Vœux et invitation à fêter mes 25 ans d’ordination
« Dans la Joie de l’Evangile » Noël 2014
Chapelle du Prado à Lyon
« Il vous est né aujourd’hui, dans la ville de David, un Sauveur qui est le Christ Seigneur ; et voici le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. » (Luc 2,11-12)
Il y a 2 000 ans, dans un pays occupé et marqué par la dureté de la vie,
une annonce grandiose résonne,
avec un signe imperceptible pour les habitants de Bethléem :
un nouveau-né fragile, rassemblant à tous les nouveaux-nés,
totalement dépendant de gens « ordinaires », Marie, Joseph,
dans une mangeoire, au milieu du fumier, hors de la ville, au milieu des plus pauvres,
mais accessible aux mages venus de loin et prêts à se dépouiller, à s’incliner,
prêts à repartir par un autre chemin, transformés par cette rencontre.
Dieu venu partager la condition humaine.
Le Fils venu révéler l’amour du Père,
donner son Esprit d’amour, sans tout transformer par enchantement.
Signe fragile, mais qui ne perd pas de force, plus de 2 000 ans plus tard.
Signe fragile, et qui attend notre réponse et notre engagement.
Dans son Exhortation Apostolique « La joie de l’Evangile » (EG), le Pape François nous invite à accueillir Jésus, dans notre compagnonnage avec les hommes et appelle l’Eglise à être une Eglise pauvre pour les pauvres, une Eglise en sortie, qui va aux périphéries, aux croisées des chemins pour inviter les exclus, une Eglise qui offre la miséricorde, lave les pieds, raccourcit les distances, touche la chair souffrante du Christ, a l’odeur des brebis, accompagne patiemment, est attentive aux fruits sans perdre la paix à cause de l’ivraie, va jusqu’au martyre, est joyeuse et célèbre (EG 24). J’aime à lire et relire ce paragraphe et toute cette exhortation.
Les fêtes de fin d’année sont une occasion d’échanger des nouvelles, de renforcer les liens entre nous, même si nous nous retrouvons à des milliers de kilomètres les uns des autres.
C’est le sens du partage qui suit. La communion avec vous tous, croyant et non croyants, ou croyants autrement, qui avez marqué mon chemin, est quelque chose d’important pour moi et vous êtes sans cesse dans ma prière, notamment pendant les longues heures de vélo (3 300 km sur les pistes de la paroisse en 2014), de marche à pied, d’attente.
Vous trouverez ci-après quelques évènements de l’année écoulée au milieu desquels il m’a été donné de chercher ce Dieu caché qui se révèle de manière privilégiée au milieu des plus pauvres.
Situation politique à Madagascar
Fin décembre, début janvier, il y a eu l’élection d’un président de la république, puis, après des semaines de bagarres des politiques, le choix d’un premier ministre. On aurait voulu espérer que la situation allait s’améliorer… ce n’est pas le cas. Les prix s’envolent (+ 20% pour le taxi-brousse en septembre), les délestages de fourniture d’électricité se multiplient, l’insécurité explose. Il y a bien des réparations de tronçons de routes, comme sur la N7 (Antananarivo – Fianarantsoa) ou sur la N5 (Tamatave Fénérive), mais la qualité de la réfection est telle que les trous apparaissent déjà. Liée à l’absence d’évacuation correcte des ordures, la peste est en recrudescence (plus de 10 morts par mois ces 4 derniers mois).
Etat de la Nationale 7 entre Fianarantsoa et Ambohimahasoa
Seule route liant la capitale à tout le sud de Madagascar
Dada :
Dada, est venu frapper à notre porte le soir de Noël. 13 ans environs, épileptique, il avait quitté sa famille depuis l’âge de 7 ans et vivait dans la rue. Il a adopté la maison des prêtres et nous a adoptés aussi. Dès que nous étions là, il venait habiter avec nous. Il a participé aux « JMJ » de notre paroisse lors du week-end des Rameaux et a reçu le baptême au cours de la veillée pascale.
Un jour où il passait dans le hameau de Marie Ndrasana, jeune sessionniste en recherche de vie de laïque consacrée, elle l’a accueilli chez elle avant qu’il ne reparte 4 jours plus tard. Dada n’avait pas été élevé et faisait tous ses besoins au milieu de la pièce. Marie l’a lavé, a lavé ses habits, lavé la natte qu’il avait souillée, partagé le maigre repas. Quand elle a raconté cela au Centre de Promotion Rurale d’Ikalalao, elle a dit : « Je crois que c’est ça le Prado ».
Edmond, professeur au collège d’Isaka, a accueilli Dada sur sa propre natte pour dormir à côté de lui. Il s’est lui aussi enthousiasmé pour les Ecrits Spirituels du Père Chevrier.
Nous cherchions comment aider Dada à avoir un toit, à être accompagné, à pouvoir avoir un traitement pour son épilepsie. Dada s’est noyé dans le fleuve Matsiatra le 12 août, sans doute du fait d’une crise d’épilepsie.
Dada n’est plus de ce monde, mais il a aidé des chrétiens d’Isaka à entrer dans le mystère de Noël et de Pâques sans faire l’économie du mystère de la Croix. Il nous a donné de faire l’expérience de la joie qu’il y a à construire une communauté en mettant le petit au centre, de sortir des préjugés sur les malades mentaux, en particulier les épileptiques (sur vous trouverez les courriers de Noël et de Pâques et ses photos sur dans lesquels je parlais de lui).
Dada avec Mathilde, coopérante, le jour de Noël 2013
Janvier : Animation de la retraite des prêtres du diocèse de Mananjary
Le matin, nous faisions Etude d’Evangile sur « faire avec l’Esprit de Dieu », l’après-midi, nous parcourions l’Exhortation Apostolique « La joie de l’Evangile » (EG). Moment fort de fraternité sacerdotale, stimulés par les paroles du Pape François. Ils m’ont demandé d’animer de nouveau leur retraite de janvier 2015 ce qui m’a « obligé », et j’ai besoin de ce type « d’obligations », à prendre pour moi-même ce temps si important d’Etude d’Evangile. Cette année, nous chercherons comment « faire avec l’Esprit de Dieu » à l’école de Paul.
Retraite des prêtres du diocèse de Mananjary
Accompagnement de jeunes en recherche de vocation.
En venant à Madagascar, j’étais décidé à ne pas apporter d’argent, à ne pas risquer d’être en porte-à-faux par rapport aux autres prêtres malgaches, ayant des possibilités qu’ils n’ont pas. Je vois bien que le don d’argent ne permet pas forcément de se relever. Souvent, il a même l’effet inverse et est source de jalousies.
Je subventionne par contre l’achat de bible et Nouveaux Testaments. Comme le dit le Pape François, toute la vie de Jésus contemplée dans l’Evangile parle à notre vie et répond aux nécessités les plus profondes des personnes, est trésor de vie et d’amour qui ne peut tromper (EG 265), aide des gens à prendre conscience de leur dignité, de celle des autres, à se lever, à aller contre les forces de haine et de mort.
Il y a 2 ans, j’avais repéré Florentine, sessionniste au Centre de Promotion Rurale d’Ikalalao, qui avait un rayonnement discret impressionnant. Elle avait fondé une « Fiangonana Fototra » (chrétiens, catholiques et protestants, qui se réunissent le jeudi soir dans leur hameau pour prier autour de l’Evangile), lancé une équipe de FET (Mouvement Eucharistique des Jeunes) dans son hameau. Tous les jours, elle faisait son « cahier de paroles de vie », ce qui consiste à lire un passage d’Evangile et à copier un verset qui nous touche plus, à noter éventuellement une « lumière ». Un jour, elle entre dans le réfectoire à Isaka et dit : « J’aurais voulu être sœur, mais ma mère m’a dit que j’étais trop pauvre, parce que je n’ai pas pu étudier. » Il a fallu l’aider financièrement, à étudier la broderie, à aller à Fénérive, etc. Dans une lettre aux autres sessionnistes, alors qu’elle était au service de lépreux avec les Sœurs du Prado au nord de Madagascar, elle écrivait :
« Je suis très heureuse au milieu des Sœurs du Prado à vivre avec les pauvres et prendre soin des gens atteints par la lèpre. Elles se stimulent mutuellement avec les pauvres et dans le don d’elles-mêmes, agissant comme le font des parents dans leur manière de soigner ces personnes. De voir ces malades de la peau, de vivre avec eux, de voir les sœurs vivre vraiment proches d’eux, comme eux, sans habit religieux spécial pour ne pas être séparées d’eux, travaillant la rizière avec eux, fait grandir l’appel de Dieu dans mon cœur. Et j’aime les moments de prière et de partage d’Evangile avec elles. »
Florentine, au centre, entourée de 4 jeunes
de Befeta ayant fait un stage à Fénérive chez les Sœurs du Prado
D’autres jeunes aux parcours du même type se sont présentés. 12 d’entre eux viennent de reprendre les études, en 6ème, 5ème ou 3ème et même seconde ; d’autres frappent à la porte. Ils ont tous en commun d’avoir fondé des « Fiangonana Fototra », des équipes FET, de faire un « cahier de paroles de vie ». La plupart ont perdu soit leur père, soit leur mère, soit les deux.
Pour 5 filles, j’ai loué une petite pièce à Isaka. Elles ont entre 15 et 23 ans. Elles prient ensemble, se soutiennent dans les études, sont actives dans la paroisse et vivent déjà quelque chose d’une vie religieuse. Elles accueillent aussi le frère de l’une d’entre elles dans une pièce qui fait 3,5 m x 3,5 m. Elles n’ont pas grand chose, mais elles ont une joie « que nul ne leur ravira » (Jn 16,22), du moins je l’espère.
Nombre de congrégations, et ce n’est pas sans raison très valables, n’accueillent plus de jeunes n’ayant pas le Bac. Mais cela veut aussi dire que les plus pauvres n’ont plus leur place et, sans l’avoir cherché, il m’est donné de vivre un aspect fondamental de la grâce du Père Chevrier : la formation d’apôtres pauvres pour les pauvres.
Juliette et Prisca dans la pièce de 3,5 x 3,5 m qu’elles partagent à 6
Le dernier arrivé s’appelle Albert. Je l’avais rencontré il y a deux ans lors d’une tournée. Il venait de rater le BEPC comme tous les élèves de sa classe, car les conditions d’apprentissage en brousse sont difficiles. Il est né de l’union de sa maman avec un premier compagnon, dont il dit que c’était un « dahalo » (brigands, voleurs de bœufs et autres méfaits), et, de fait, son père est mort au cours d’une tentative de vol. Il se retrouve sans parents et a été élevé en partie par ses grands parents maternels. Le grand-père était « Mpiadidy », « inspecteur », catéchiste principal qui supervise plusieurs communautés. Albert m’avait demandé une aide financière mais j’avais refusé, ne pouvant pas aider tout le monde et n’ayant pas commencé de parrainages à ce moment-là.
Le 21 octobre 2014, je suis repassé dans son village. Albert, 21 ans maintenant, venait de réussir le BEPC en candidat libre, ce qui est un exploit et prouve la force intérieure de ce jeune. Après plusieurs mois dans le village de son père, il venait de revenir chez la grand-mère car les autres jeunes n’arrêtaient pas de faire pression sur lui pour qu’il rejoigne les « dahalo ». Il ne demandait plus rien et c’est moi qui lui ai demandé s’il pensait toujours à être prêtre : « Oui, mais je ne peux pas, je n’ai pas d’argent. » « Et pourquoi veux-tu être prêtre ? » « Quand je vois ce que deviennent les autres jeunes de mon village, je veux être prêtre pour sauver des jeunes comme eux. » C’est la première fois que j’entendais un jeune témoigner de sa vocation avec une expression de ce type, aussi clairement apostolique et enracinée dans un amour pour son peuple, pour les plus pauvres. Albert redémarre en 2nde à Ambohimahasoa.
Comme il venait d’acheter tout le nécessaire pour étudier (l’inscription à l’école, le matériel scolaire, l’achat de sandales et de vêtements corrects pour ne pas avoir honte au milieu des autres, la nourriture), et que je faisais les comptes avec lui, j’ai été pris de doute : ému par ce bouleversement complet de sa vie en quelques heures, il semblait incapable de compter et j’ai commencé à faire marche arrière, à lui dire que je renonçais à l’inscrire au lycée parce qu’il allait se retrouver en échec. Sœur Marie-Louise, Augustine de Notre Dame de Paris, est intervenue : « J’ai vu ses bulletins, fais-lui confiance ! ». Père Rolland Arthur, curé d’Ambohimahasoa, a été dans le même sens et a proposé de l’héberger gratuitement dans les locaux de la paroisse, en communauté avec deux autres jeunes. Il va l’accompagner dans le groupe de jeunes en recherche de vocation.
Au début, je n’avais pas sollicité d’argent, mais des dons sont arrivés et c’est l’occasion de remercier les donateurs. Je fais confiance à la « Providence » et même en appelle à elle car, comme vous le verrez dans le bilan financier, il ne reste plus rien dans la caisse… pour pouvoir continuer à aider ces jeunes à se former et à aider d’autres ensuite… Pour les jeunes pour lesquels il faut prendre en charge toutes les dépenses, il faut compter 200 à 300 € pour une année. Pour ceux dont on ne prend en charge que les frais de scolarité (inscription à l’école et matériel scolaire), il faut compter 40 € pour l’année. Sur mon site internet, vous trouverez le bilan des aides reçues et ce à quoi elles ont servi. Merci d’avance à ceux et celles d’entre vous qui pourront répondre à cet appel.
Albert le jour de son inscription au lycée
Centre de Promotion Rurale d’Ikalalao
Une semaine par mois, le centre accueille une cinquantaine de jeunes, garçons et filles ayant entre 13 et 20 ans qui n’ont pas pu continuer à étudier, faute d’argent. Ils apprennent la couture, la menuiserie, les techniques d’agricultures, à lire et à écrire pour ceux qui ne savent pas. Chaque jour, nous célébrons ensemble et ils font des théâtres d’Evangile. L’an dernier, nous avons lu et « joué » tous les Actes des Apôtres. C’est de là que sortent la plupart des jeunes dont je parle ci-dessus. C’est un privilège pour moi de passer 5 jours avec eux chaque mois, avec Sr Honorine et Sr Jeannette (Augustines de Notre Dame de Paris) et avec Mr Christian, formateur en menuiserie.
Meldine, 13 ans, est arrivée au centre l’an dernier. Elle ne savait reconnaître aucune lettre et était timide au point d’être incapable de dire son nom devant les autres. Aujourd’hui, malgré bien des efforts, elle ne sait toujours pas lire, mais elle rit, participe aux « théâtres d’Evangile » et ose parler devant les autres. Sœur Jeannette continue à essayer de l’aider à apprendre à lire.
Wilson initiant les jeunes au basket
Lors de l’évaluation d’une session, les jeunes ont demandé à ce qu’il y ait un terrain de basket. Ils ont construit les panneaux. Le terrain est devenu le lieu de rencontre des jeunes et adultes d’Ikalalao. A la session d’octobre, les filles se sont lancées aussi : la plupart n’avaient jamais joué avec un ballon. Cela a donné de belles parties de fous rires à défaut de ressembler complètement à du basket !
J’ai été heureux de vivre ce moment avec Wilson et que les jeunes, les gens de la paroisse en général, puissent percevoir le lien fraternel qui nous unit, même si nous sommes souvent séparés, chacun à un bout de la paroisse.
Alcool
L’équipe de prêtres « zéro alcool » ne se réunit plus. Par contre, l’un d’entre eux, témoigne dans son district, demande l’aide des gens et a fait donner une formation aux catéchistes. Un autre prêtre, qui n’était pas membre de l’équipe, a pris la parole lors de la retraite des prêtres pour rendre grâce pour 8 ans d’abstinence. Il diffuse aussi le livre « Mba hisy mpaminany hijoro ka hiteny momba ny aretin’ny alikaloa » (Pour que des prophètes se lèvent et parlent par rapport à la maladie de l’alcool) dans sa paroisse.
La Radio diocésaine a diffusé une interview de 20 minutes dans laquelle le Père Jean-Pierre Rakotoson m’aide à présenter le livre malgré mes difficultés pour parler malgache.
En janvier 2014, à la demande de l’évêque du diocèse de Mananjary, nous avons terminé la retraite diocésaine par une demi-journée de formation sur la maladie alcoolique et l’un d’entre eux a demandé et reçu le sacrement des malades devant tous ses frères à la messe finale de la retraite. Aux dernières nouvelles, le combat reste « inégal ». L’alcool est vraiment très fort.
Il y a du monde chez Paulette…
Régulièrement, des gens de la paroisse viennent me demander de l’aide, mais la maladie alcoolique et la pression pour boire sont souvent plus fortes. Ainsi, le 26 juin, la veille de son mariage, le gardien du Centre de Promotion Rurale d’Ikalalao qui avait réussi à être abstinent, s’est tué au cours d’une ivresse aigue, laissant un enfant de 2 ans. Pendant la mission du mois d’août, c’est la femme d’un catéchiste qui s’est tuée en tombant par la fenêtre, du fait de l’ivresse. Elle laisse 6 enfants. Dans le livre sur l’alcool, je parlais de la joie de ce couple qui était arrivé à ne plus boire…
Au mois de mai, Paulette, catéchiste, m’a demandé de faire une mission de 3 jours dans sa communauté, de visiter tous les hameaux. J’ai dormi avec les gens, au milieu des poules, des puces, à 5 sur une paillasse, une vingtaine de personnes dans une petite pièce… quelle joie pour eux et pour moi !
Le matin, lors de la messe célébrée entre les maisons du hameau où je venais de dormir, au moins la moitié des gens disaient ne jamais aller à la messe. Nombreux n’étaient pas baptisés. Nombre d’entre eux se sont levés pour recevoir un « signe de l’amour de Dieu », le signe de la croix sur le front.
Le dernier jour, en attendant le déjeuner, Paulette a provoqué une discussion sur l’alcool. J’ai promis de donner le sacrement des malades à ceux qui le souhaiteraient un mois plus tard. Quand je suis revenu pour célébrer un mariage, j’avais oublié cette promesse. Quand j’ai eu fini l’homélie sur le mariage, Paulette s’est levée et a entamé une deuxième homélie par rapport à la maladie alcoolique. Elle a conclu en interpellant ceux qui le voulaient pour qu’ils s’avancent et viennent recevoir le sacrement des malades. 18 personnes se sont levées : 9 hommes et 9 femmes.
Après la messe, nous avons été visiter un homme tombé, 4 jours avant, du 1er étage, en état d’ivresse. Il n’avait pas vu de médecin et ne pouvait plus se lever. Un examen sommaire faisait apparaître des fractures de côte et une fracture du bassin, mais sans complication. Un mois après, il remarchait et avait décidé de ne plus boire… mais, pour le moment, l’alcool est plus fort. Par contre, plusieurs des 18 qui ont reçu le sacrement des malades tiennent le coup. Encore merci à ceux d’entres vous qui ont permis l’édition du livre.
Messe devant la maison de Paulette
Au mois d’avril, une femme me voyant passer au loin sur la piste avait couru pour demander que je vienne visiter son mari et son fils. Il a fallu du temps pour que je puisse le faire et, le 8 novembre, le mari a demandé et reçu le sacrement des malades devant sa communauté.
Parmi les jeunes sessionnistes d’Ikalalao, le fils d’un catéchiste m’a parlé de la libération qu’a vécue sa famille depuis quelques mois alors que son père et son frère aîné étaient très atteints et que cela provoquait des scènes de violence grave à la maison. Son père avait accepté un accompagnement depuis 2 ans.
Vous verrez ci-après le récit de la fondation d’une Association de jeunes à Ikalalao par trois jeunes ayant lu le livre sur l’alcool et voulant notamment prévenir l’alcoolisme chez les jeunes en promouvant diverses activités (sport, enseignement, engagement social, information sur la maladie alcoolique et le tabac) qui est pour nous une belle surprise de cette fin d’année dans un contexte où la nuit semblait plus forte que le jour.
Je reproduis ici cette réflexion du Père Jean-Pierre Roche au cours de la relecture de leur visite au mois d’août :
Dans tout ce que Bruno vit ici, il y a une chose qui me touche beaucoup, parce que d’une pierre elle fait trois coups : le sacrement des malades pour l’alcool. En effet, en recevant ce sacrement, on prend conscience que c’est une maladie et on ne culpabilise pas ; on prend conscience qu’on est aimé de Dieu ; enfin cela manifeste qu’on ne peut pas s’en sortir tout seul : on a besoin de Dieu et des autres.
Voilà, ce sont des « gouttes d’eau », mais il n’y aurait qu’une personne à se relever, ce serait déjà un beau fruit et je tenais à donner des nouvelles à ceux d’entre vous qui avez soutenu ce projet.
Juillet : Semaine de spiritualité pradosienne et Rencontre Nationale du Prado autour de l’Exhortation Apostolique « La joie de l’Evangile »
Du 14 au 25 juillet, avec une vingtaine de prêtres venus de tout Madagascar, nous nous sommes retrouvés à Antsirabe pour méditer l’Exhortation Apostolique « La joie de l’Evangile » du Pape François. Nous avons eu la joie d’accueillir notre nouveau responsable général, Michel Delannoy. Cela a été un temps fort de partage fraternel à partir des paroles du Pape qui vont souvent à contre courant des pratiques habituelles et de nos mentalités spontanées. Il y a une très forte convergence entre le chemin proposé par Antoine Chevrier et ce que propose le Pape, ce qui n’est pas très étonnant puisque la source est la même : l’Evangile et la suite du Christ dans son chemin au milieu des pauvres.
Participants à la Rencontre nationale du Prado
3 au 21 Août : Accueil d’une délégation de ma première paroisse (Champigny-sur-Marne)
Du 3 au 21 août, j’ai eu la chance d’accueillir une délégation de ma première paroisse. Il y avait Jean-Pierre Roche, prêtre dans l’équipe qui m’avait accueilli à Villejuif quand j’étais séminariste, puis avec qui j’ai été en mission à Champigny. Jean-Pierre m’a beaucoup aidé à entrer dans la mission ouvrière mais aussi dans l’accompagnement de l’Action catholique des Milieux Indépendants et plus largement dans le ministère. Il y avait Jean et Geneviève Delarue et leurs 2 dernières filles, Pascale et Nadège. Jean est diacre permanent et ils sont sur cette même paroisse de Coeuilly et Bois l’Abbé où j’ai commencé comme prêtre. Jean a la particularité d’être né à Fianarantsoa où son père était médecin. J’avais connu Geneviève à la Communauté chrétienne des étudiants de la faculté de la Pitié Salpétrière.
Nous avons été rendre visite à Gérard Garnier, prêtre fidei donum à Fénérive qui nous avait précédé à Champigny. 4 jeunes de Befeta ont profité de la voiture pour aller faire un stage chez les Sœurs du Prado. Pour ces filles malgaches n’ayant, pour deux d’entre elles, jamais quitté leur village, ce voyage a été un moment extraordinaire de partage et multiples découvertes. Les français ont été marqués par les partages avec les sœurs, avec des chrétiens engagés et des prêtres de Fénérive, sans oublier la part de tourisme sur l’Île Sainte Marie, la rencontre des baleines, des maki (lémuriens, sortes de singes). Nous avons poursuivi avec la mission à Isaka, joie pour moi de les accueillir dans notre paroisse, de vivre ce temps de partage.
Visite d’un centre de production de spiruline,
algue pour lutter contre la malnutrition à l’Île Sainte Marie.
de gauche à droite : Nadège, Jean-Pierre, Geneviève, Pascale Gérard et Jean
Avant de reprendre l’avion, nous avons eu un temps de relecture. Voici quelques expressions :
– « On te sent heureux ici, au milieu des gens ».
(Et c’est vrai ! Mais encore plus de voir que cet engagement est partagé à travers ces visites, compris, porté, par des personnes de mon diocèse. Et je me prépare à accueillir mon évêque, le Père Michel Santier, en août 2015. Wilson a demandé à ce que ça soit l’occasion de célébrer mes 25 ans d’ordination dans la paroisse.)
– « Tous les malgaches qu’on a rencontrés m’émerveillent : le sourire des gens et leur joie de vivre alors que les conditions de vie sont dures, qu’il n’y a rien. Les militants, prêtres et sœurs qu’on a rencontrés ont une grande pointure : ils s’engagent pour leur pays, même s’ils souffrent de voir que ça n’avance pas comme ils voudraient ; ils se battent. »
– « Dans un pays comme ça qui s’écroule complètement, l’Eglise est importante et aide des gens à espérer. »
Malgré tout ce qu’ils ont vu ou dont ils ont entendu parler, ils ont dit ne jamais s’être sentis en insécurité, et c’est aussi vrai, même au milieu de tout ce que je vais évoquer plus loin.
22 août – 10 septembre : visite chez mes parents et dans le diocèse de Créteil
Mes parents fêteront leurs 80 ans l’an prochain et je passe maintenant chaque année leur rendre visite. Cela m’a aussi permis quelques visites dans le diocèse de Créteil. Le diocèse de Créteil vient d’entrer en synode, tout comme le diocèse de Fianarantsoa.
Mes parents et ma sœur Claire
13 au 18 Septembre : Retraite des prêtres du diocèse de Fianarantsoa
et lecture du livre de Jean-François Arnoux : « Et le désert refleurira », « Pensées fécondes en milieu stérile »
J’ai participé à la retraite des prêtres du diocèse à Morondava, sur le bord du canal du Mozambique, région de la fameuse « allée des baobabs ». J’ai aimé ce temps de fraternité et de possibilité de continuer à méditer les paroles du Pape François qui émaillaient les conférences de notre prédicateur.
J’ai aussi vécu cette retraite en accueillant le témoignage de Jean-François Arnoux. J’ai connu Jean-François quand il était prêtre au Creusot où il accompagnait l’ACE (Action catholique des Enfants). C’est lui qui m’a aidé à entrer en formation pour le ministère de prêtre. Il lutte contre une « aplasie médullaire idiopathique » et a « profité » de son isolement en chambre stérile pour écrire un livre : « Et le désert refleurira », sous-titre : « Pensées fécondes en milieu stérile ». Il y évoque la joie qui lui est donnée au milieu même de l’épreuve, et, dans les pages qui précèdent sa méditation sur la joie parfaite selon François d’Assise, il écrit :
« Le compagnonnage avec le Christ est vie et lumière. Il nous porte, même au milieu de nos nuits les plus noires, quand nous ne sentons plus rien, quand nous croyons que tout est perdu… (…) Lorsque le malheur nous frappe, nous ou nos proches, d’une manière ou d’une autre, que ce soit maladie, décès, accident, divorce, chômage, dérapages multiples, prison, trahison, abandon… il y a un chemin de vie possible. Mais ce chemin ne s’impose pas, il demande notre entière collaboration. Toujours, nous cherchons « des recettes » pour échapper au pire, à la souffrance, au non sens, à la mort. J’ai voulu être témoin qu’il n’y a pas de recettes, mais un chemin possible, un chemin unique pour chacun, si nous le voulons bien. (…) Voilà pourquoi, quoi qu’il puisse m’arriver, j’ose affirmer que le désert a déjà refleuri, car l’amour de Jésus ne se reprend pas, c’est nous qui l’oublions ou ne le voyons pas. Malgré nos oublis et nos ingratitudes, son amour continue à nous créer. (…) Si quelqu’un regarde le Christ comme on regarde l’Espérance et l’Amour de sa vie, s’il accepte de cheminer avec lui en lui faisant entièrement confiance, alors, à l’intérieur de lui, l’Esprit du Christ lui parle et l’enseigne, lui apprend le discernement et le met à chaque instant en situation de gagner toutes les batailles, d’une manière qui lui est propre. » (Version papier : 16 euros + 2,5 euros port. Version numérique : 10 euros. Commande auprès de Clémentine Franchi, 160 rue d’Esquerchin, 59500 Douai, : 09-70-40-72-56. Achat en ligne sur www.domuni.eu ou contact@domuni.eu)
Jean-François Arnoux me remettant la chasuble
offerte par l’équipe soignante de l’hôpital Charles Foix,
il y aura 25 ans le 17 juin 2015
Octobre : Réunion des catéchistes, tournées en brousse, insécurité grandissante.
Comme il n’y a plus qu’un prêtre dans le district voisin, district de Sahave, le mi-temps au service du diocèse de Fianarantsoa consiste à être prêtre adjoint de deux districts, ce qui représente un territoire d’environs 40 x 70 km, avec 7 centres principaux et 60 églises. J’ai la chance d’être vicaire de deux jeunes prêtres, Wilson à Befeta, Simonet à Sahave, avec qui je peux vivre une profonde communion.
Les réunions des catéchistes d’octobre ont été, comme chaque fois, une longue litanie des souffrances des gens : la pluie qui n’arrive pas et des semis de riz qui ont déjà brûlé sur pied, les multiples attaques de « dahalos » (brigands) qui volent tout, jusqu’à la vaisselle. Les gens n’ont rien, mais on leur vole même ce « rien ». Dans les récits des catéchistes, j’ai compté 4 personnes, dahalo ou habitants, tuées au cours de ces attaques. Dans un village, les gens ont appelé les gendarmes pour venir constater et enquêter. Ils ne sont jamais venus. Dans un autre, ils sont venus, mais ils ont tué par erreur un habitant du village.
Il n’y a plus de médecin pour la commune rurale de Befeta : le Dr Michèle, très engagée dans la préparation des JMJ pour notre district, a été attaquée par une bande armée de fusils pour la deuxième fois et elle a jeté l’éponge. Il y aurait 43 000 habitants dans notre district et environs 10 000 pour la commune rurale de Befeta qui se sont retrouvées sans médecin ni sage-femme à Befeta depuis octobre.
Du 19 au 23 octobre, après les rencontres des catéchistes, nous avons visité les communautés de l’extrémité ouest de la paroisse, celles où l’on accède seulement à pied et où l’on dort chaque soir dans une communauté différente. Wilson a pris la partie la plus à l’ouest pour aller réconforter les gens très marqués par les multiples attaques, ne dormant plus la nuit pour certains. Il n’a pas pu aller dans l’un des villages car une troupe armée venue récupérer des zébus volés par un membre de ce village, avait fait fuir toute la population. En passant d’une communauté à une autre, Wilson a aperçu la troupe qui campait sur la colline en face. La radio a parlé de 4 000 personnes. Wilson n’a pas pu compter mais confirme que les personnes armées qui ont ainsi occupé la partie ouest de notre paroisse pendant plusieurs jours en se servant dans les maisons désertées par leurs habitants pour manger étaient très nombreuses, plusieurs centaines. Ni les autorités civiles, ni la gendarmerie ne sont venues à ce moment-là. Ici ou là, dans tout notre district, du fait d’autres bandes de brigands plus petites, on voit des maisons brûlées.
« D’après les statistiques de la gendarmerie de Fianarantsoa, 19 695 zébus ont été volés durant le premier semestre pour les provinces de Toliara et de Fianarantsoa. 10 818 zébus ont été récupérés tandis que 9 514 d’entre eux restent introuvables. » (Site Orange, en date du 28/10/2014, avec une manière curieuse de compter car 19 695 – 10 818 = 8 877 et non pas 9 514). Il est clair qu’il ne s’agit pas de « voleurs à la sauvette », mais d’une véritable mafia impliquant les plus hauts niveaux de l’Etat.
Avec Wilson, nous nous sentons démunis mais, en même temps, nous percevons toute l’importance d’une présence, de ne pas quitter, d’encourager les gens à continuer les réunions des « Fiangonana Fototra », c’est-à-dire à se retrouver pour prier autour de l’Evangile dans chaque hameau le jeudi en fin d’après-midi, à envoyer les enfants à l’école, au Centre de Promotion Rurale, à acheter le Nouveau Testament pour qu’il y ait un livre à la maison et pour que la Parole de Dieu puisse travailler les cœurs, à continuer à utiliser les techniques pour planter le manioc qui augmentent la productivité, à planter des arbres, des bananiers, etc.
Nous travaillons aussi à encourager les jeunes à venir participer aux « JMJ Mada 8 ». Fianarantsoa attend 80 000 jeunes qui viendront de tout Madagascar mais aussi des îles de l’Océan Indien (Comores, Réunion, Maurice, Seychelles), du 15 au 20 septembre 2015, sur le thème proposé par le Pape François : « Heureux les cœurs purs, ils verront Dieu » (Mt 5, 8).
A la fin de cette tournée, le jeudi 23 octobre, je suis allé à la ville centrale de notre doyenné. Le soir, Rolland Arthur, curé d’Ambohimahasoa, m’a parlé de l’insécurité en ville. Dimanche 19 octobre, deux corps mutilés ont été trouvés en deux endroits différents d’Ambohimahasoa. Mardi 21, à 22h, une troupe armée a traversé toute la ville en toute impunité.
Ce qu’il reste de l’école après l’incendie criminel du 24 octobre 2014
Dans la nuit de ce jeudi 23, nous avons été réveillés par des appels au secours : des gens ont mis le feu à un bâtiment de l’école des sœurs qui a totalement brûlé. Il abritait 7 salles de classes de CP à CM1 et d’autres locaux scolaires. Pourquoi ? Aucune explication. Et pourtant, il est difficile de ne pas faire de suppositions. On parle de vengeance d’élèves renvoyés du lycée catholique voisin de l’école primaire. Mais on ne sait pas puisqu’il n’y a pas de justice, et on se retrouve à accuser sans preuve et à risquer d’augmenter à tort la haine.
Ce qui augmente ma souffrance, c’est de voir que, même parmi les responsables de l’Eglise, quand il y a des faits graves, les musulmans sont immédiatement pointés du doigt, sans preuve, de manière globalisante, allant jusqu’à évoquer l’action de Jihadistes à Befeta et Ambohimahasoa, même quand il est évident qu’il s’agit de toute autre chose. Je prie pour que l’Eglise catholique, ses responsables et l’ensemble des baptisés, ne participe pas à une islamophobie aveugle et globalisante et soit au contraire à l’avant-pointe d’un dialogue résolu et aimant, d’un regard capable d’accueillir l’Esprit Saint chez nos frères musulmans qui, dans leur grande majorité, ne sont pas à l’image des Jihadistes. Nous ne pouvons pas oublier comment l’Eglise, en Europe, sauf de belles exceptions, a largement contribué à la montée de l’antisémitisme avant la Shoah.
Lors de la visite à Rome des évêques de Madagascar, le Pape François leur a dit notamment : « Face aux nouveaux défis dans le domaine interreligieux, il me semble urgent de développer, et même parfois d’initier, un dialogue lucide et constructif, afin de garder la paix entre communautés et de favoriser le bien commun. » (28/03/2014) Puisse-t-il être entendu.
Les 31 octobre, 1er et 2 novembre, Wilson étant malade, j’ai été animer la retraite des catéchistes et professeurs. En allant à Isaka en vélo, il y avait un attroupement au bord de la route. Je me suis arrêté : le corps d’un homme assassiné pendant la nuit venait d’être trouvé dans un buisson, sur le bord de la piste. Vengeance ? Attaque par des dahalo ? Nul ne le sait et il n’y aura pas d’enquête. Il laisse une femme et 5 enfants. J’apprends aussi que le fils du catéchiste de Befeta a été assassiné. Il avait 21 ans. Son corps était lacéré de coups de hache à la tête, dans le dos. Là aussi, pas d’enquête de gendarmerie.
Quand je suis arrivé, 70 catéchistes et professeurs avaient répondu à l’appel. Dans ce contexte lourd, nous avons cherché comment trouver cette joie à laquelle nous appelle le Pape. A tour de rôle, répartis en 10 équipes, catéchistes et professeurs ont proclamé et commenté les paragraphes 259 à 283. C’est un moyen de prêcher malgré mes grandes difficultés de langue et aussi parce que j’aime animer en provocant les personnes à chercher et à partager ce qui est lumière pour elles, à écouter ce qu’elles disent, même si, à Madagascar, je ne comprends pas encore très bien ce que disent les gens.
Pape François écrivait, dans cette même exhortation : « Je n’ignore pas qu’aujourd’hui les documents ne provoquent pas le même intérêt qu’à d’autres époques, et qu’ils sont vite oubliés. » (EG 25) J’aurais aimé qu’il soit témoin du partage au fond de la brousse malgache à partir de son texte immédiatement accessible à des gens ayant peu étudié et qui les rejoignait directement dans leur vie quotidienne. Depuis, j’ai rencontré des catéchistes qui disaient qu’ils prenaient du temps à relire ces paragraphes. Les paroles qui suivent nous ont redonné de la force.
« Motivations pour une impulsion missionnaire renouvelée »
Quand le poids de cette souffrance se fait trop fort, j’aime à lire cette première partie du dernier chapitre de l’exhortation apostolique : « Motivations pour une impulsion missionnaire renouvelée » que je résumais ainsi dans l’édition sous-titrée que j’ai réalisée. Rien que la lecture des titres m’aide à retrouver le chemin de la joie liée à l’annonce de l’Evangile.
- Évangélisateurs avec esprit veut dire évangélisateurs qui s’ouvrent sans crainte à l’action de l’Esprit Saint. Jésus veut des évangélisateurs qui annoncent la Bonne Nouvelle non seulement avec des paroles, mais surtout avec leur vie transfigurée par la présence de Dieu
- Quelques réflexions sur l’esprit de la nouvelle évangélisation
- Comme je voudrais trouver les paroles pour encourager une période évangélisatrice plus fervente, joyeuse, généreuse, audacieuse, pleine d’amour profond, et de vie contagieuse ! Je prie l’Esprit Saint…
- Tenir ensemble propositions mystiques et fort engagement social et missionnaire
- Apprenons des saints qui nous ont précédés et ne disons pas qu’aujourd’hui c’est plus difficile.
La rencontre personnelle avec l’amour de Jésus qui nous sauve
- La meilleure motivation pour se décider à communiquer l’Évangile est de le contempler avec amour, de s’attarder en ses pages et de le lire avec le cœur.
- Toute la vie de Jésus contemplée dans l’Evangile parle à notre vie et répond aux nécessités les plus profondes des personnes, est trésor de vie et d’amour qui ne peut tromper.
- Disciple missionnaire qui se sait pécheur, mais est convaincu, par sa propre expérience, qu’avoir connu Jésus n’est pas la même chose que de ne pas le connaître, qui sent et sait que Jésus marche avec lui, parle avec lui, respire avec lui, travaille avec lui parce qu’il l’écoute, le contemple, se repose en Lui.
- Unis à Jésus, cherchons ce qu’il cherche, aimons ce qu’il aime : la gloire du Père.
Le plaisir spirituel d’être un peuple
- Développer le goût spirituel d’être proche de la vie des gens. La mission est une passion pour Jésus et pour son peuple.
- Quel bien cela nous fait de voir Jésus proche de tous ! (et de le suivre sur ce chemin)
- Jésus veut que nous touchions la misère humaine, la chair souffrante des autres… Il attend que nous renoncions à chercher ces abris personnels ou communautaires qui nous permettent de nous garder distants du cœur des drames humains.
- Rendre compte de notre espérance avec douceur et respect, vaincre le « mal par le bien », sans nous lasser de « faire le bien », sans prétendre être supérieurs, en étant des hommes et des femmes du peuple sans discuter les indications de la Parole de Dieu.
- Nous approcher des autres avec amour et découvrir quelque chose de nouveau de Dieu.
- La mission n’est pas un appendice, je suis une mission sur cette terre, et pour cela je suis dans ce monde.
- Chaque personne est digne de notre dévouement parce qu’elle est œuvre de Dieu.
L’action mystérieuse du Ressuscité et de son Esprit
- Ne pas croire que rien ne peut changer et croire à la puissance du Christ qui vit vraiment.
- La résurrection du Christ n’est pas un fait relevant du passé, elle est force de vie aujourd’hui.
- Ne pas baisser les bras définitivement, ne pas ensevelir l’Evangile sous de nombreuses excuses.
- Croire que Jésus nous aime vraiment, qu’il est vivant, qu’il est capable d’intervenir mystérieusement, que le bon grain grandit au milieu de l’ivraie. Ne restons pas en marge de ce chemin de l’espérance vivante !
- Avoir la conviction que Dieu peut agir en toutes circonstances, même au milieu des échecs apparents et sachant que fécondité est souvent invisible, insaisissable, et ne peut pas être comptée.
- Pour maintenir vive l’ardeur missionnaire, il faut une confiance ferme en l’Esprit Saint, renoncer à vouloir calculer et contrôler tout et permettre à l’Esprit de nous éclairer, de nous guider, de nous orienter, et de nous conduire là où il veut.
La force missionnaire de l’intercession
- Intercéder sans cesse à l’école de St Paul
- Et rendre grâce sans cesse à l’école de St Paul
- Les grands hommes et femmes de Dieu furent de grands intercesseurs
Le Pape François – Jeudi saint 2013
Je vous invite à relire ces paragraphes dans leur intégralité, et, pour ceux qui ne l’ont pas encore fait, à lire cette exhortation. Je peux vous l’envoyer en version numérique avec sous-titre pour chaque paragraphe ce qui favorise la lecture. Pour mes amis malgaches, je l’ai aussi en version numérique malgache, et bilingue français malgache, avec sous-titres. Je l’ai également en portugais, pour mes amis portugais de Champigny ou ceux du Brésil ou du Mozambique.
« Avec LUI, prendre soin les uns des autres,
et partager à tous la joie de l’Evangile »
Si la souffrance du peuple malgache a des traits particuliers, dans des contextes très différents, il y a une profonde proximité entre ce que je peux vivre ici et ce que vous vivez en France, ce qui remonte dans l’actualité de notre monde aujourd’hui : tensions dans les quartiers, chômage, montée du Front National, perte de crédit des politiques, montée du terrorisme dans le monde, perte du sens de la vie.
Ici à Madagascar ou en France, nous sommes invités à ne pas perdre cette espérance et à ne pas nous laisser prendre par les sirènes du simplisme, du populisme, du repli sur soi, de l’exclusion du frère. J’aime à lire et relire ces paroles du Pape François :
« De nos jours, de toutes parts on demande une plus grande sécurité. Mais, tant que ne s’éliminent pas l’exclusion sociale et la disparité sociale, dans la société et entre les divers peuples, il sera impossible d’éradiquer la violence. On accuse les pauvres et les populations les plus pauvres de la violence, mais, sans égalité de chances, les différentes formes d’agression et de guerre trouveront un terrain fertile qui tôt ou tard provoquera l’explosion. Quand la société – locale, nationale ou mondiale – abandonne dans la périphérie une partie d’elle-même, il n’y a ni programmes politiques, ni forces de l’ordre ou d’intelligence qui puissent assurer sans fin la tranquillité. Cela n’arrive pas seulement parce que la disparité sociale provoque la réaction violente de ceux qui sont exclus du système, mais parce que le système social et économique est injuste à sa racine. De même que le bien tend à se communiquer, de même le mal auquel on consent, c’est-à-dire l’injustice, tend à répandre sa force nuisible et à démolir silencieusement les bases de tout système politique et social, quelle que soit sa solidité. Si toute action a des conséquences, un mal niché dans les structures d’une société comporte toujours un potentiel de dissolution et de mort. C’est le mal cristallisé dans les structures sociales injustes, dont on ne peut pas attendre un avenir meilleur. Nous sommes loin de ce qu’on appelle la “fin de l’histoire”, puisque les conditions d’un développement durable et pacifique ne sont pas encore adéquatement implantées et réalisées. » (EG 59)
Ce n’est pas le chemin du repli sur soi et de l’exclusion de l’étranger et du pauvre qui nous conduira à la joie et il nous faut sans cesse laisser résonner l’appel du Christ dans la parabole du Bon Samaritain appelant les religieux à passer de la question : « Qui est mon prochain ? » à la question impliquant notre engagement : « Qui s’est fait proche de l’homme roué de coups ? » (Luc 10, 29-37) Il nous faut sans cesse nous ouvrir au Christ qui naît dans les traits de l’exclu, de celui qui souffre, pas forcément par manque d’argent. C’est vraiment l’appel que nous lance sans cesse le Pape :
« Il nous est proposé de vivre à un niveau supérieur, et pas pour autant avec une intensité moindre : La vie augmente quand elle est donnée et elle s’affaiblit dans l’isolement et l’aisance. De fait, ceux qui tirent le plus de profit de la vie sont ceux qui mettent la sécurité de côté et se passionnent pour la mission de communiquer la vie aux autres. Quand l’Église appelle à l’engagement évangélisateur, elle ne fait rien d’autre que d’indiquer aux chrétiens le vrai dynamisme de la réalisation personnelle : Nous découvrons ainsi une autre loi profonde de la réalité : que la vie s’obtient et se mûrit dans la mesure où elle est livrée pour donner la vie aux autres. C’est cela finalement la mission. » (EG 10)
C’est aussi l’axe du synode du diocèse de Créteil : « Avec LUI, prendre soin les uns des autres, et partager à tous la joie de l’Evangile », ou de celui de Fianarantsoa : « Famille chrétienne qui tient debout dans la foi, pilier et garantie de transformation et de croissance » (sens approximatif car une traduction est toujours difficile, et pas seulement pour le novice que je suis). C’est là qu’est la source de la joie.
Je suis privilégié ici pour ne pas perdre la joie et le récit des souffrances du peuple malgache qui précède, très réel, ne dit pas tout de ce que nous vivons. On peut traverser Madagascar sans voir de dahalo et sans rester enfermé pour autant dans les beaux hôtels. Je continue à ne pas me sentir en danger, à être bouleversé par l’accueil des gens, des enfants en particulier, à me sentir privilégié d’être ici.
Mercredi 22 octobre, une cinquantaine d’enfants d’un village perché sur une colline m’accueillaient en chantant « kyrie », chant pénitentiel mélangeant le grec et le malgache de toute beauté. D’autres, les entendant, répondaient à partir de deux autres collines.
Le soir, comme ils étaient tous autour de moi à me regarder me laver sur la place du village, parce qu’il n’y a pas de lieu pour cela dans les maisons, j’ai improvisé une « partie de pêche », consistant à essayer de les attraper dans ma serviette. Grand moment de rire et de joie pour eux, pour moi, pour les adultes qui assistaient à la scène. Ceux qui sont passés me visiter témoignent de la joie que l’on trouve ici, même si, ces derniers jours, j’ai vu des malgaches qui avaient perdu leur sourire.
16 novembre : Fondation d’une association de jeunes à Ikalalao
De gauche à droite : Thierry avec le livre sur l’alcool à la main
Lina et …
Le dimanche 16 novembre, il y a eu un motif de grande joie : 3 jeunes ayant une vingtaine d’années, sont venus voir Père Wilson pour lui présenter l’association qu’ils étaient en train de fonder pour aider les jeunes du village d’Ikalalao à ne pas tomber dans l’alcool en lançant des activités de sport, d’apprentissage (français, informatique – avec un ordinateur), d’engagement pour améliorer la propreté d’Ikalalao, etc. Wilson leur avait demandé d’aller me rencontrer pour me présenter leur association quand j’arriverai de Befeta. Les trois fondateurs sont : Lina, catholique, étudiante en médecine en 2ème année à Fianarantsoa, présente à Ikalalao pour les vacances ; Thierry, protestant, instituteur à l’Ecole Publique ; le 3ème est professeur au collège d’Ikalalao. Thierry était déjà venu me trouver pour demander de l’aide pour sortir de l’alcool et avait demandé le livre. Il n’a pas encore choisi la voie du « zéro alcool », mais il dit avoir beaucoup avancé et vouloir aider les autres jeunes. Il avait fait lire le livre aux deux autres fondateurs de l’association qu’ils venaient présenter et pour laquelle ils venaient demander de l’aide : la possibilité d’utiliser le terrain de basket et les ballons du Centre de Promotion Rurale, d’avoir des livres en français, de donner une formation aux jeunes sur l’alcool, etc. Ils avaient élaboré des statuts pour leur association apolitique et non confessionnelle et obtenu l’agrément du Maire d’Ikalalao. Dimanche soir, ils étaient déjà 35 engagés. C’est un surgissement tout à fait inattendu sous l’impulsion de jeunes qui entrent dans le processus évoqué par le Père Sylvain Urfer, jésuite, spécialiste de la vie politique à Madagascar, dans un article dans la revue « Etudes » « Où va Madagascar ? » (octobre 2014, n° 4209), qui voit émerger des relations citoyennes. Nous ne sommes pour rien dans ce surgissement à Ikalalao, si ce n’est que je suis étonné de voir que Thierry, protestant, était venu demander le livre sur l’alcool et y a sans doute trouvé un appui pour prendre cette initiative, un encouragement à être un « prophète qui se lève et parle par rapport à la maladie alcoolique » (titre du livre), mais nous allons faire tout ce que nous pourrons pour les aider à réussir dans leur entreprise.
14 et 15, 21 et 22 novembre : réunion des catéchistes à Ikalalao puis à Tomboarivo : Une joie profonde et soufferte.
Les réunions de novembre ont été de nouveau une longue litanie : des morts (ivresse aigue, maladie sans accès aux soins, dahalo [voleurs]). Des « balles perdues » : un catéchiste a apporté le dessin d’une des trois « balles perdues » trouvées dans son territoire avec toutes les inscriptions dessus pour témoigner. Ici, une troupe de 40 dahalo. Là, des gendarmes qui se sont fait attaquer et voler leurs armes. Pas d’arrivée de médecin prévue à Befeta. Pendant notre réunion, le village de Tombohovondrona était de nouveau déserté par tous ses habitants et occupé cette fois-ci par des gendarmes recherchant Bia, le chef dahalo de ce village. Prévenu par des complices par téléphone, il a entraîné tout le village dans sa fuite, y compris le catéchiste qui n’a rien à voir avec les méfaits de cet homme car toute personne n’obéissant pas ou se séparant du groupe est menacée de représailles, voire de mort. Au milieu de la nuit, les gendarmes ont encerclé le hameau où Bia se cachait. Il s’est échappé par la fenêtre et les tirs des gendarmes n’ont pas atteint leur cible dans l’obscurité.
Des gens ont faim. En allant visiter la communauté où nous avions fait une mission avec des étudiants en médecine français non-croyants (octobre 2012), communauté où l’on accède par des sentiers escarpés très difficiles (il faut mettre les mains par terre pour ne pas tomber), j’ai rejoint une fille de 18 ans, enceinte de 7 mois, et j’ai marché à son rythme, pour ne pas la laisser aller seule. Elle a du s’arrêter souvent.
A un moment, elle dit quelque chose. Je crois qu’elle dit qu’elle a des contractions, mais elle a dit : « mon ventre a faim ». Alors, je tends le sac de beignets que j’avais acheté pour la route en prévoyant largement car il y a toujours du monde qui se retrouve à m’accompagner en route. Elle en saisit deux et demande : c’est un ou deux ? Elle a précisé qu’elle n’avait pas mangé le matin car il n’y avait plus d’argent. Elle a ajouté que c’était sa deuxième grossesse, que le premier était « simba » (cassé… mort) quand il avait un mois, au mois de mai 2013.
Mais, paradoxalement, particulièrement à la réunion des catéchistes à Tomboarivo, il régnait une paix et une joie profonde. Le partage d’Evangile autour des lectures des 4 dimanches de l’avent a été d’une grande profondeur.
J’étais heureux de pouvoir partager aussi quelque chose sur la phrase de Jean-Baptiste : « Au milieu de vous, se tient Celui que vous ne connaissez pas… » « Parce qu’il est tellement semblable aux autres avec lesquels il a pris place dans la file des pécheurs, tellement différent des images que nous nous faisons, que ceux qui entourent Jean-Baptiste ne perçoivent pas sa présence » ; « parce que nous n’aurons jamais fini d’être appelés à chercher à le connaître, à le reconnaître présent là, à l’aimer, à le suivre » ; « cet Evangile est aussi un appel pour nous à prendre la suite de Jean-Baptiste et à faire raisonner cette question autour de nous par nos paroles, notre manière d’être présent, de vivre : « Au milieu de vous, se tient celui que vous ne connaissez pas… » »
Là où il n’y avait plus qu’une dizaine de « Fiangonana Fototra » (Groupe priant chaque jeudi soir autour de l’Evangile du dimanche suivant dans les hameaux), environs soixante-dix avaient repris leurs rencontres. Il est manifeste que la réunion précédente, ce que nous avions pu dire, la retraite avec la lecture de l’Exhortation Apostolique « La joie de l’Evangile », avaient touché les gens en profondeur. Les catéchistes eux-mêmes l’ont dit.
Avec Wilson, nous avons vécu un moment de profonde communion avec les professeurs et catéchistes, et entre nous deux, devant eux. Il y avait cette joie que le Pape François dit avoir trouvé paradoxalement au milieu des plus pauvres, de ceux qui sont démunis de tout, mais pas de l’ouverture à Dieu et aux autres. (EG 7).
Bien que nous sortions de la messe, Wilson a proposé une prière dehors, assis par terre, avec le fleuve Matsiatra en contrebas, et le soleil couchant qui illuminait les crêtes des montagnes et perçait sous les nuages noirs de l’orage qui menaçait. Spectacle sublime. Pendant ces réunions, j’ai aussi évoqué mes 25 ans d’engagement au Prado et d’ordination et le souhait du Père Wilson que cela soit fêté dans le district lors de la visite du Père Santier, évêque de Créteil en août prochain. Le soir, je n’ai pas dormi, pris par cette joie soufferte, pensant à ces 25 ans et plus, avec les années qui précèdent, qui m’ont conduit à être là, savourant la joie d’être ici, au milieu des plus pauvres.
Le matin, en s’appuyant sur le livre du synode du diocèse de Fianarantsoa, Wilson a longuement aidé les catéchistes et professeurs à réfléchir sur ce qu’est la politique, comment se situer dedans, sachant qu’on espère bien avoir les élections communales un jour.
Réunion des professeurs et catéchistes dans l’Eglise de Tomboarivo.
25 novembre au 10 décembre : au Mozambique
Quand j’étais à Dores do Rio Preto au Brésil, j’avais appris qu’un jésuite originaire de Dores, était missionnaire au Mozambique et nous avions commencé à échanger par emails. Quand Pe Emilio était venu visiter sa famille, nous avions longuement parlé de sa mission et de la nécessité pour des prêtres diocésains de se soutenir, de l’apport d’associations sacerdotales comme le Prado ou d’autres, encore plus quand ils doivent exercer leur ministère dans un monde marqué par la violence, la haine entre groupes ethniques, la corruption, le mensonge, le manque de tout qui augmente les tentations.
Après des années de guerre pour l’indépendance acquise en 1975 suite à la révolution des œillets et la chute de Salazar au Portugal en 1974, le Mozambique a connu une guerre civile qui a duré de 1977 à 1992. Dans un pays qui comptait quelques millions d’habitants, il y avait eu plus d’un million de morts en tenant compte des victimes indirectes, celles mortes de faim. Il a alors connu une révolution marxiste et tous les biens de l’Eglise (écoles, hôpitaux, etc.) ont été nationalisés. Certains ont été restitués depuis.
Ces derniers mois, le pays a connu une reprise de combats qui ont fait 2 à 3 000 morts dans la région de Beira. Un accord a permis la tenue d’élections dont les résultats ont été contestés et contestables et le pays retient son souffle et craint de retomber dans la guerre civile.
C’est un pays qui fait 3000 km nord/sud et 800 km est/ouest dans la partie la plus large. L’île de Madagascar se situe juste en face, séparée par le Canal du Mozambique. Il y a une vingtaine de millions d’habitants. Le pays connait un développement important lié à d’importantes richesses minières (charbon à Tete, pétrole à Pemba, or, autres pierres précieuses). Il est malheureusement « pillé » et, il y a plus de bois qui a été coupé ces dernières années que pendant les 500 années précédentes. Des centaines de camions conduisent ces rondins qui partent pour la Chine, comme le minerai ou le charbon.
Messe avec Pe Emilio et des agriculteurs en session de formation
quelqu’un traduisait mon homélie dans une des langues locales
C’est par l’intermédiaire du Pe Emilio que j’ai été appelé à prêcher la retraite des prêtres du diocèse de Pemba au nord est du Mozambique début décembre 2013. La méthode qui consiste à ne pas prêcher mais à inviter chacun à faire Etude d’Evangile pendant deux heures, puis à ce que quelques-uns partagent leur recherche avant que je ne partage ma propre recherche nous a donné de vivre un moment de partage profond et fraternel. A la fin de la retraite, 3 jeunes prêtres ont demandé à cheminer à l’école du Père Chevrier. J’avais été très marqué par les longs temps de partage personnel avec Dom Luis Fernando Lisboa, nouvel évêque du diocèse.
Carte du Mozambique
Cette année, j’ai commencé ma visite en atterrissant à Tete, au centre ouest du pays, en ayant la joie de passer 2 jours avec Padre Emilio à 230 km de Tete, à la frontière entre le Malawi, la Zambie et le Mozambique. Je le retrouverai en fin novembre 2015 puisque Dom Inácio, évêque mozambicain du diocèse de Tete, m’a demandé de venir prêcher la retraite de ce diocèse qui compte 7 prêtres diocésains pour un immense territoire.
Après 780 km de bus sur des routes plutôt bonnes dans un pays qui se développe vite du fait de la découverte de multiples richesses minières, j’ai rejoint Beira, sur la côte. Beira se trouve à 1000 km de Maputo la capitale située à la frontière avec l’Afrique du Sud, et 2000 km de la frontière nord avec la Tanzanie.
Invité par Dom Claudio, nous avons repris ce que j’avais partagé avec les prêtres du diocèse de Pemba l’an dernier. Nouveau moment fort de partage avec Dom Claudio et trente jeunes prêtres. Du fait de la révolution marxiste et de la fermeture des séminaires pendant plusieurs années, le clergé du Mozambique est jeune et j’étais le plus vieux. Dans une Eglise sans moyens, nombre de prêtres sont tentés de gagner de l’argent comme professeur et ne sont dans leur paroisse que le samedi dimanche, sans jamais visiter les communautés autres que le siège de la paroisse. Plusieurs ont dit combien l’Etude d’Evangile et la lecture des Ecrits Spirituels du Père Chevrier les avait beaucoup touchés et comment ils sentent l’appel à vivre autrement le ministère. Une équipe Prado devrait démarrer et une équipe de prêtres « Jésus Caritas » (Charles de Foucaud) reprendre ses rencontres.
2 jours de bus et 1 500 km plus loin, 16h de voyage le premier jour dans un bus moderne mais surchargé, ayant du faire une partie du trajet debout dans l’allée, l’autre partie avec une enfant sur les genoux, 8h de voyage le deuxième jour, après une nuit chez les Déhonniens à Nampula, j’ai pu rejoindre la première « équipe de prêtres du Prado du Mozambique » à Pemba.
Dinis et Beato
Le projet est de continuer à venir prêcher chaque année des retraites diocésaines pour permettre à des prêtres de connaître la possibilité de se soutenir en faisant partie d’associations de prêtres diocésains. Chaque voyage sera l’occasion aussi de visiter ceux qui auront commencé à fonder une équipe Prado. D’ici 2 ou 3 ans, j’espère pouvoir animer un « mois pradosien » avec quelques prêtres qui auront commencé à cheminer.
Tous invités à célébrer 25 ans d’ordination et d’engagement au Prado le dimanche 6 septembre 2015 à Villejuif :
A Pemba, entouré par Beato et Dinis, les 2 premiers prêtres mozambicains qui cheminent vers le Prado, j’ai rendu grâce pour 25 ans d’engagement dans l’association des prêtres du Prado, fait dans la chapelle du Prado quand j’étais encore diacre, le 10 décembre 1989, anniversaire de l’achat de la chapelle du Prado par le Père Chevrier en 1860.
Le 17 juin 2015, je célébrerai 25 ans d’ordination.
En 25 ans, plus les 13 ans de formation, que de dons reçus dans des situations extrêmement diverses : depuis les études de médecine et la vie en communauté rue Gérard, les 3 ans de fondation des soins palliatifs à l’hôpital Charles Foix à Ivry et en habitant à Villejuif, les 4 ans à la Cité des Minguettes à Lyon, les 9 ans en paroisse populaire à Champigny-sur-Marne puis Vitry-sur-Seine, les 6 ans 1/2 en sillonnant la France au service des prêtres du Prado, les 4 ans dans la montagne brésilienne, les 5 ans 1/2 à Fianarantsoa en paroisse rurale et au service des prêtres du Prado et de diocèses qui le demandent, sans oublier les sœurs, depuis 2013, les visites au Mozambique. Dans le ministère paroissial, quelle diversité de rencontres au cours d’une même journée ! Il nous est donné de partager avec des gens en responsabilité et aussi avec les plus pauvres, et toujours sur l’essentiel de la vie.
Et je rends grâce aussi pour internet qui permet ce partage avec chacun de vous.
J’invite ceux d’entre vous qui le souhaitent à vivre un temps de retrouvailles et d’action de grâce à la paroisse Sainte Colombe de Villejuif où j’avais été ordonné, le dimanche 6 septembre 2015 avec un programme encore à définir mais qui pourrait être celui-ci :
09h00 Accueil
09h30 temps de parole personnelle sur ces 25 ans et échange
11h00 messe paroissiale
12h00 repas tiré du sac suivi d’un temps convivial pendant l’après-midi
(Paroisse Ste Colombe de Villejuif [à ne pas confondre avec la paroisse voisine Ste Colombe de Chevilly-la-rue], 23, rue Ste Colombe, Villejuif, Métro Louis Aragon). Merci de ne faire aucun cadeau personnel. C’est votre présence physique ou par la prière qui sera cadeau. Vous pouvez aussi soutenir la mission à Madagascar et au Mozambique et l’argent servira aussi bien à permettre à des familles d’avoir le Nouveau Testament, à soutenir des jeunes au Centre de Promotion Rurale d’Ikalalao ou en reprise d’études (voir ci-dessus), à permettre à des prêtres de se rassembler et se soutenir dans une suite de Jésus-Christ au service des pauvres, à continuer l’action auprès de ceux qui sont malades de l’alcool, etc.
Remerciements à la fin de la messe d’ordination le 17 juin 1990.
Joyeux Noël et bonne année.
Je m’étais promis de ne pas dépasser deux pages… Et encore, j’ai beaucoup coupé… D’autant que j’aurais voulu citer intégralement de multiples autres passages de l’Exhortation Apostolique « La joie de l’Evangile ». Il y a là une source merveilleuse pour entrer dans le mystère de Noël vécu aujourd’hui.
A chacun et chacune d’entre vous avec qui j’ai cheminé à un moment ou à un autre, je redis ma profonde amitié, combien ce lien invisible à des kilomètres de distance compte pour moi, combien vous êtes présents dans ma prière. Joyeux Noël et bonne année.
Bruno
Peinture, église du Centre Spirituel de Nazaré (Beira, Mozambique)
Cette église est couverte de peintures extraordinaires que je vais essayer de mettre en ligne