n’aimais pas les multiples hommages faits aux prêtres (envahissants au Brésil), mais qu’il aurait souhaité prendre la parole et préférait me demander l’autorisation avant. Il n’était au courant de rien de toute la polémique, qui, à ce moment-là, agitait seulement la tête de la liste de Claudia et quelques responsables de la paroisse.
Le dimanche, dans la communauté de base rurale où je célébrais, la responsable a pris la parole à la fin de la messe, ce qui n’avait pas été fait les deux années précédentes, et a fait une déclaration très forte et très proche du texte de Marcio avant de m’offrir une chemise. Après la messe, elle me dira en aparté qu’elle découvrait combien l’implication d’un prêtre dans la vie des gens et dans le climat des élections, est une source d’espérance pour elle, et qu’elle avait souffert de la main mise par quelques familles, sur la vie de Dores. Elle est directrice du collège de Mundo Novo, l’un des deux gros villages de la municipalité de Dores.
Voilà le texte de Marcio :
« Un exemple de vrai prêtre
Homme sans peur, fort et aimant, capable avec un immense amour, de conduire son troupeau d’une poigne ferme et, d’atteindre ses objectifs sans fuir d’un millimètre de sa formation chrétienne et de ses principes sacerdotaux.
Homme capable de réunir des politiques et de parler d’éthique, de réunir des évangéliques et de parler sur la Vierge très sainte, de regarder les employeurs et de parler sur les droits des travailleurs.
Homme capable de réunir dans la célébration d’une messe catholique, des témoins de Jéhovah, des presbytériens, des baptistes, adventistes et divers types d’évangéliques.[9]
Homme capable de se faire comprendre même avec les difficultés pour parler notre langue.
Homme qui utilise le silence avec beaucoup de sagesse, comme point très fort de réflexion.
Pour que nous ayons bien présent à notre esprit le pouvoir de réflexion que le silence provoque, il suffit de se souvenir quand Marie-Magdeleine surprise en adultère a été amenée à Jésus pour défier les enseignements du Maître[10]. Parce que, s’il la condamnait, il agirait contre sa prédication, et, s’il l’absolvait, il serait de connivence avec un péché qui, à cette époque, était passible de la peine de mort, et de la mort par lapidation Jésus, avec son inégalable sagesse, est resté silencieux quelques minutes, traçant des traits sur le sable avec un petit morceau de bois. Ces minutes ont peut-être été les plus longues que les pharisiens n’avaient encore vécues de leur vie. Et, quand Jésus a dit : « Que celui qui n’a jamais péché lui jette la première pierre ! », c’est comme s’il avait jeté un seau d’eau froide sur eux tous. Parce que, avec ce moment de silence, Jésus les avait obligés à faire un examen de conscience de toute leur vie.
Cet homme, auquel je me réfère dans ce texte, le Peuple de Dores do Rio Preto a le privilège de l’avoir comme prêtre, et je suis particulièrement reconnaissant à Dieu de m’avoir concédé la grâce de le connaître. En effet, je viens de la communauté Sainte Isabelle du Portugal du diocèse de Uberlândia dans l’était du Minas Gerais, et je suis né et ai grandi dans la religion catholique, et je n’ai jamais vu un prêtre avec un tel dévouement, une telle persévérance, une telle humilité et un tel courage pour affronter et guider au milieu de tous les problèmes d’une paroisse, qu’ils soient spirituels, moraux, financiers ou politiques.
Au Père Bruno, un simple hommage pour ce « Jour des Prêtres », 6 août. »
Marcio Gabriel Marques
Je me reconnais mal dans ce texte (et dans l’intervention de Cimar), ou plutôt, il font l’impasse sur tout ce qui est fragilité et peur en moi, et, surtout, sur la difficulté à vraiment aimer l’autre, en particulier Zachée quand il se montre injuste, difficulté à croire qu’il peut se convertir et que le seul chemin est une parole dite avec amour. Ce texte ne dit pas assez que tout ce que j’ai pu faire est don reçu et reçu avec les autres chrétiens avec qui je chemine, mais j’ai reçu ce texte comme quelque chose de l’ordre de ce dont parle Paul à Corinthe, quand il a du comparaître et qu’il témoigne avoir reçu un message du Seigneur :
« Sois sans crainte, continue de parler, ne te tais pas. Je suis en effet avec toi et personne ne mettra la main sur toi pour te maltraiter car, dans cette ville, un peuple nombreux m’est destiné. » (Actes 18,9-10)
Dimanche 3 août : Récollection des ministres de la Parole et de l’Eucharistie et « d’entrée en campagne électorale »
Cette nuit-là, j’ai été réveillé en pensant à quelle initiative prendre pour être réentendu par les partisans de Claúdia, pour aider les gens à traverser cette tempête et les suivantes, d’autant que placé au cœur de cette première polémique, je risquais de ne plus à même d’aider la communauté à rester unie et signe d’unité.
Le dimanche matin, c’était la récollection des ministres de la Parole et de l’Eucharistie. La récollection a commencé par la messe paroissiale de 8h. 80 ministres étaient présents.
A 9h30, j’ai introduit la récollection en disant que c’était notre récollection annuelle normale, mais parce qu’elle correspondait à l’ouverture de la campagne électorale, que nous allions en faire une récollection d’entrée en campagne, cherchant dans les Actes des Apôtres que nous étudiions depuis février, des lumières pour être de vrais « Ministre de la Communion », de vrais « Ministres de la Parole » pendant ce temps particulier, et pas seulement dans les célébrations, derrière l’autel ou le pupitre, mais en famille, au travail, au sein de leurs coalitions politiques.
Nous avons formé 8 carrefours en attribuant à chaque carrefour l’un des 9 chapitres[11] déjà lus dans les communautés. Chaque carrefour a été chargé de chercher des « paroles de vie » et de trouver des lumières pour exercer le ministère de manière générale, et plus particulièrement en période d’élections.
J’ai aussi prévenu qu’il y avait de la tempête à Dores et que nous garderions un temps pour qu’ils soient mon « conseil » par rapport à des initiatives à prendre.
J’ai désigné un ministre pour la mise en commun avec les indications suivantes : vous aurez 4 minutes pour aider le groupe à méditer ; dans un premier temps, vous rappellerez ce dont parle le chapitre qui vous a été attribué et que tout le monde connaît, puisqu’il a été étudié dans les communautés ; ensuite, sans chercher à redire tout ce qui a été dit dans votre carrefour, mais nourri par ce partage, vous présenterez des « paroles de vie » et quelles lumières pour vivre ce temps d’élection.
A 9h45, je les ai laissés travailler et j’ai été faire une sieste pour récupérer de ma nuit très courte.
A 11h, nous avons démarré un temps d’adoration eucharistique et 8 ministres ont animé la méditation pendant 4 minutes chacun. J’avais choisi des gens divers : Maria-José, professeur à la retraite, mais aussi la maman d’Elielton[12], ministre de la Parole et n’ayant que 4 années d’école primaire, et qui m’avait émerveillé par son sens de la Parole de Dieu. Sur les 8, j’ai choisi une ministre de l’Eucharistie n’ayant jamais prêché, ayant repéré son sens inné de la Parole dans les rencontres de « l’école de théologie biblique », cette lecture priante et formative sur les Actes.
Le temps de « partage adoration » a été une vraie Pentecôte. Je regrette juste de ne pas avoir enregistré. Je me suis laissé enseigner. J’ai été heureux de ne pas avoir à « prêcher » à un moment où je n’avais pas la liberté intérieure pour le faire, de pouvoir me laisser porter par leur foi.
Nous avons encore fait l’expérience que le Christ se révèle aux tout-petits, et à tous à travers eux, que ce ne sont pas ceux qui ont le plus de formation qui entrent le mieux dans la Parole de Dieu.
J’ai cueilli les fruits de cette insistance reçue du Père Chevrier à mettre la Parole de Dieu dans la main des plus petits, d’une Eglise qui se nourrit largement de la Parole, priorité si chère à Benoît XVI et réfléchie au synode actuel, qui me paraît vraiment l’urgence du moment.
Quelques unes des lumières à partir de :
– Actes 1 : il nous faut témoigner jusqu’aux extrémités de la terre.
– Actes 2 : il nous faut prier et demander l’Esprit Saint ;
– Actes 3 : il nous faut oser parler « au nom de Jésus » et aider Dores à se mettre debout tant dans les élections que dans le travail sur la sobriété ;
– Actes 4 : nous ne devons pas avoir peur parce que nous sommes simples et sans instruction d’oser parler au nom de Jésus. Il nous faut aider les gens à résister à la tentation de se faire acheter et les encourager à préférer obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes. Il nous faut prier pour demander la force d’annoncer la Parole de Dieu avec une pleine assurance, de faire des prodiges.
– Actes 5 : nous ne devons pas être comme Annanie et Saphira qui mentent et font semblant de partager. Nous ne devons pas avoir peur de souffrir pour le Christ et trouver notre joie là. Il nous faut être comme Gamaliel dans nos coalitions, être capable de parler à contre courant pour appeler les gens à ne pas risquer de se retrouver en guerre contre Dieu.
– Actes 6 et 7 : nous devons avoir la même audace qu’Etienne et savoir aussi pardonner.
– Actes 8 : nous ne devons pas faire comme Simon le magicien qui veut acheter le pouvoir de donner l’Esprit Saint. Nous ne pouvons pas acheter ou vendre les votes. Il nous faut nous approcher de ceux qui sont engagés politiquement, faire route avec eux, comme Philippe avec le ministre éthiopien.
– Actes 9 : il nous faut entrer dans la lumière de Dieu, ne pas persécuter le Christ. Il nous faut croire que l’autre a pu changer et voir dans l’adversaire un frère, comme Ananie accueillent Saul qui venait pour les persécuter.
Suite à ce « partage adoration », je me suis adressé à mon « conseil ». J’ai rendu compte de la rumeur qui venait de naître comme quoi j’étais partisan d’Edinho, rappelant que, quelques mois avant, la rue disait que j’étais du côté de Carloman.
J’ai pris une « parabole » à partir d’un fait récent :
« Samedi soir, il y a une semaine, Monsieur Jean qui habite derrière l’Eglise de Dores, est sorti le soir pour aller pécher dans le Rio Preto, dans Dores. Les gens l’ont vu aller pêcher. Il n’est jamais revenu. Tout le monde sait qu’il est épileptique, qu’il lui est déjà arrivé de tomber dans la rivière et d’avoir été sauvé par des passants, mais, jusqu’à jeudi son corps n’a pas été retrouvé. Des gens m’ont affirmé avec conviction qu’ils l’avaient vu à Guaçui avec une compagne. D’autres disent qu’il y a eu un conflit en famille. Jeudi, son corps a été retrouvé au fond de la rivière. Pourtant les gens affirmaient avec certitude l’avoir vu. Est-ce que vous mesurez ce que la rumeur a fait vivre à la famille ? »
Et j’ai alerté très fort contre les rumeurs en temps d’élection avant de dire que la rumeur disant que j’étais du côté d’Edinho était aussi fondée que l’affirmation que Monsieur Jean était à Guaçui.
J’ai évoqué, sans donner trop de détail les pressions fortes dont j’étais l’objet dès le début de la campagne et évoqué l’idée qui m’était venue : décider de faire un temps d’adoration eucharistique en arrivant 15 minutes avant chaque célébration, chaque messe, dans toutes les communautés, jusqu’au jour des élections avec le déroulement suivant :
– signe de croix chanté (tradition très belle au Brésil et que j’aimerais voir traduite en France),
– prière de Saint François chantée à genoux tandis que le ministre de l’Eucharistie installe le Saint Sacrement sur l’autel,
– lecture par le ministre de la Parole de l’Evangile du jour,
– temps de silence entrecoupé par le partage de « paroles de vie » tirées de cet Evangile, mais sans commentaire pour qu’il n’y ait pas de risque que ce soit perçu comme un message au milieu d’un éventuel conflit survenu pendant la campagne,
– Notre Père dit en se donnant la main et en veillant à ce que les ministres connus pour être de coalition opposée soient à côté l’un de l’autre, et se donnent la main même et surtout si des évènements graves survenaient,
– de nouveau prière de Saint François chantée tandis que le ministre de l’Eucharistie enlève le Saint Sacrement de l’autel,
– puis messe ou célébration normale à la suite, et, comme nous en avons pris l’habitude, demi-heure de partage des Actes, pour ceux qui veulent, après la messe.
A noter que, ce jour là, j’ai eu la joie, ce même dimanche, de laisser le Padre Gildo, originaire de Mundo Novo[13], prêtre d’un diocèse de la périphérie de Rio de Janeiro, membre de l’Association Jesus Caritas, présider et prêcher. J’avais fait sa connaissance en janvier et m’étais senti si proche de lui. Là, il m’a confirmé dans le travail fait. Dans le cadre du Jubilé des 50 ans de sa fondation, le diocèse, nous avait demandé d’inviter tous les évêques, prêtres, religieux et religieuses originaires du diocèse qui le pouvaient à venir participer à une messe à Cachoeiro le samedi et à célébrer dans leurs communautés d’origine le dimanche. Ils ont fait de ce moment un temps fort d’entrée dans le mois d’août, mois des vocations.
Tout au long du mois d’août : Messes dans les communautés en présentant la réflexion du journal paroissial, dont la brochure des évêques et en faisant adoration avant les messes et célébrations
La proposition d’adoration a donc été accueillie avec enthousiasme à l’unanimité. Elle a effectivement été mise en œuvre.
Tout au long du mois d’août, alertant aussi contre les fausses rumeurs en redisant la « parabole à partir de la mort de Monsieur Jean » j’ai présenté le contenu du journal paroissial d’août sur les élections appelant à ne pas se laisser prendre par la corruption, à respecter le prochain, à croire qu’il peut changer (en évoquant les paroles de Luiz et de l’autre ministre de la parole qui avait rendu l’argent reçu), à s’aider mutuellement à vivre la fraternité et construire une vraie démocratie à la lumière de l’Evangile.
Je prends de plus en plus de temps à préparer ce journal paroissial qui est un moyen fantastique d’évangélisation. Outre l’éditorial, cet article sur les élections, le numéro du mois d’août présentait une synthèse de la recherche du mois précédent sur les Actes des Apôtres (Actes 8), des extraits du Document de la Conférence d’Aparecida (cette fois-ci, des paragraphes en relation avec l’importance de l’engagement des chrétiens dans la vie politique au service de tous, à commencer par les plus pauvres), les comptes de la paroisse présentés chaque mois (ce qui est un signe fort ici).
J’ai pris la décision d’augmenter mon temps de sommeil, de prière et d’étude d’Evangile pour tenir au milieu des tensions qui ne font que commencer et je viens de reprendre le vélo.
Jeudi 5 août : rencontre de Carloman
Pendant 9 jours, du lundi 4 au mercredi 13 août, j’ai eu la joie d’accueillir Gérard Seitz, prêtre du diocèse de Créteil, accompagnateur de l’équipe chargée de la Mission Universelle pour notre diocèse. Cela a été un temps de joie pour moi. La joie de ce partage a grandi avec l’arrivée d’une famille de l’équipe Notre Dame que j’ai accompagnée pendant mon séjour à Lyon, qui nous a rejoints le jeudi 7.
J’ai rendu visite à Carloman avec Gérard. C’était une manière de reprendre contact après la précédente rencontre qui avait mis le feu aux poudres. Il a été honoré de cette visite et j’ai pu redire le sens de la question posée quelques jours plus tôt, quin’était pas jugement mais appel.
Le climat avec l’ensemble de la coalition de Claúdia s’est détendu provisoirement.
Dimanche 8 août : meurtre et suicide sans lien avec la politique
Une femme est venue se confier longuement sur ses difficultés conjugales et combien elle avait peur de lui. Je lui ai proposé d’aller la visiter elle et son mari. Le soir, pensant que son épouse la trahissait, il l’a abattue de 4 coups de pistolet et s’est enfui, avant de mettre fin à ses jours en avalant le même produit pour désherber les haricots qu’avait pris Juliana.
Je cite ce fait qui rend bien compte que la plupart des familles ont des armes, et que les différends se règlent rapidement dans la violence.
Vendredi 15 août : rencontre avec des délégations des trois collèges de Dores
Avec Elisa et Rita, nous recevons 5 représentants de chacun des 3 collèges du territoire municipal pour présenter notre travail et leur demander ce qu’ils allaient faire avec les élèves.
Le partage a été riche. L’une des deux directrices a expliqué qu’ils avaient fait le choix de ne surtout pas aborder la question par peur de tout ce qui s’était passé 4 ans plus tôt. A la fin de la rencontre, les 3 écoles avaient décidé de lancer une réflexion avec tous les élèves en utilisant le matériel que nous leur avons présenté (journal paroissial mis en montage Power Point) en tirant les références à l’Eglise Catholique à la demande de l’un des professeurs et en n’indiquant plus la source.
Samedi 16 août : C.P.P. avec tous les politiques
Lors de la rencontre commune des responsables des deux coalitions, nous avions lancé une invitation adressée à tous les candidats et responsables politiques à participer à la première moitié de notre C.P.P. d’août. Nous avons aussi remis en main propre à tous les pasteurs des églises évangéliques de Dores une invitation à cette même rencontre. Aucun n’a pris la peine de répondre, ni de venir. 40 politiques des deux listes ont été présents. Nous avons présenté le contenu du journal d’août en montage Power Point. Ce sont Rita et Elisa qui ont lu le texte des diapositives. Pour la circonstance, nous avons fait le début de notre C.P.P. ouvert aux politiques dans une salle municipale.
Nous avons redit les trois axes de notre campagne de sensibilisation : refuser la corruption, respecter l’adversaire, débattre au niveau des besoins de Dores. Pour couper l’herbe sous le pied de la liste de Claúdia qui se plaignait que la liste d’Edinho ait déposé une plainte en justice pour les ligatures de trompes faites pour acheter des votes, j’ai rappelé que le respect de l’adversaire ne signifiait pas de renoncer à repérer les éventuels crimes électoraux de l’autre liste et à poursuivre celle-ci en justice si elle enfreignait la loi 9840, que c’était la richesse de la Démocratie que d’avoir ces contre pouvoirs.
Après la présentation de notre montage et des axes de notre action, nous avons laissé un temps de réactions. Tous les politiques ont dit leur joie du travail fait par l’Eglise et qui allait les aider dans leur campagne : ils seront plus libres par rapport à cette culture qui amène à confondre les élections avec un moment pour demander des avantages personnels.
J’ai dit notre désir d’inviter les politiques de toutes confessions à se joindre à nous le jour de notre fête paroissiale et à venir prier le Notre Père (ou rester en silence), en se donnant la main, puis à chanter la prière de Saint François, entre la « Procession des 7 douleurs de Marie » et la messe présidée par l’évêque. Un sondage pour savoir qui viendrait a montré qu’ils seraient très nombreux et des deux listes. Nous avons aussi invité les Pasteurs à se joindre… Aucun ne viendra.
La deuxième moitié du C.P.P. s’est faite à la paroisse et a permis une reprise de ce qui venait de se vivre. J’ai pu refaire une mise au point concernant les rumeurs me concernant, qui persistaient : « Je ne suis du côté d’aucune liste, mais de vous tous et de l’Evangile, des politiques aussi, pour leur permettre d’assurer leur service dans de bonnes conditions. »
Elisa a dit combien la peur l’habitait, mais combien elle était émerveillée par tout le chemin fait et par cette rencontre avec les politiques.
Tous ont confirmé ce que disaient aussi les politiques, à savoir que, jusqu’à présent, le climat à Dores n’avait rien à voir avec celui des élections précédentes et qu’il y aurait bien moins de corruption.
A la sortie, le responsable d’une des communautés les plus réticentes à l’abandon de tout don public et au passage au denier de l’Eglise dit :
– « Padre, nous avons vraiment fait beaucoup d’erreurs, quand nous avons construit l’église de notre communauté. Nous avons tout construit avec les dons des politiques. Si nous n’avions pas fait le chemin sur le denier de l’Eglise, comment aurions-nous pu réunir les politiques et avoir quelque chose à dire ? »
Samedi 23 août : rencontre de Baba et célébration des 90 ans de Cléia
En juillet, au retour d’un pèlerinage à cheval à Aparecida avec d’autres membres des familles qui administrent Guaçui et Dores, il vient refaire le point, à sa demande, toujours aussi bouleversé et il promet de lancer une rencontre de patrons de Dores pour réfléchir à la lumière de l’Evangile sur la justice sociale après la campagne électorale.
Il vient demander de bénir un chapeau de cow-boy qu’il vient d’acheter se sent en mesure de porter de nouveau. Il explique que, dix ans auparavant, il avait fait le vœu de ne plus porter de chapeau tant qu’il n’aurait pas remis de l’ordre dans sa vie.
Au mois d’août, j’ai célébré les 90 ans de sa mère, au milieu de 200 personnes, dont les principaux responsables de la liste de Claudia, y compris cette candidate dont j’avais suggéré le retrait.
Mardi 26 août : audience publique au tribunal à l’initiative de la Juge et de la Procureur dans le cadre de la journée Nationale pour des Elections Propres
La Procureur était venue en personne nous inviter et j’avais présenté en homélie cette initiative invitant chacun à s’y rendre présent. 15 personnes de Dores seulement ont répondu.
Le contenu des interventions de la juge, de la Procureur, de l’avocat, entrait en résonnance complète avec toute la réflexion faite dans la paroisse qui a été beaucoup valorisé tout au long de la soirée et par tous : personnes de la justice, responsables des deux coalitions, membres laïcs de la paroisse.
Fin août : don de bois pour réparer l’Eglise Saint Sébastien Oliveira Nunes par un des candidats au poste de Vice-Préfet
Une tempête a cassé le toit d’un bâtiment de la communauté Saint Sébastien Oliveira Nunes. La communauté n’a rien en caisse et le denier de cette communauté est le plus faible de la paroisse. Un fazendeiro que je ne connais pas a offert le bois pour refaire le toit. Comment dire non à cette communauté au nom de tout le travail que nous faisons sur le denier de l’Eglise et pour sortir d’une prise en charge des seules dépenses pour construire l’église de la communauté, laissant de côté les autres dépenses de la paroisse, du diocèse, la solidarité avec les pauvres. Par ailleurs, il n’y a plus de réserve dans le fond paroissial. J’accepte tout en questionnant sur cette générosité quand il y a un bâtiment de sa communauté à entretenir ou construire et cette absence de don le reste du temps. Avec le CPAE (Conseil économique) nous précisons que la communauté devra reverser 15 % de la valeur du don en matériel pour la solidarité avec le diocèse et 40 % pour le fond paroissial.
Quelques jours plus tard, j’apprends que le Fazendeiro en question n’est autre que le candidat au poste de Vice-Préfet, ce que personne n’avait dit… José-Paulo l’a immédiatement rencontré pour lui dire que nous n’acceptions plus son offre, que celle-ci pouvait provoquer l’annulation de son élection et qu’elle nous mettait en difficultés. « Si vous voulez faire un don, il sera bienvenu, mais dans le secret d’une enveloppe déposée à l’Eglise principale », pour éviter d’avoir un denier de l’Eglise qui passe d’un coup de 100 Reais à 1000 Reais, ce qui n’aurait trompé personne.
Le denier de l’Eglise de ce mois d’août n’a jamais été aussi haut. Si la tendance se confirme, il a augmenté de 80 % de 2006 à 2008. Les dépenses ayant aussi augmenté, la situation de la paroisse reste très précaire et je ne sais jamais si nous arriverons à boucler le budget du mois en cours. Mais au moins, le travail d’annonce de l’Evangile n’a pas encore eu de conséquences négatives sur cette dimension de la vie de la paroisse.
Dimanche 31 août : « Défilé automobile » de la liste de Claúdia qui part de chez Sebastiana
La coalition de Claúdia organise un « défilé en voiture », traversant toute la municipalité, la ville de Dores, les divers villages ou hameaux. Le lieu de rassemblement initial est sur la propriété de Sebastiana. Ils ont fait venir des gens des villes voisines. Des informations difficiles à vérifier disent que le comportement de Sebastiana, responsable de la liturgie au niveau de la paroisse, est en contradiction avec l’appel que nous avons lancé. Il se dit :
– qu’ils remettaient de l’argent aux participants pour payer leurs frais d’essence ;
– que l’alcool coulait à flots ;
– qu’elle a menacé des employés de leur entreprise pour qu’ils participent ;
– qu’elle a menacé des personnes de l’autre liste qui ont filmé l’un de leurs employés ayant eu un accident en état d’ébriété au cours de ce défilé automobile ;
– etc.
Ces informations sont difficilement vérifiables mais viennent de diverses sources dont Rita, source qui me paraît fiable. Elisa, belle-sœur de Sebastiana, confirme que Sebastiana est très agitée et devient source de scandales. Je lui demande d’essayer de s’approcher de Sebastiana pour la faire réfléchir.
Ayant pris une personne en stop, je lui demande comment elle perçoit le climat électoral. Elle dit qu’elle n’est pas engagée et il faut du temps pour qu’elle ose s’exprimer :
– « Ma sœur est menacée. Elle n’a pas accepté de mettre une banderole pour Claúdia sur sa maison et une personne d’Eglise l’a prévenue qu’elle doit chercher une autre maison. »
– « Qui a fait ça ? »
– « Sebastiana »
Cela ne permet pas de conclure totalement comme je m’en rendrai compte plus tard avec Alessandra.
Une des caractéristiques de la campagne électorale au Brésil est de provoquer chacun à faire connaître avec de grandes affiches, pouvant avoir plusieurs mètres, son choix politique sur les maisons, mais aussi sur sa voiture, sa moto, son vêtement. Certains le font par conviction libre. D’autres parce qu’ils sont menacés de perdre leur emploi ou leur logement s’ils ne mettaient pas un signe du candidat du patron ; d’autres encore se font payer pour cela.
Cela transforme la ville en un terrain où les rivalités s’affichent, niant le caractère secret du vote, valeur essentielle d’une démocratie, où l’on suit la progression des deux camps en bataille.
Lundi 1er septembre : publication d’un éditorial dans le journal « A Gazeta » qui met le feu aux poudres
Le journal « A Gazeta » publie un article totalement partisan en faveur de Carloman et Claúdia. C’est la liberté de la presse, mais cela le situe clairement comme journal d’opinion et non plus d’information.
L’éditorial du même numéro est une succession d’attaques virulentes contre « certains politiques », sans jamais dire lesquels mais en sachant qu’il s’agit des adversaires politiques du journal. Il attaque les politiques qui sont fonctionnaires publics et se présentent sans chance d’être élus et seulement pour avoir deux mois de dispense de travail en étant payés (il y a des candidats de la liste d’Edinho qui sont fonctionnaires publics), ceux qui font campagne avec une statue de saint dans la main (ce que faisait une des candidates de la ligne d’Edinho). L’éditorial termine en parlant de la fête du « Créole fou ».
Bien que l’éditorial soit dans un journal diffusé sur plusieurs villes voisines, que rien ne permette de dire qu’il parle de Dores, les partisans d’Edinho sont blessés et persuadés qu’il s’agit de propos racistes contre Edinho, et que Claudia est impliquée dans cette publication d’autant que le rédacteur en chef est de sa famille et que la permanence électorale de Claudia se fait dans une maison appartenant à celui-ci. Nelsia, femme du candidat vice-préfet de la liste d’Edinho, arrive en pleurs à la maison paroissiale avec le journal à la main : « Pourquoi ce racisme ? »
J’appelle Rita pour qu’elle m’aide à comprendre cet édito. Elle explique qu’il s’agit probablement effectivement d’une attaque contre des candidats de Dores, mais pas seulement, puisqu’elle croit reconnaître tel candidat de la ville voisine, et que l’expression « Festa do Crioulo doido » est une référence à une œuvre artistique, mais que les gens simples ne connaissent pas. Il n’est pas exclu que ce soit pour autant une manière de ridiculiser Edinho.
Selon la proposition faite lors de la rencontre des responsables des deux coalitions, nous décidons d’appeler Claúdia pour l’alerter sur l’impact de ce journal et voir comment elle est impliquée ou non, quelle démarche réfléchir pour éviter que le climat de la campagne ne dérape, si elle accepte de se désolidariser publiquement avec cet article.
Claúdia n’est pas joignable et c’est Ailson, directeur de sa campagne qui répond et vient nous rejoindre. Il découvre le journal. Il entend l’inquiétude et s’engage à écrire immédiatement un communiqué et un courrier à Edinho dans lequel ils dénoncent en fait le journal qui a cherché à les soutenir.
Nous soumettons à Ailson un projet de lettre que je signerai pour être lue dans toutes les églises de Dores et couper court à l’utilisation de ce journal en faisant référence à cette concertation avec les responsables des deux listes. Ailson a approuvé totalement le texte de ce projet de lettre.
J’ai ensuite rencontré le directeur de la campagne d’Edinho qui a accueilli très positivement le communiqué de l’autre coalition et apprécié notre initiative de faire lire dans toutes les communautés de base, au cours de la célébration, une lettre écrite avec Rita pour apporter des éclaircissements, appeler à ne pas utiliser ce journal et à continuer le travail pour une campagne « totalement différente ».
Samedi 6 septembre : rencontre tendue avec Sebastiana
Elisa a manifestement parlé à Sebastiana qui arrive très en colère : « Qu’avez-vous à me reprocher ? Et, sans me laisser le temps de répondre, elle énumère tous les bruits qui courent sur elle dans la rue, commençant par cette affirmation : « Les ligatures de trompes, c’était vrai – ce que la coalition avait toujours nié jusque là, reconnaissant qu’il y avait eu des personnes opérées, mais niant tout lien avec une campagne électorale – mais tout le reste, c’est faux. Le camion accidenté filmé par la liste adverse n’était pas dans le « défilé automobile ». L’employé était venu mais nous lui avions demandé de rentrer à Dores parce qu’il n’y avait pas besoin de lui. » Affirmation peu plausible quand on sait qu’ils avaient rameuté le plus de gens possible pour ce défilé. J’ai moi-même pris des gens en stop pour les ramener à Guaçui, ils avaient été appelés à venir participer. Je n’avais pas eu le temps de parler et n’avais rien contre la présence de ce camion au défilé de la liste.
Il était évident que nombre des bruits qui couraient sur elles étaient fondés. Si tous les autres politiques que j’avais invités à venir échanger étaient venus dans une grande ouverture (cf. Luiz), rien n’a été possible avec elle et elle est repartie très en colère.
A la sortie de la messe, Fabricio, pharmacien nouvellement arrivé dans la paroisse, marié depuis peu, ayant été plusieurs années en formation chez les jésuites, me félicite pour le travail fait mais dit : il y a encore beaucoup d’achats de votes. Eclair, de la liste de Claúdia, envoie des gens chercher des médicaments et les gens disent qu’il paiera ensuite. J’ai répondu « qu’il n’avait qu’à faire la demande par écrit et que je la porterais immédiatement à la justice. »
Lundi 8 septembre : homélie pour la nativité de Marie remise aux responsables des coalitions
De plus en plus mis en cause et sous pression par la liste de Claúdia et d’abord par des responsables de la paroisse, j’ai passé la journée à faire Etude d’Evangile pour préparer l’homélie de l’une des messes de la neuvaine de la fête paroissiale qui approche, fête de Notre Dame des Douleurs. Il est question de Marie qui « met Jésus au monde » et Michée parle du Messie qui paîtra son peuple, ne reculera pas, le conduira à la paix.
J’ai appelé à ce que nous cherchions la paix que reçoivent ceux qui se laisseront conduire par le Christ et se nourriront de sa Parole, à prier pour que nous laissions le Christ naître en nous, à Dores.
Ce que je fais rarement, j’ai rédigé totalement mon homélie comprenant une longue méditation de la Parole et, à la lumière de cette Parole, je redisais le sens de notre travail, à partir d’où je parlais et questionnais.
Dans cette homélie, j’ai redit combien je n’étais d’aucun côté et continuerai à « être de leur côté à tous », en servant le respect entre les personnes, le refus des crimes électoraux qui détruisent le vivre ensemble, continuant à les dénoncer comme je l’avais fait dès le début, rappelant que je voyais des erreurs des deux côtés, appelant chacun à entendre l’appel à des élections « propres » et appelant sans cesse les électeurs à voter contre ceux qui trichent ou ne respectent pas les autres, même si c’est quelqu’un de ma famille, un ami proche, quelqu’un de ma coalition.
Cette parole n’indique pas du tout une prise de parti entre les deux coalitions car un électeur va choisir de manière séparée le préfet et son vice-préfet, puis chacun des 9 conseillers, en pouvant voter pour des personnes des deux coalitions.
Mardi, j’ai essayé de joindre Claúdia et c’est Ailson, directeur de sa campagne, qui est passé à la paroisse. Je lui ai exprimé ma préoccupation devant tous les échos qui me venaient de leur liste, de Sebastiana en particulier et de la famille, m’accusant d’être « contre eux » et l’alertant : plus vous me taperez dessus, plus vous me mettrez en incapacité de servir la fraternité entre vous tous. Le partage a été très fraternel et je lui ai remis le texte de mon homélie en plusieurs exemplaires, lui demandant de le diffuser auprès des responsables de sa coalition, en particulier à Sebastiana et d’essayer d’intervenir auprès d’elle.
Comme à chaque fois que je suis intervenu, j’ai veillé à intervenir des deux côtés et j’ai aussi offert plusieurs exemplaires du texte de l’homélie à Edinho.
Mercredi 10 septembre : nouvelle intervention de Elisa et Ana-Rosa, réconciliation avec Sebastiana, homélie du Pe Gelson,
Elisa et Ana-Rosa viennent de manière solennelle me demander de ne plus parler des élections pendant cette neuvaine et se font l’écho de paroles très dures contre moi dans leurs familles, en particulier de Sebastiana. Je les remercie vivement de venir me voir et leur demande de continuer à venir. J’ai toujours la même question en moi : est-ce un signe de l’Esprit Saint pour me corriger, m’orienter ? Est-ce une pression liée à la peur des remous suscités par l’annonce de l’Evangile ?
Je leur partage l’homélie faite le 8 septembre (elles n’étaient pas là) et le chemin fait avec Ailson et la demande que je lui ai faite en direction de Sebastiana.
Quelques instants après, alors qu’Elise et Ana-Rosa sont encore là, Sebastiana arrive tout sourire apportant les paroles de vie tirées des Actes des Apôtres pour la procession de la Parole de Dieu. Elle a passé des heures à les préparer. Elle vient surtout se réconcilier, demander à « ce que je la crois » et réentendre que je n’étais pas d’un côté. C’est Ailson qui l’a envoyée. Elle dit sa crainte que l’autre liste ne passe, que ce soit la catastrophe pour Dores.
Je lui redis que, chaque fois que j’ai appelé quelqu’un pour parler, ce n’était pas pour juger, ni enquêter, que c’était une marque de confiance envers les gens que je croyais désireux de vivre l’Evangile avec nous, le signe d’une fraternité entre croyants, permettant de s’interpeller et laissant chacun faire son chemin, que je faisais confiance « a priori » à la parole de chacun.
Cela ne m’empêchait pas de savoir ce qu’elle m’avait elle-même dit lors de la première rencontre, que nombre des choses dites étaient « mensonges », comme le déni des ligatures… pour dire ensuite : « les ligatures, c’était vrai… »
Pour moi, c’était le moment de manifester une confiance, l’amour du Christ à Zachée, en espérant qu’un jour l’appel de l’Evangile qui allait si fortement à contre courant de ses intérêts immédiats, que ses 8 fils et neveux employés par la mairie sans avoir la formation pour ne perdent pas leur emploi. Nous nous sommes donnés un long « abraço da paz ».
J’ai su après que son mari ne voulait plus venir aux messes où le prêtre « faisait de la politique ». Il a accepté de venir ce jour-là, parce que, comme c’était la neuvaine, chaque soir, un prêtre différent venait présider et faire l’homélie.
Ce soir-là, Gelson, prêtre d’une paroisse voisine, a témoigné de comment ils faisaient un travail du même type dans sa paroisse et a eu exactement les mêmes paroles, au cours d’une homélie pas du tout « politique », au sens de « partisan » comme nous sommes si facilement caricaturés quand des questions dérangent, mais profondément enracinée dans l’Evangile.
Lundi 15 septembre : fête de la paroisse présidée par Dom Célio et prière avec les politiques
Au cours de la préparation, je suis entré dans les coutumes locales de processions, couronnements de la Vierge Marie, et j’ai partagé les richesses reçues en Action Catholique ou au Prado, travaillant à rendre présente la vie des hommes dans ce temps de piété populaire.
Nous avons commencé par une procession des sept douleurs de Marie dans les rues de Dores. A chaque « douleur », il y avait un groupe installé sur un camion pour être vu et qui témoignait sur une réalité : pastorale de la sobriété, pastorale de l’enfant, conférence Saint Vincent de Paul, Enfance Missionnaire (Mej au Brésil que le diocèse travaille à développer), etc.
La pluie très menaçante a empêché la messe sur la place de l’église et, malheureusement, beaucoup de gens sont restés dehors.
Nous avons commencé par une projection d’un montage Power Point qui commençait par accueillir toutes les communautés de base avec une photo de la communauté, puis nous avons fait mémoire de tous les efforts pastoraux de l’année pendant 15 minutes :
– travail sur les Actes des Apôtres ;
– travail missionnaire avec les enfants, les jeunes, les Cercles Bibliques, l’appel aux personnes adultes à recevoir baptême, communion, confirmation, mariage ;
– Campagne de Fraternité en faveur de la vie : avec de nouveau la Pastorale de l’enfant, de la sobriété, la Conférence Saint Vincent de Paul ;
– travail sur le Denier de l’Eglise pour ne plus dépendre de dons visibles et avec un partage fort entre les communautés, avec la Conférence Saint Vincent de Paul
– travail de présence au monde : chemin avec les ouvriers qui construisent l’usine hydroélectrique, invitation au Pasteur de l’Eglise baptiste à prêcher la messe d’ouverture de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens, lettre Zachée descends vite sur la justice sociale, travail pour des « élections totalement différentes » « construisant la démocratie » (et nous avons rappelé les diverses rencontres fortes) ;
Dans l’évaluation faite au cours du C.P.P. suivant et dans les échos spontanés : beaucoup diront combien cette relecture en images les a touchés, leur a permis de prendre conscience de ce que nous recevions ensemble, de comprendre le sens du chemin fait. C’était un moyen de vivre cet aspect essentiel de relecture en Eglise pour se laisser guider par l’Esprit Saint.[14]
Cela a aussi été l’occasion de témoigner au milieu de tous les prêtres du régional et de l’évêque de ce à quoi nous croyions et qui était vraiment devenu un bien de toute la paroisse faisant consensus, au-delà des tensions du moment dans la campagne, à un moment où le diocèse vit une préparation d’une assemblée diocésaine à la recherche des « trésors du diocèse lors de son jubilé de 50 ans », dans un climat difficile.
La démarche a été lancée de manière catastrophique. Dom Dominique You, français fidei donum au Brésil et évêque du « diocèse-frère » de Conceição da Araguay en Amazonie[15] a manifestement perçu les difficultés actuelles de notre diocèse dans cette démarche qui n’a vraiment pas été basée sur une approche « à partir de l’Evangile », mais à partir d’une enquête sociologique qui a coûté très cher, nous asservissant à une entreprise qui l’a payée, faisant exactement ce que nous reprochons aux politiques de faire, à savoir de se situer dans un rapport de demande d’avantage particulier injustifié et nous mettant hors de capacité de continuer à annoncer l’Evangile. Cette enquête est une collection de questions sans intérêt et générales : « les prêtres sont bons, passables, mauvais ? » ; « Les messes sont bonnes, passables, mauvaises ? » ; « L’Eglise évolue dans le bons sens ? » Pour ne rien gâcher, cette enquête est manifestement fausse d’un point de vue scientifique, faite à partir d’un échantillon non représentatif : elle trouve 50 % de la population du diocèse catholique quand toutes les enquêtes faites à un niveau national donnent 80 %.
Nous avons conclu sur deux diapositives reprenant des extraits du Document de la Conférence des Evêques d’Amérique Latine à Aparecida rejoignant bien ce que nous essayons de vivre à travers tous ces efforts pastoraux :
– « Avec la grâce de l’Esprit Saint, nous voulons nous entraider à être « disciples et missionnaires »[16] qui répondent à la vocation reçue et communiquent partout, par débordement de gratitude et de joie, le don de la rencontre avec Jésus-Christ. Nous n’avons d’autre trésor que celui-là. Nous n’avons d’autre bonheur, ni d’autre priorité que d’être instruments de l’Esprit de Dieu, en Église, pour que Jésus-Christ soit rencontré, suivi, aimé, adoré, annoncé et communiqué à tous, malgré toutes les difficultés et toutes les résistances. Voilà le meilleur service – son service – que l’Église doit offrir aux personnes et aux nations. » (DDA 14)
– « Dans la rencontre avec le Christ, nous voulons exprimer la joie d’être des disciples du Seigneur et d’avoir été envoyés, avec le trésor de l’Évangile. Être chrétien, n’est pas une charge mai un don : Dieu Père nous a bénis en Jésus-Christ son Fils, Sauveur du monde. » (DDA 28)
En photos, nous avons accueilli les participants à cette célébration et marqué l’accueil de Génivaldo, présent pour la première fois à Dores depuis sa nomination pour remplacer Juarez. Nous avons accueilli de manière toute spéciale Padre Emilio, natif de Dores, jésuite, missionnaire au Mozambique, arrivé la veille à Dores.
Ensuite, nous avons invités les politiques à s’avancer pour venir chanter la prière de Saint François et prier le Notre Père en se donnant la main. Comme nous l’avions suggéré lors de la rencontre du C.P.P. avec les politiques, ils se sont mélangés entre les deux listes. 16 étaient présents, d’autres ont dit être restés coincés dehors. Ce moment a profondément marqué tous les participants, politiques et reste de l’assemblée et calmé totalement les attaques que je pouvais recevoir.
Dom Célio, qui avait eu tout le projet de la célébration avant, a alors pris la parole pour confirmer fortement tout le travail pastoral fait dans la paroisse, en particulier par rapport aux élections. Il a valorisé l’engagement des politiques et les a appelés à être de véritables politiques au service du bien commun.
Il était convenu que les politiques pourraient s’en aller à ce moment-là s’ils ne souhaitaient pas participer à l’Eucharistie. Tous sont restés.
La procession de la Parole a été un autre temps marquant de la célébration qui a duré 10 minutes, ce qui n’est pas un problème ici. Pour évoquer le travail sur les Actes des Apôtres, chaque communauté s’était vue attribuer un chapitre des Actes et devait y choisir une « parole de vie ». Elles ont été projetées sur écran, associées à une photo. Par exemple, la phrase « Ils constataient l’assurance de Pierre et de Jean et, se rendant compte qu’il s’agissait d’hommes sans instruction et de gens quelconques, ils en étaient étonnés. Ils reconnaissaient en eux des compagnons de Jésus,” (Actes 4,13) était présentée sur fond d’une photo d’une communauté de base étudiant les Actes des Apôtres.
C’était une occasion de permettre à tous ceux qui lisaient les Actes de refaire mémoire de toutes ces paroles de vie. Cela a donné un temps de méditation très fort.
Ce fort investissement[17] pour aider les gens à lire la Parole de Dieu est certainement un élément important qui rend « recevable » le questionnement sur la vie concrète (élections, droits des travailleurs, etc.) Il empêche les gens de m’enfermer dans la caricature d’un prêtre agitateur politique (ce qui me va si mal) et permet aussi de percevoir que c’est la Parole de l’Evangile même qui nous amène à questionner toutes les réalités humaines et appelle à se laisser guider par le Christ, par son Esprit, sans jamais être sûr d’y arriver.
Lors de l’offertoire, Pe Emilio a offert le vêtement de son baptême, le jour même de la fête de Notre Dame des Douleurs, en 1950.
La fin de la messe est marquée par un « couronnement de Marie », piété populaire pratiquée surtout au mois de mai, et pendant la neuvaine de la fête de Notre Dame des Dores, qui consiste à une mise en scène priante, chantante, qui se termine par la pose d’une couronne sur la statue de Marie. Betford, professeur de mathématique et ministre de la Parole, chargée de ce dernier couronnement de la fête a provoqué l’enthousiasme. Elle a associé une vingtaine de personnes de diverses communautés, avec un texte très imprégné d’Evangile, et terminant par un défilé de jeunes représentant toutes les manières de prier Marie : Marie d’Aparecida, de Fátima, de Lourdes, etc.
Mardi 16 septembre : messe partage avec Padre Emilio et visite à Carloman
Carloman n’est pas venu à la messe. Il sort très peu de chez lui et a très peu pris part à la campagne. Le 1er octobre, ça fera un an que Juliana, sa fille, s’est suicidée. J’ai été le visiter avec Sœur Socorro pour lui dire que j’avais beaucoup pensé à lui pendant la messe, pensé à Juliana, regretté mais compris son absence. Nous avons eu un partage fraternel simple. Il remercie pour tout le travail que nous avons fait pour les élections et souligne que ça a été bien différent d’il y a 4 ans. Il est très touché par notre visite.
La présence inattendue du Padre Emilio nous a amenés à proposer une messe supplémentaire pour lui permettre de nous partager sa mission au Mozambique. L’église était bien remplie et il a témoigné des richesses et difficultés de ce pays où 50 % de la population est porteuse du SIDA.
Il a retracé son chemin vocationnel, son chemin spirituel aujourd’hui dans ce monde sans espérance à vue humaine et beaucoup parlé de la « compassion ». Nous nous connaissions par internet, car, apprenant qu’un prêtre originaire de Dores était en mission, je l’avais contacté pour lui dire qu’un autre, venu d’ailleurs, était dans sa paroisse d’origine.
Les trois jours passés ensemble ont été un moment de très forte confirmation sur le travail fait à Dores, en particulier par rapport aux élections.
A la fin de son homélie, évoquant le chapitre des Actes que nous allions étudier où Paul et Barnabé allaient porter une collecte à l’Eglise de Jérusalem[18], nous lui avons remis une « collecte forte » (en relation aux finances de la paroisse) pour nous associer à sa mission au Mozambique.
Samedi 20 septembre : visite à Carloman avec Alessandra, candidate d’opposition licenciée de la boulangerie où elle travaillait
Alexandra, candidate, a perdu son emploi dans une boulangerie et vient me demander de l’aide :
– Je vous demande de m’accompagner chez Carloman parce qu’il a demandé à ma patronne de me licencier parce que j’aurais offensé une de ses filles lors du défilé de la coalition de Edinho. Et c’est faux. Je ne l’ai pas rencontrée. »
J’ai appelé Carloman auparavant, lui expliquant la demande et comment cela entrait dans l’engagement que j’avais pris de favoriser les réconciliations. Il accueille immédiatement la demande. Alessandra explique sa situation.
Carloman répond qu’il a appris « par la rue » qu’il avait demandé le licenciement d’Alessandra, qu’il n’était pas au courant et qu’il reçoit totalement la parole d’Alessandra et s’est engagé à contacter la boulangère.
Nous sommes passés ensuite à la boulangerie :
– « Quelqu’un a téléphoné en racontant tout cela et je vous ai demandé d’arrêter votre service. Mais je vous crois. »
Entre temps, quelqu’un d’autre avait été embauché. Pendant plusieurs semaines, il s’est répété qu’Alessandra avait insulté la fille de Carloman et que celui-ci avait demandé son licenciement. Mais, tant pour Alessandra que pour Carloman, cela a permis de couper court à cette rumeur et qu’ils se donnent un abraço fraternel.
Samedi 20 septembre : C.P.P. qui évalue la fête paroissiale, la situation de Dores dans ce temps électoral et approuve l’éditorial du Journal d’octobre à lire dans toutes les communautés de base lors des célébrations des 27 et 28 septembre
La fête et la neuvaine sont plébiscitées et j’ai déjà fait écho plus haut des réactions des gens.
Tous ont dit leur joie de voir combien le climat à Dores était totalement différent de ce qui était arrivé 4 ans plus tôt et confirmaient tout le travail fait, y compris Ana-Rosa, Maria-José et Elisa, évoquant leurs craintes, mais confirmant toutes les initiatives prises.
A l’unanimité, le C.P.P. a appuyé la lecture d’une part du projet d’éditorial dans toutes les communautés de base, samedi 27 et dimanche 28 septembre. Il a été décidé de diffuser plus largement que d’habitude ce journal et d’inviter les responsables des deux coalitions pour provoquer une réflexion sur comment vivre le moment de la publication des résultats. L’éditorial était intitulé « Octobre, mois de la mission… et des élections », du fait que, après août (mois des vocations), septembre (mois de la Bible), octobre est « mois de la mission » au Brésil.
La première moitié était une méditation en parcourant les 11 chapitres des Actes des Apôtres déjà étudiés sur l’Eglise qui ne peut être autre que missionnaire.
Voilà le texte lu :
Continuer à être missionnaire dans la vie politique et construire le Règne de Dieu
Il y a un lieu où nous nous sommes engagés à vivre la mission de manière particulière cette année, c’est dans la vie politique. Dans ce domaine, vivre la mission a été de travailler à contribuer à vivre des élections totalement différentes de ce qui a eu lieu il y a 4 ans.
Au moment où j’écris (20 septembre), nous pouvons déjà rendre grâce à Dieu de ce qui a déjà été vécu : les réflexions et prières dans les communautés, la prière avec les politiques le jour de la fête de notre paroisse, les rencontres avec les politiques, les concertations tout au long de la campagne, les actions de la Procureur et de la Juge[19], d’autres associations[20]. Nous pouvons seulement regretter l’absence de réponse à nos invitation de nos frères d’autres Eglises, mais nous avons foi que le temps viendra pour vivre plus la fraternité entre nous.
Ce qui marque cet engagement, c’est qu’il n’a pas été engagement des seuls personnes qui viennent à la messe, mais qu’il a été engagement de tous les politiques et habitants de Dores qui ont accepté de s’y associer, quelle que soient leur appartenance religieuse ou politique.
Le Règne de Dieu n’est pas encore arrivé totalement… Il y a encore eu des erreurs dans les deux coalitions, et chez les électeurs, mais rien à voir avec ce qui s’était produit il y a 4 ans. Le dialogue avec les responsables des deux coalitions pendant tout ce temps a été très bon.
Attention ! Le travail ne fait que commencer : nous devons vivre un jour d’élection LIMPIDE, dans le respect de tous, sans crime électoral, sans pressions, sans menaces, dans le calme.
Ceux qui ont été soumis à des pressions pour voter pour tel ou tel candidat doivent savoir que le vote est secret et voter contre ceux qui ont essayé de les acheter, de faire pression sur eux.
Nous vous rappelons les critères de vote que nous proposent les évêques : C’est le moment de voter pour ceux qui n’ont pas essayé d’acheter les votes, qui n’ont pas fait pression, qui ont respecté les autres, qui vous paraissent décidés à servir le bien commun et qui ont la capacité pour cela, la formation nécessaire.
Construire la démocratie, la fraternité, il nous faut le vivre avec beaucoup de force au moment du résultat et dans le travail à suivre. Chaque coalition doit se préparer pour les deux éventualités :
En cas de victoire : être digne et respecter l’autre coalition ; se rappeler que, maintenant, elle est responsable au service de TOUS et pas seulement de ceux qui ont voté pour elle, engagement à servir le bien commun, à accueillir les suggestions des autres, à ne pas mettre la Préfectures (Mairie) au service de ses partisans.[21]
En cas de défaite : être digne aussi ! Accepter le résultat[22], continuer à s’intéresser au travail de la Municipalité, être une « opposition constructive » qui accueille les projets de l’équipe municipale, les questionne pour les améliorer, exerce une vigilance sur le travail de l’équipe mais de manière juste, dénonçant quand il y des infractions réelles, mais ne prêtant pas à l’autre des intentions ou des actions qu’il n’a pas.
Maintenant, tous ensemble, il nous faut affronter les défis de notre municipalité : Dans l’éducation (des enfants et des adultes), la santé (en particulier tout ce qui touche à la maladie alcoolique et aux drogues), dans le domaine des transports, de l’agriculture, dans la vie économique, l’action sociale et la défense des droits des travailleurs (emplois déclarés, sécurité au travail, etc.), écologie, culture, tourisme, etc.
Le 5 octobre, et dans les 4 années qui viennent, c’est Dores qui doit gagner, avec la force de l’Esprit Saint et l’engagement de tous : des électeurs, des politiques, de ceux qui ont la foi et de ceux qui ne l’ont pas. Ensemble, continuons à nous unir pour construire à Dores la démocratie, la fraternité et la paix. Que nous ayons voté pour la coalition qui a eu le plus de votes ou pour l’autre coalition, nous sommes tous frères, citoyens, appelés ensemble à améliorer la vie à Dores. L’équipe municipale a une responsabilité particulière pour cela, avec nos impôts à tous, mais elle ne pourra rien faire sans l’engagement concret de nous tous. Au-delà de l’amélioration de la vie sociale, économique, à Dores, nous avons à construire ensemble la fraternité et à collaborer à la venue du Règne de Dieu.
Padre Bruno (le 20 septembre 2008)
Samedi 20 septembre : 6 mariages de personnes qui cohabitaient depuis des années et ne pouvaient payer la célébration faute d’argent
J’ai déjà évoqué ces 6 couples, dont 2 où le mari boit et est ivre quasiment tous les dimanches. L’un d’entre eux n’a jamais pu être en état de nous parler quand je suis passé pour faire la préparation et j’ai du repasser en semaine. Quand je demande à sa femme si vraiment elle veut se marier : mais je l’aime et l’alcool ne le rend pas violent ! Les deux autres couples sont encore plus pauvres et maris et femmes boivent. Lors de la rencontre de préparation, au mois d’août, Beliguinho a remercié les voisins d’être intervenus au moment où il allait tuer sa femme et ses 4 enfants. Il a « arrêté de boire depuis » (il boit moins). Le jour du mariage, il est défiguré par les coups de son voisin et beau-frère, qui, totalement ivre, l’a battu presqu’à mort une semaine auparavant. Il n’arrive à remarcher que depuis 3 jours mais a les bras encore tout enflés et qu’il ne peut utiliser. Pendant la célébration faite au cours de la messe de la communauté, ils se donnent la paix, première parole réadressée entre eux depuis l’incident. Dans la préparation au mariage, ils ont « décidé » de s’aider à essayer de sortir de ce mal avant qu’un d’entre eux ne meurt. Le frère de Beliguinho, 16 ans, est mort de cirrhose il y a un mois.
Les deux autres couples sont des personnes qui vont très bien, ont des moyens, ne s’étaient pas mariés comme cela se fait beaucoup aujourd’hui.
La communauté s’est beaucoup investie dans la préparation du mariage, tant matériellement (allant jusqu’à payer le mariage civil alors qu’on peut demander une dispense de mariage civil quand les gens ne peuvent pas payer), que de l’accompagnement humain et spirituel. Plusieurs couples de la communauté ont participé au temps de préparation qui a consisté en un « jeu de rôle » où je leurs disais : « Voilà, je rencontre des gens qui vivent ensemble depuis des mois, je ne connais pas Jésus, j’aimerais me marier, quels conseils auriez-vous à me donner, qui est Jésus, comment pourrait-il m’aider, pourquoi me marier à l’Eglise, comment traverser les difficultés ? » Tous ont pris la parole et j’ai été étonné de « l’assurance avec laquelle ils parlaient alors qu’ils étaient sans instruction ». J’ai vraiment reconnu des « compagnons de Jésus » au-delà de cette maladie qui les détruit si fort.
Un magasin de Guaçui avait consenti des prix pour louer des tenues de mariées et pour les demoiselles d’honneur. Le tout a été payé par la communauté.
Après le rite du mariage, j’ai institué « ministre de l’Eucharistie » une des mariées.
A la fin de la messe, le Responsable de la communauté a remis une Bible à chacun, puis tous ont partagé le gâteau offert par la communauté, mais non plus par des candidats politiques.
La moitié de la communauté est pour Edinho, l’autre pour Claúdia, Catia et Nelsia avaient été les chevilles ouvrières de la préparation. Le climat était totalement différent d’il y a quatre ans, fait d’une grande fraternité.
Nous avons remis à chacune des 6 personnes atteintes par l’alcool un calendrier pour qu’ils puissent entourer chaque jour où ils arriveront à ne rien boire et se partager leurs calendriers à chaque rencontre hebdomadaire du Cercle Biblique, occasion de s’encourager mutuellement et de prier la « Prière de la Sobriété ». Reste qu’ils boivent depuis la petite enfance.
En regardant tout ce qui a bougé en eux à travers la proposition de la première communion pour ceux qui ne l’avaient pas encore reçue, du sacrement de réconciliation, du mariage, j’ai touché du doigt de manière presque physique la force des sacrements qui nous ouvrent à la dignité de fils de Dieu. Ils vont recevoir la confirmation dans 2 mois, même au cœur de situations encore loin d’être résolues.
Jeudi 25 septembre : messe diffusée à la radio à Guaçui
Je préside la messe de la neuvaine de la fête de Saint Michel, patron de la paroisse de Guaçui. Chaque messe est retransmise en direct sur toute la ville et jusqu’aux villes voisines, dont Dores. C’est un lieu de Parole prodigieux, mais qui nous appelle à être au niveau de la mission reçue.
C’est l’Evangile ou Hérode s’interroge sur qui est Jésus et « cherche à le voir ». Je fais une étude d’évangile sur les moments où Hérode, père et fils, ont cherché à voir Jésus, à écouter Jean-Baptiste, appréciant leur parole, leur demandant des prodiges, et finissant par les éliminer.
J’ai aussi mis en lien avec cet appel à accueillir Jésus sans l’éliminer quand sa parole questionne notre vie, nos pratiques, notre manière de vivre les élections.
Vendredi 26 septembre : rencontre des responsables des deux coalitions pour réfléchir au moment de l’élection
Appuyé par le C.P.P., nous avons pris l’initiative d’inviter les responsables des deux coalitions pour réfléchir à comment vivre bien le jour des élections et la suite. Quatre ans plus tôt, ces périodes avaient été très tendues.
Rien n’est sorti de très concret, mais nous avons présenté le numéro d’octobre qui allait être lu dans toutes les communautés de base et suggéré qu’une réflexion ait lieu dans les communautés.
Dimanche 28 septembre : appelé pour un homme qui s’apprêtait à tuer 3 personnes et à se suicider.
Autre écho de cette violence qui affleure sans cesse : un homme de 45 ans, désespéré et en conflit avec son ex compagne, confie à la responsable de la communauté de Mundo Novo, en lui demandant de ne rien dire à personne, qu’il a tout préparé pour abattre sa compagne et deux autres personnes et qu’il a le produit désherbant pour se tuer ensuite… Bien que tenue par le secret, elle appelle et le partage aboutit à ce que cette homme remette l’arme et le poison, accepte d’être accompagné en consultation le lendemain.
Dernière semaine avant le vote et lancer d’eau sur une manifestation de la liste d’Edinho
Le climat reste correct, mais plus tendu. Les bruits se multiplient sans être toujours vérifiables. Rita certifie que Sebastiana a retiré 30 000,00 R$ (salaire minimum = 400 R$) en coupures de 50,00 R$. C’est la belle fille de Sebastiana qui travaille à la banque qui lui a affirmé et il y aurait eu une bonne dispute en famille quand Sebastiana a su que sa belle-fille avait alerté la coalition d’Edinho.
Deux femmes qui ne sont pas pratiquantes viennent très révoltées à la maison paroissiale, commencent par louer le travail que nous faisons et disent que le mari de Maria-José accompagné par le père de Claúdia, vient de donner 50,00 R$ à une personne pauvre dans la rue. « La juge n’accepte pas les photos comme preuve, puisque tout peut être montage. Il faut que ça soit un film et nous n’avons pas les moyens. »
Je réponds que je sais qu’il y a des « crimes électoraux » des deux côtés, que j’ai fait tout ce que je pouvais pour les limiter et appeler les gens à ne pas voter pour ceux qui trichent, que je m’en tiens maintenant au silence et à ce qui a été proclamé dans toutes les communautés de base et publié dans le journal paroissial.
Mercredi 1er octobre, la liste de Claúdia tient un meeting sur la place devant l’église. Cela me permet de suivre sans être vu. Un sénateur est venu en hélicoptère pour faire campagne dans une municipalité de 6 800 habitants où tant de personnes sont dans une réelle pauvreté… Il a logé chez Baba qui le présente au public. Carloman est présent et commence par évoquer Juliana, morte un an auparavant, jour pour jour, puis son travail qui a permis à la mairie de sortir des dettes, de payer les fonctionnaires, que les gens soient soignés dans les hôpitaux voisins. Pour le reste, 2 heures sans contenu, sans présentation de programme.
Jeudi 2, Edinho a choisi la formule du « bain de foule »[23]. Je n’ai pas pu écouter car cela ne se passait pas devant l’église.
Vendredi 3, Rita me signale que, quand Edinho est passé au pied de la maison d’Elisa, de Maria-José, de l’eau a été jetée depuis la terrasse. Elle ne peut croire que ce soit Maria-José, ni sa mère, ni sa sœur, qui ont été vues à la terrasse mais ne sont pas descendues.
Dans la rue, des gens affirment que c’est Maria-José et sa mère (83 ans). Moi, je ne comprends pas et reste abasourdi par les bruits répétés qui courent sur Sebastiana et sur le mari de Maria-José et qui correspondent sans doute à la réalité.
Les gens s’épient. Luiz, ministre de la parole est chargé de suivre Sebastiana pour essayer de la surprendre en flagrant délit. Elle se déplace la nuit et il suit.
Samedi 4, suite à l’appel lancé par Maria José lors de la messe de dimanche 28, 60 personnes des deux coalitions se retrouvent pour une heure d’adoration. Maria-José et Luiz animent ensemble. Pour tous ces moments d’adoration, j’avais insisté pour que ce soit les ministres qui animent totalement et que je sois simple participant, les provocant à s’impliquer totalement dans cette démarche.
Ces temps d’adoration avant chaque messe, et, ce soir, à la veille des élections m’auront porté depuis plus de deux mois.
A la fin de l’heure, Maria-José se lève, les yeux en larme, serre Samuel, 11 ans, fils d’Elisa dans les bras, et dit : « Avec Samuel, nous voulons demander pardon. Toute la rue parle de ce qui a été une blague d’enfant. Quand j’ai réalisé ce qu’il faisait, il était trop tard. » Elle dira ensuite que cette demande de pardon n’était pas prévue, mais que ça lui était venue dans la prière.
Les gens ont pleuré, ri, se sont embrassés.
J’ai été heureux de savoir d’où venait cette eau, mais la très grande sensibilité des brésiliens et leur sens de l’honneur rend difficile la reconnaissance de l’erreur.
La famille a laissé la rue imaginer des tas de choses pendant 2 jours et a refusé qu’un éclaircissement soit aussi donné aux messes du dimanche. Le geste de Samuel a sans doute été révélateur du climat entretenu non par Maria-José et Elisa, mais par leurs maris respectifs et frères et belles-sœurs.
Dimanche 5 octobre 2008 : jour des élections et de la victoire de la liste de Claúdia
Je célèbre la messe de 8h devant une assemblée très clairsemée et ne fait pratiquement aucune allusion aux élections, sinon pour espérer que nous n’éliminerons par la « pierre devenue pierre angulaire » dans notre manière de vivre cette journée et appelant les gens à relire le journal paroissial.
Juste avant la messe, Elisa et Maria-José se sont précipitées sur moi pour m’attirer dans un coin tranquille et me demander de ne surtout pas évoquer le geste de Samuel pour apporter un éclaircissement, que, si je le faisais, le mari d’Elisa a promis de « réagir fortement ». Il est impossible de reconnaître une erreur. Résultat, tant du fait que Maria-José ne soit pas descendue immédiatement dans la rue pour demander pardon et expliquer ce qui était arrivé, que du fait de ne pas profiter des deux messes du dimanche pour refaire cette clarification : la rue continue à affirmer que Maria-José, responsable de l’Eglise de Dores, a jeté de l’eau sur la coalition adverse.
Ce jour d’élection, je suis resté enfermé dans la maison paroissiale, commençant ce travail de relecture. J’avais besoin de relire toute cette période faite d’un mélange de tensions, parfois fortes et de paix, avec toujours la même question : comment être sûr de me laisser guider par l’Esprit Saint ?
C’était justement notre recherche du mois, de communauté en communauté, à partir d’Actes 10 et 11 publiée dans le journal paroissial. Je reproduis en pièce jointe séparée la traduction de cette synthèse Je sais que nombre de personnes de Dores qui ont des difficultés à lire ne le pourront pas. Ils se rattraperont avec les 4 pages de photos évoquant les divers aspects de la fête, dont le moment de prière avec tous les politiques.
Les bureaux de vote ont fermé à 17h00. A 17h30, les résultats de l’ensemble des bureaux répartis sur tout le territoire de la commune étaient publiés, le vote étant électronique.
Claúdia a gagné avec 56,76 % des voix. Celle qui a organisé les ligatures de trompes a aussi été élue. La liste de Claúdia obtient 5 sièges et la liste d’Edinho 4. C’est Rita qui était chargée de me prévenir par téléphone. Ninho, qui avait commencé par être « empêché » de se présenter à cause de la condamnation pour injures graves, puis par être autorisé à se présenter, a été dans les mieux élus, avant que la juge dise que, en fait, il n’était pas éligible… Allez comprendre. Comment allait-il réagir ?
A 19h, dans le bruit des cris de la foule et des pétards, je célèbre la messe dans une église bien vide, mais avec des personnes des deux listes. Nous démarrons par le temps désormais habituel d’adoration à 18h45.
Je démarre en disant ma joie que le climat ait été si différend des précédentes élections et ma tristesse qu’il y ait encore eu trop d’irrégularités. Je préviens que j’ai déjà adressé la même lettre aux deux têtes de listes qui reproduit de larges extraits de l’éditorial et les assure de ma prière.
La rue est restée calme toute la journée et la fête du soir est bon enfant. En traversant la ville pour aller à Guaçui, j’aperçois Ninho et m’approche de lui. Il explique qu’il est heureux d’avoir reçu tant de voix, qu’il accepte la décision, qu’il avait vécu des élections complètement différentes. Deux fois, pendant la campagne, il était venu demander conseil devant des choses qui le scandalisaient et avait remercié d’avoir été aidé à reprendre son calme. Là, il est bras dessus, bras dessous avec un ardent partisan de Claudia et ils fêtent la fin des élections.
Une semaine après, il est dur de ne pas sentir toutes les tensions qui restent, combien le Royaume est vraiment dans le même temps déjà là et pas encore là, combien il est donc à annoncer et à faire advenir, cherchant à collaborer avec ce que fait l’Esprit Saint.
Bruno Cadart, lundi 13 octobre 2008
[1] Cf. Un article du mois de septembre sur une avocate des personnes des Favelas
[2] Une des nombreuses Eglises évangéliques.
[3] Une précision : lors du vote, chacun vote d’abord pour le duo Préfet/Vice-Préfet, puis choisit un a un les conseillers. Il peut voter pour des conseillers de la liste opposée à la liste du Préfet qu’il a choisi. Le scrutin est totalement électronique.
[4] Chaque paroisse est constituée de « Communautés de base » dans lesquelles les gens se réunissent pour se former, prier, célébrer, s’entraider. A Dores, il y a 16 communautés de base : une pour la ville de Dores, une pour un nouveau quartier de Dores, et une pour chacun des deux villages plus importants. Les autres sont dispersées parfois dans les hameaux. Chaque communauté de base est elle-même constituée de « Cercles bibliques », ensemble de familles habitant à proximité les unes des autres, et se retrouvant une fois par semaine pour prier et méditer l’évangile du dimanche suivant avec l’aide d’un livret réalisé par le diocèse et qui propose aussi d’autres réflexions. La rencontre d’un Cercle Biblique dure une heure, un soir, en semaine.
[5] Thème de la conférence d’Aparecida repris comme thème d’année sur notre paroisse
[6] Comme pour la plupart de ces démarches, je me fais accompagner par Elisa et Rita Lopes
[7] Difficilement imaginable en France…
[8] Il s’agit d’un prêtre complètement déséquilibré et impliqué dans divers scandales sexuels, financiers et autres qui a passé 9 ans dans la paroisse et a été agressé par un malade mental. Par contre, un prêtre français, Gabriel Maire, a été assassiné à Vitoria, capitale de notre Etat, le 23 décembre 1989, 4 ans après la fin de la dictature, en réaction contre son engagement contre la corruption. La justice avait conclu à un crime crapuleux alors qu’il est sûr qu’il s’agit d’un crime organisé contre son engagement. Presque 20 ans après, le procès vient d’être cassé et les faits vont être rejugés.
[9] Messe célébrée sur le chantier de l’usine, en fait non pas à mon initiative, mais à l’initiative de Marcio. J’avais compris qu’il avait demandé une bénédiction du chantier et il s’est en faite agis d’une messe. Le chantier a été arrêté et les 200 ouvriers ont participé, alors même qu’ils étaient vraiment libres de venir ou non.
[10] Là, il ressortait assez fidèlement une homélie que j’avais faite.
[11] Un carrefour avait à étudier les chapitres 6 et 7 ensembles.
[12] Lui-même responsable de communauté et ministre de la Parole dont j’ai partagé le témoignage sur l’alcool dans un courrier précédent e
[13] Un des deux villages importants de notre municipalité de Dores avec Pedra Menina.
[14] Cf. Etude d’Evangile sur Pierre et Corneille
[15] Le Brésil a lancé un mouvement de solidarité entre les diocèses plus riches et ceux de l’Amazonie. Dans ce cadre, Dom Dominique est venu visiter le diocèse de Cachoeiro pendant une semaine. Dans le programme, ils ont veillé à ménager une soirée à Guaçui pour qu’il puisse me rencontrer. Le partage a été un vrai cadeau pour moi.
[16] Thème de la Conférence repris comme thème d’année pour notre paroisse.
[17] En 17 lieux différents, ce sont 220 personnes dans cette paroisse de 6 800 habitants qui lisent chaque mois un chapitre des Actes des Apôtres.
[18] Ac 11,27-30.
[19] En écrivant cela, j’ai le souci d’accueillir l’œuvre de l’Esprit Saint hors de l’Eglise et de donner du poids à ces personnes très critiquées par la liste de Claúdia.
[20] Une association a aussi organisé des rencontres de sensibilisation pour permettre des élections propres.
[21] Appelé auprès d’une personne en situation de délire par Catia, cette ministre de l’Eucharistie qui s’était réconciliée, quand j’ai demandé à ce que la personne aille en urgence en consultation au poste de santé dans le cadre du service publique, Catia a expliqué qu’elle ne serait jamais prise car elle n’était pas du côté de Carloman et m’a demandé de la faire passer par les consultations privées et de payer les 100 R$ de la consultation (1/4 de salaire mensuel de base pour une consultation).
[22] Il y a 4 ans, le résultat avait donné lieu à une succession de procès sans fin et paralysé l’action de la Préfecture.
[23] Traduction de l’expression brésilienne : « corpo a corpo », littéralement « corps à corps ».