Convertissez-vous et croyez à l’Évangile
Entrer ensemble en carême[1]
Tous les ans, l’Église nous propose un temps fort de conversion pour nous préparer aux fêtes de Pâques.
Dieu a fait le choix d’appeler des hommes et des femmes fragiles à vivre et témoigner de son amour. Il a appelé le peuple Hébreux. Il lui a révélé son amour, il l’a appelé à passer de l’esclavage en Égypte à la Terre Promise. Dans cette traversée, le peuple a fait l’expérience de son péché, de ses récriminations. Il a aussi expérimenté la présence de Dieu, de son Esprit (la nuée lumineuse), la force de sa Parole. Le peuple s’est sans cesse tourné vers des faux dieux, mais Dieu n’a pas cessé d’envoyer des prophètes. Il a même envoyé son propre Fils, Jésus, nous appeler à passer vraiment de la mort à la vie, de l’esclavage du péché à une vie dans la justice, en communion avec Dieu, avec les hommes.
Si nous nous disons chrétien, c’est que nous avons fait l’expérience de cet amour infini de Dieu, de sa confiance, de l’appel à témoigner de son amour. Pour autant, dans notre vie personnelle et en Église, nous ressentons très fort tout ce qui est mort, blessure, péché.
Nous sommes dans un moment où l’humanité semble vivre plus fortement cette peur d’une vie en communion, cette tentation de replis, du rejet de l’autre. Pour ne prendre qu’un exemple : le rêve d’une Europe fraternelle, ouverte, construite avec détermination après les deux guerres mondiales, ne soulève plus le même enthousiasme. On voit ressurgir des plaies qu’on pensait du passé : nationalisme, antisémitisme, construction de murs, de fossés entre les peuples. J’espère que vous serez nombreux à prendre au sérieux les élections européennes, à promouvoir des projets allant dans le sens d’un monde vraiment fraternel.
Nous pourrions rêver d’une Église qui soit vraiment signe de cet amour du Christ pour tous et nous découvrons chaque jour que le péché la défigure, que quelques prêtres, évêques, cardinaux, ont détruit gravement des personnes.
Nous prenons conscience que, pendant des années, comme dans l’ensemble de la société, le réflexe a été le déni, l’omerta. Ne vivons pas ce temps très douloureux comme un temps de persécution. Recevons-le comme un temps de purification, de conversion. Le premier pas de la conversion, c’est de ne pas nier la réalité des faits, de chercher ce qui les a favorisés, ce qui doit absolument changer.
Il nous faut aussi ne pas nous laisser obnubiler par tout ce qui défigure le monde, l’Église. Il y a tant de signes de l’action de l’Esprit Saint qui ne font pas de bruit et sont si réels. En habitant au cœur du Bois l’Abbé, en rencontrant des gens à Saint Saturnin, en visitant des malades, notamment à l’hôpital Paul d’Egine, je suis témoin émerveillé de l’attente, de la confiance que des gens ont envers les chrétiens, l’Église, les prêtres.
Le film « Grâce à Dieu » termine par cette question : « Tu crois encore en Dieu ? » Frères et sœurs, que dans ce temps d’épreuve devant la situation du monde, devant le scandale provoqué par certains dans l’Église, nous entrions profondément dans ce temps de carême pour répondre avec toute notre vie, chacun personnellement et ensemble : « Oui, je crois ! » Oui, Jésus est vivant et transforme nos vies, fait de l’Église ce qui donne du sel au monde, un corps heureux de rendre grâce à l’action de l’Esprit Saint au cœur de tous les hommes, un corps engagé aux côtés des plus petits.
Prenons les moyens proposés : prière et en particulier lecture de l’Évangile, jeûne (pas forcément de nourriture mais de tout ce qui nous encombre et nous empêche de nous ouvrir à Dieu et aux autres), partage (financier, en donnant de notre personne, de notre temps)… Soyons audacieux pour favoriser des réconciliations en familles, avec nos voisins, nos collègues de travail, en paroisse… Ne soyons pas le peuple qui récrimine dans le désert et veut retourner à ses anciennes chaînes. Soyons le peuple nourri de la Parole, guidé par la nuée lumineuse, se préparant à redire le « oui » de son baptême à Pâques. Soyons ces croyants redisant « je crois », non seulement du bout des lèvres, mais par toute notre vie, par notre engagement renouvelé dans ce temps de tempête.
Père Bruno Cadart[2]
[1] Feuille paroissiale de Saint Jean XXIII N° 137 du 10 mars 2019
[2] Pour me joindre : cadartbruno@gmail.com www-bruno-cadart.com