Soutenir la mission du Père Bruno Cadart
Bilan 2017 et perspectives 2018
Chers amis donateurs,
Comme je m’y suis engagé, vous trouverez ci-après le bilan de ce que j’ai pu réaliser avec vos dons pour lesquels je vous remercie vivement.
Voilà mon courrier annuel pour vous donner des nouvelles des gens aidés avec votre appuis et vous remercier vivement.
Je vous rappelle que je n’avais pas prévu de me mettre à aider du monde, et encore moins d’aider autant que je l’ai fait.
L’année 2017 a été très difficile pour la famille du Mozambique et pour une 10ème personne aidée à Madagascar.
Par contre, tous ont donné le meilleur d’eux-mêmes et cela me rend heureux de partager avec eux et grâce à votre aide.
Avant de vous donner les comptes, je vous retrace l’historique des actions menées :
1. Les 12 jeunes de Madagascar (devenues 9) aidées dans leurs études pour devenir sœurs
Je vous rappelle que j’avais commencé par repérer Florentine au centre de promotion rurale. Elle venait une semaine par mois se former en couture, techniques agricoles, car elle n’était pas scolarisée faute d’argent et étant orpheline. Elle participait de manière impressionnante à la vie du centre de promotion rurale, faisait son « cahier de Paroles de Vie » tous les jours, réunissait des enfants dans son hameau toutes les semaines pour faire du « mej » (mouvement eucharistique des jeunes), réunissait les gens du hameau toutes les semaines. Un jour, alors qu’elle était à la mission pour participer à l’accompagnement de la retrait de première communion, elle entre et me dit :
– Mon Père, j’aurais voulu être sœur, mais ma mère m’a dit que j’étais trop pauvre.
– pourquoi ?
– parce que je n’ai pas pu étudier au-delà du CM1.
J’ai parlé avec les soeurs du Prado et elles l’ont prises en stage. Elle les a étonnées par ses capacités. D’autres se sont présentées et on a décidé de les aider à reprendre des études. Elles ont été 12 à un moment donné. 3 se sont réorientées et sont mères aujourd’hui. Elles avaient commencé par étudier en restant à la paroisse.
Depuis septembre 2016, elles sont toutes à proximité d’une communauté de sœurs, soit à Fénérive Est (côte nord-est) pour 7 d’entre elles, soit à côté de Moramanga (à mi-chemin entre Tananarive et la côte est).
Nirina est en Terminale, Viviane en 1ère (elle a perdu ses deux parents en quelques mois juste avant de venir à Fénérive=, Lucienne en 2nde. Elle était 2ème de sa classe. Elle a perdu son père au cours de cette année, n’ayant déjà plus sa mère.
Marie-Claire et Marie-Solange ont arrêté d’étudier en fin de 3ème et sont en stage dans une communauté de sœurs. Elles n’arrivaient pas à avoir le BEPC mais réussissent bien dans la vie avec les sœurs.
Françoise va tenter le BEPC pour la 4ème fois car cela ouvre des possibilités de travail après et que les professeurs pensent qu’elle aurait du l’avoir et en est capable.
Florentine qui a recommencé les études après les autres et depuis plus loin est en 4ème et en tête de classe,
Philippine et Marie-Thérèse (son frère est mort cette année) sont en 3ème à côté de Moramanga et réussissent bien.
Cette année, outre la pension habituelle, j’ai payé le voyage aller-retour pour visiter leurs familles. Toutes vous remercient profondément et prient pour vous.
2. Paroisse de Befeta
Ayant été sur place cet été, et comme il n’est pas possible de venir sans rien, j’ai remplacé 2 batteries du Centre de Promotion Rurale d’Ikalalao.
3. Mozambique
En novembre 2015, j’ai rencontré Mertina, 40 ans, dans le bus qui m’emmenait au nord du pays. Elle a raconté son histoire, la mort de ses parents (père assassiné, mère brûlée dans un incendie), sa séparation avec un mari violent. Elle est fonctionnaire au service des anciens combattants (guerre d’indépendance jusqu’en 1975 puis civile jusqu’en 1994 et qui reprend de manière larvée).
En février 2016, comme nous avions gardé le contact par skype, elle dit qu’elle va devoir quitter le logement mis à sa disposition par une paroisse pour l’héberger en urgence. Elle dit aussi qu’elle a un terrain à Dondo, une ville un peu éloignée de son travail à Beira, et qu’elle va perdre ce terrain qui lui avait été donné par sa sœur parce qu’elle n’a rien construit. Je lui demande combien coûte la construction d’une barraque, alors qu’elle ne demandait rien, et elle répond 2 000 €. J’avais des économies et j’ai versé les 2 000 €. En fait, elle ne se rendait pas bien compte et la barraque a coûté 12 000 €.
Au même moment, 5 enfants abandonnés par une autre sœur sont venus frapper à la porte. Ils étaient à la rue, déjà délinquants pour survivre. Après avoir demandé à combien elle estimait la pension alimentaire et l’inscription à l’école, je me suis proposé de l’aider à élever les 5 enfants.
Ils étaient délinquants, livrés à eux-mêmes dans la rue, ils ont changé complètement de comportement et passent tous en année supérieure. Les 3 plus vieux s’orientent vers du technique pour trouver rapidement du travail, contribuer aux dépenses de la maison, gagner leur autonomie. Celui qui a 16 ans continue en enseignement général tant qu’il peut.
Les galères ont par contre dépassé l’entendement. Voilà les difficultés rencontrées en un an :
– anémie à 5 g d’hémoglobine liée à des problèmes gynéco. C’est en entendant l’essoufflement de Mertine, que je lui ai demandé d’aller d’urgence à l’hôpital et que l’examen a donné ce résultat. La normale est à 13g. On a d’abord essayé un traitement médical cher, mais, Elle s’est retrouvée à 6g. Elle a dû accepter une hysterectomie totale pour ne plus avoir le risque de mourir d’anémie. Au retour de l’opération, elle avait une douleur insupportable dans le ventre. La radio a montré qu’ils avaient oublié une paire de ciseaux dans le ventre. Le chirurgien n’a accepté d’opérer qu’en privé et en faisant payer… Pas de justice pour se défendre, et l’urgence d’opérer…
– Elle a été agressée à un moment où elle jouait des coudes pour monter dans un minibus et on lui a volé sa carte bancaire. Elle a fait opposition immédiatement, sauf que le fonctionnaire de la banque était complice de l’agresseur et avait indiqué à l’agresseur que de l’argent venait d’entrer dans le compte. Il a vidé le compte. La banque disait qu’elle n’était pas responsable, que c’était le fonctionnaire. En accompagnant Mertina par whatsApp, elle a eu la force de de crier, menacer. La banque s’est engagée à rembourser et a commencé à le faire, puis elle a dit que la famille du fonctionnaire qui avait été en prison, avait demandé que la plainte sois suspendue pour sauver leur fils, et qu’ils allaient rembourser progressivement. Entre temps, une autre victime a tué le père du fonctionnaire véreux et le fonctionnaire véreux s’est suicidé en prison… le reste du remboursement n’est jamais arrivé.
– Une bande de voleurs a fait irruption dans la maison quand les enfants étaient seuls. Ils ont tout volé, y compris les vêtements pour aller à l’école, les chaussures. C’est ce qui se passe aussi à Madagascar. Ils sont revenus une autre fois, chez la voisine. Ils l’ont violée et tabassé le mari. Ils ont traversé le jardin de Mertina, sans rien prendre. C’est la vie des pauvres dans les pays du 1/3 monde.
– au mois de mai, j’ai reçu un appel sur Whatsapp : Isaias est tombé du taxibrousse auquel il était accroché à l’extérieur car il était plein. La roue est passée sur sa tête et son bras… Il était en vie mais hurlait et perdait la tête. J’ai demandé à ce qu’il ne fasse aucune dépense et le sortent de l’hôpital, en espérant qu’il guérirait spontanément, mais qu’il fallait garder l’argent pour permettre aux autres d’étudier et de manger. Il a guéri.
– tout dernièrement, le taxi brousse dans lequel Mertina était pour revenir du travail a été heurté par 2 camions, a fait 3 tonneaux. Elle était à l’arrière et a été éjectée. Il y a eu 2 morts et plusieurs blessés graves, des gens amputés. Elle a été en observation 2 jours et s’en tire avec des douleurs vertébrales.
– Une de ses sœurs a perdu son emploi et s’est retrouvée à la rue. Pendant qu’elle cherchait un lieu pour loger ses 4 enfants, un fils de 10 ans a été agressé dans la rue et tué. La sœur est devenue désespérée et s’est suicidée. Les 3 enfants ont été placé à l’orphelinat. Quelques semaines après, l’un des 3 est mort de maladie inexpliquée.
– Une autre sœur est morte tout début janvier 2018 du SIDA, le Mozambique étant un des pays les plus touchés au monde par la maladie.
Malgré cet enchaînement, en étudiant le soir et travaillant à plein temps le jour, en ayant de longs transports dans des conditions ubuesques, en ayant été absente pour cause de maladie, elle s’est classée 10ème sur 160 aux examens de licence de droit.
Si elle réussit l’an prochain, elle peut monter en grade et obtenir un salaire 6 fois plus élevé, de quoi être autonome pour élever les 7 enfants, moyennant sans doute une petite aide tant que les 3 aînés n’ont pas leur travail.
J’ai donc partagé 17 000 Euros en 2016 avec Mertina, 12 000 pour la construction de la maison (qui leur permet de ne plus courir le risque d’être à la rue, quoi qu’il arrive) et 5 000 pour manger et étudier.
En 2017, avec cette succession de catastrophes, j’ai partagé 18 000 €.
Pour l’année qui vient on peut penser que, sauf catastrophe, 500 € par mois leur permettront de manger, étudier, obtenir les diplômes et devenir autonomes.
4. Ainah (Antananarivo)
J’ai connu une jeune professeur de 24 ans qui a demandé de l’aide pour être opérée d’une tumeur au cou. Après avoir longtemps hésité, j’ai accepté de payer l’opération (200 €). Diagnostic : tuberculose, ce qui est théoriquement soignable et gratuitement. Elle travaillait sans encore être titularisée, c’est-à-dire, sans recevoir de salaire, seulement quelques aides des parents des élèves, espérant finir par être titularisée, avant de devoir s’arrêter à cause de ses problèmes de santé.
Il y a eu une même succession catastrophique. J’ai aidé à l’opération de sa nièce pour la même maladie et elle est morte. La mère de cette enfant et sœur d’Ainah est devenue folle. Le mari de sa mère lui a dit qu’elle n’était pas sa fille. La mère d’Ainah est morte. Le père a mis Ainah à la porte. J’ai arrêté d’aider tout en gardant le contact par Messenger. Elle s’est retrouvée à la rue. Elle a passé 4 jours sans rien manger et la seule personne qui ait eu pitié d’elle a été une prostituée (Ils vous précéderont au paradis) qui l’a hébergée quelques jours sans la faire travailler. Elle a eu la peste. Au sortir de l’hôpital, je l’ai aidée à louer une chambre dans un quartier pauvre. Un autre locataire qui était ivre a fait tomber sa lampe de pétrole et toute la maison a été brûlée. Le propriétaire l’a hébergée un peu mais la poursuivait de ses avances. Elle a dû se sauver. J’ai payé l’hôtel 4 jours, le temps de trouver une solution. La tuberculose avait flambé et elle a craché beaucoup de sang. Une femme de ménage protestante a eu pitié d’elle et, bien que sachant qu’elle sortait de la peste et que sa tuberculose flambait, elle lui a loué une pièce chez elle et lui prépare ses repas. J’avais arrêté d’aider mais je n’ai pas réussi à ne pas aider un peu. Elle vient de traverser un état critique, de tomber dans l’inconscience et la femme protestante envoyait des nouvelles. Là, elle est très faible. Objectif : ne pas la laisser mourir comme un chien, peut-être lui permettre de guérir, mais sans autre traitement que les médicaments qui sont payants car les antibiotiques classiques et gratuits ne fonctionnaient pas.
Bilan financier
En 2016
le différentiel entre les dons reçus et les sommes données, était de – 14 191,81 €
En 2017 :
- Dons reçus : ………………………………………………………. 3 817,11 €
- Total argent donné : …………………………………………. 26 453,74 €
- Mozambique (Mertina et les 7 jeunes) : ……… 18 323,60 €
- Ainah (tuberculose + peste) : …………………….. 3 875,31 €
- 9 jeunes de Befeta : ……………………………………. 3 912,25 €
- Aide d’un séminariste …………………………………… 342,58 €
- Batteries au centre d’Ikalalao ………………………… 330,00 €
- Différence argent reçu / dons faits……………………… -22 966,63 €
J’ai changé de mode de vie économisant sur tout pour ne pas lâcher les mains saisies et heureux de vivre ce combat, en espérant le gagner. J’ai été largement aidé par chacun de vous et je vous en remercie.
Si on m’avait donné la somme au départ, il est évident que je ne me serais pas engagé. Une fois que j’ai commencé à aider, arrêter, c’était avoir partagé pour rien, avoir dépensé en laissant les personnes retomber dans la misère alors qu’il y avait une perspective de venir à la vie. J’ai essayé d’arrêter le soutien à Ainah quand les choses ont dérapé, mais sans être capable de le faire. Une chose est de savoir que des gens meurent de faim dans le monde, autre chose et de lâcher une main que l’on tient déjà.
Il n’y a pas eu d’enrichissement personnel pour ceux qui s’en seraient inquiétés.
Sauf accident, une aide reçue de votre part de l’ordre de ce qui a été partagé cette année rendra possible le combat pour ces 18 personnes. Je ne compte pas fonder d’association car je ne compte pas continuer au-delà des 2 ans un investissement aussi fort et préférerai rejoindre des associations existantes.
Je n’avais pas prévu d’être plaque tournante d’appels à des dons et me suis refusé à faire de larges appels, acceptant simplement les dons qui sont arrivés.
Perspectives pour l’année 2018
- Je mets en priorité le soutien aux 9 jeunes de Befeta : 3 000,00 € (pas de dérapage prévisible)
- J’essaye de ne pas lâcher le combat pour Mertina et les 7 enfants qu’elle a tirés de la rue jusqu’à ce qu’elle réussisse son diplôme en droit et puisse avoir un salaire très augmenté : besoin pour les deux ans à venir = 500,00 € / mois soit 6 000,00 € / an.
- Je soutiens la famille qui accueille Ainha. Prévision : 100,00 € / mois soit 1 200,00 € C’est une aide qui risque de s’arrêter vite car elle est entre la vie et la mort.
C’est donc un programme pour deux ans pour le Mozambique et ensuite, je retrouverai un niveau de dons raisonnable.
Un grand merci à ceux d’entre vous qui m’ont fait confiance pour ces aides apportées à des personnes pour lesquelles il y a un vrai suivi et des résultats, surtout pour les 9 jeunes de Befeta et les 8 personnes du Mozambique.
Tous ceux qui sont aidés prient pour vous.
Très bonne année à chacun et chacune d’entre vous
Ce qui a été réalisé de 2010 à 2017
Vous avez accès aux bilans des années précédentes
Pour faire parvenir les dons :
En faisant un chèque à l’ordre de « Bruno Cadart »
en l’adressant à
Père Bruno Cadart,
Paroisse Saint Jean XXIII
9, rue Rabelais,
94430 Chennevières-sur-Marne
07 83 59 91 67
Un très grand merci !
Les jeunes de Madagascar et ceux du Mozambique vous remercient aussi et prient pour vous. Je vous adresse aussi tous mes remerciements et vous assure de ma prière. Très fraternellement !
Père Bruno Cadart