Récits écrits pour les assemblées du Prado de juillet 2012 à Madagascar et juillet 2013 à Lyon

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Témoignage d’Etienne Morasidy, célébration Premier Engagement, Antsirabe, le 26 juillet 2012

Avant de prononcer mon Premier Engagement, je vais me présenter brièvement. Moi, Etienne Morasidy, né le 14/10/1966, de parents païens, il va sans dire que toute mon enfance a été bercée dans la culture païenne. Ma scolarité m’a conduit jusqu’en classe de première du fait de la pauvreté de mes parents d’autant que ma santé n’était pas bonne et que j’avais souvent mal à la tête. J’ai été obligé d’arrêter mes études et de revenir au travail de la terre. Je faisais le commerce de la vanille pour m’assurer un certain revenu me permettant de faire face aux besoins. Cela a duré 3 ans.

En 1989, un prêtre français, il s’appelle Maurice, passait dans mon village et s’est entretenu avec moi. Il m’a encouragé dans ma vocation de prêtre m’assurant qu’il existait une autre filière pour des jeunes comme moi qui n’avaient pas le bac. Quelle surprise d’entendre cette nouvelle. Je lui ai dit que j’allais y réfléchir. Cette même année, il m’a écrit pour m’inviter à me rendre au petit séminaire de deuxième filière dont il était le directeur. J’y suis allé et j’ai suivi la formation de 1989 à 1992. En octobre 1992, j’ai été envoyé au Grand Séminaire deuxième filière Jean XXIII à Fénérive Est.

En 1996, j’ai fait mon stage de régence à Maroenstetra. Puis de 1998 à 2001, j’étais de nouveau à Fénérive Est pour la théologie. Pendant ce temps, l’équipe de formation était majoritairement constituée de prêtres du Prado, dont le Père Patrice Trisoka, recteur ; Raphaël, assistant ; de temps en temps le Père Jean-Pierre Ranga venait donner des cours. Le 16 septembre 2001, j’ai été ordonné diacre à Andapa. Un an plus tard, le 1er septembre 2002, j’ai ordonné prêtre à Bohimaro ( ?).

En 2003, j’ai décidé de rejoindre le Prado et j’ai suivi la Première Formation de 2003 à 2005. La vie des prêtres du Prado m’attirait tant dans leur amour de la prière et dans leur zèle à tisser des relations avec toute une catégorie de personnes sans distinction, en particuliers les petits et les marginalisés de la société. Je m’étais approprié le dicton : comme le zébu, les pieds de devant sont suivis par ceux de derrière. En conclusion, je réitère publiquement devant Dieu et devant le Père Aristeu du Prado international, ainsi que devant vous prêtres du Prado à Madagascar, sous la responsabilité du Père Gervais et son équipe, ma décision à prononcer mon Premier Engagement en ce 26 juillet 2012.

Comment je suis venu au baptême

J’habitais en brousse et j’ai étudié au CEG publique. Là, j’ai rencontré des amis chrétiens qui étudiaient avec moi, qui priaient. Puis j’ai été au lycée en seconde, première. Puis j’ai arrêté à cause de la pauvreté et des problèmes de santé. Mais j’ai fait ma confirmation. Mes parents n’étaient toujours pas croyants. Mon père est mort en 2002 et ne priait pas. Quand j’ai été ordonné, ma mère n’était toujours pas croyante. En 2008, elle a été malade, et, en 2009, elle s’est convertie. En 2012, elle a été baptisée et a fait sa communion.

Guérison et conversion d’un jeune drogué à la mission (Etienne Morasidy, Diego)

Je vais dire comment nous annonçons la Bonne Nouvelle aux pauvres.

En 2006, là où je travaillais, il y a eu un jeune de 18 ans laissé pour fou à cause de la drogue, qui injuriait tout le monde, détruisait tout, jetait des pierres sur les maisons des gens. Les gens n’arrivaient plus à le garder. Pour finir, ils lui ont attaché les jambes et les mains et il est venu à la mission. Souvent, ils venaient à la mission. J’ai été touché dans mon cœur en le voyant car il n’y avait plus personne pour arriver à l’accueillir au village. Il souffrait jour et nuit.

Alors je l’ai accueilli à la mission et je ne laissais pas ses amis lui apporter de la drogue. Pendant 2 semaines, je l’ai laissé toujours avec les pieds et les poings attachés. Je lui donnais à boire de l’eau sucrée 3 fois par jour. Et puis, j’ai commencé à détacher ses pieds. Il a été touché de voir qu’il y avait encore quelqu’un capable de venir s’approcher de lui, de comprendre son cas. Après un mois, je lui ai aussi détaché les mains et il a couru à l’église avec les autres personnes qui dormaient à la mission avec nous. Quand ils ont vu qu’il était vraiment guéri on lui a dit qu’il pouvait retourner chez ses parents qui habitaient au village tout proche. Mais il n’est pas parti et il a dit :

–     « Je ne vous quitterai pas, car je veux prier et apprendre car je ne sais ni lire ni écrire. »

Et il est entré au catéchuménat et on a cherché quelqu’un pour lui apprendre à lire et à écrire. A Pâques 2012, il a reçu le baptême et communié. Et maintenant, c’est la deuxième année de préparation à la confirmation, et, de plus, il sait déjà lire et écrire vraiment bien maintenant.

Au début, les gens nous ont critiqués parce que nous avions accueilli un homme fou et pauvre et parce qu’ils avaient peur de lui. Jusqu’à maintenant, ce jeune homme est encore avec nous, et nous cherchons des moyens pour l’aider à travailler. Constatant la grâce de Dieu, le voyant prier, sa famille est aussi venue pour prier et plusieurs ont commencé leur formation chrétienne.

Et nombreux aussi les gens qui nous amènent des gens dans la même situation que lui pour que nous les accueillions et les guérissions.

Aussi, je remercie Dieu car nombreux sont les non chrétiens qui se convertissent parce qu’ils ont vu la guérison de cet homme grâce à la prière.

Cela me fait penser à l’Evangile du Gérasénien possédé par des démons qui arrachait ses chaînes et vivait dans les cimetières, que personne ne pouvait plus approcher. Et là, c’est mieux que dans l’Evangile… les gens veulent aussi recevoir le baptême alors que, dans l’Evangile, ils demandent à Jésus de s’en aller !

Demande d’engagement perpétuel (Théophile, Ambanja)

Je suis né dans une famille musulmane le 4 janvier 1964 dans l’Île de Nosy Be et j’ai été ordonné prêtre pour le diocèse d’Ambanja le 24 juillet 1993. C’est au contact des aumôniers des mouvements d’Action Catholique, la Jeunesse Ouvrière chrétienne dont j’étais membre, que j’ai connu les prêtres pradosiens. J’étais au lycée technique de 1982 à 1985.

C’est surtout à cette époque que j’ai pris conscience de l’importance d’une vie marquée par l’Evangile de Jésus Christ et de la valeur de la vie d’un jeune par notre aumônier, dont je ne dis pas le nom (il est ici avec nous : Patrice Trisoka) – et c’est là que j’ai perçu la vocation d’apporter l’Evangile à tous ces jeunes qui ne peuvent entendre Jésus Christ et donc organiser leur vie selon ses préceptes, si bien qu’ils font des mauvais choix, car, faute d’éducateurs, de parents, de prêtres, de religieuses, ils sont livrés à eux-mêmes et ne peuvent apprendre à voir, juger, agir, face aux autres jeunes pour les inciter au respect de l’homme, de Jésus Christ.

C’est alors que, fréquentant d’autres prêtres pradosiens : Michel Malo, Patrice Trisoka, Narcisse et Jean-Pierre Ranga, qui furent parmi les premiers prêtres pradosiens de Madagascar, j’ai découvert leur fraternité, leur désir d’écouter les plus pauvres. J’étais à cette époque militant, responsable d’équipe de la J.O.C. de mon lycée.

C’est en arrivant en 1987 au Grand Séminaire de Diego, que j’ai pu m’ouvrir au Père Jean-Pierre Ranga, de mon désir de devenir prêtre pradosien. Alors, il nous encouragea, moi et mes camarades, ayant une même aspiration, à nous réunir chaque mois, à faire une équipe d’étude d’Evangile et une révision de vie, sous le tutorat du Père Claude Faramana et Jean Sébastien, tous deux décédés à ce jour, que leur âme repose en paix. Depuis, je n’ai manqué aucune rencontre encouragé par le Père Emmanuel, ici présent, d’équipe, ni régionale ou nationale des pradosiens malgaches.

J’avais beaucoup de plaisir à faire étude d’Evangile avec mes frères séminaristes, bien que nous ne soyons pas du même diocèse.

Dès lors, je m’impliquais dans la charge pastorale en tant que séminariste, dans l’aumônerie des prisons, dans la commission sociale. Je fus également responsable de la célébration de la Parole de Dieu dans la liturgie sans prêtre, ainsi que du catéchisme dans la paroisse de Biralalala, une des plus vastes de mon diocèse.

Quand j’ai été ordonné prêtre, j’ai été envoyé comme vicaire dans la paroisse de Malalava ( ?) qui est sans doute l’une des moins évoluées de mon diocèse tant du point de vue économique que spirituel et qui compte la plus grande population carcérale. J’ai exercé dans cette région de 1993 à 2009. Le retard est lié à la grande superficie et à l’absence de routes. De plus, elle a été délaissée par les pouvoirs publics. Même les missionnaires du diocèse ne sont pas parvenus à y annoncer le nom de Dieu. Il est à noter que seul dans notre diocèse ce district est divisé en 4 paroisses. La religion chrétienne y est tenue pour tabou car la population est encore enfermée dans la foi traditionnelle, l’analphabétisme et l’Islam.

Durant toutes ces années, je suis à la fois aumônier de prison et missionnaire dans les villages. J’avais un désir profond à l’intérieur de moi d’aller au devant des démunis et des laissés pour compte et d’être le témoin qui apporte le développement dans leur vie quotidienne tel qu’il est proposé par la foi chrétienne. Je me disais : Jésus Christ est vraiment le Sauveur. Sa venue est indubitablement souhaitable car ceux qui le suivent sont à l’abri du besoin tant matériel que spirituel puisqu’ils acquièrent la liberté en rejetant tous ces tabous qui les enchainent, de prendre des décisions par eux-mêmes. J’ai vécu tout cela dans la prison et dans les villages isolés et dans la paroisse de … C’est toujours dans cet état d’esprit que j’ai fondé le foyer de …, lieu où j’ai pu offrir la foi chrétienne et le moyen de se réaliser aux jeunes ayant soif de connaissance ainsi qu’à leurs parents. N’était-ce pas une mise en pratique de la parole : « Allez prêcher l’Evangile aux pauvres, aux délaissés et à ceux qui ignorent Jésus Christ. » ainsi que de ma devise sacerdotale dans Ac 9, 15-16 : « Va, car cet homme est un instrument que je me suis choisi pour répondre de mon nom devant les nations païennes, les rois et les Israélites. Je lui montrerai moi-même en effet tout ce qu’il lui faudra souffrir pour mon nom. »

En 2003 je demandais et fus autorisé à suivre la Première Formation qui a abouti à mon engagement temporaire en 2005 ici à Antsirabe au cours de la rencontre nationale.

Ce fut pendant l’année 2009 que j’ai eu le souhait de participer à l’Année Pradosienne Internationale. Je l’ai faite en 2010 / 2011. Pendant toute l’année, je constatais le bénéfice de la vie et de la prière en communauté avec les six frères, car, bien que nous étions originaires de pays différents, nous n’avons eu aucun problème de coexistence. J’ai découvert également que le but précis en allant au devant des pauvres est de se concentrer sur le fait de leur permettre de savoir qui est Jésus Christ, ensuite de les initier à une vie chrétienne et finalement les former à suivre Jésus Christ.

Ici, je ne cesse de connaître que je suis moi-même disciple du Christ, comme les autres prêtres, appelé à vivre l’amour et l’unité par la prière. Dans la prière, l’étude et le partage d’Evangile, la révision de vie suivie d’un désir de conversion, c’est ainsi que, dans la continuité de cet appel de l’Evangile à percevoir l’appel du Christ, je vous adresse cette demande d’engagement définitif, que, j’espère, vous aprouverez et je renouvelle ici ma promesse de vivre dans l’amour de la pauvreté, dans la chasteté et dans le consentement parmi mes frères prêtres de mon diocèse mais aussi de mes frères prêtres de la grande famille pradosienne. Cette demande a reçu en aval la bénédiction de mon évêque. Fait en ma nouvelle paroisse le 20 décembre 2011.

Première évangélisation (Théophile, Ambanja)

Je vais vous partager ce que j’ai vécu dans ma paroisse où je suis depuis dix mois.

Quand je suis arrivé, j’ai pensé que c’était une toute petite paroisse, très petite. Au début de ma mission, je disais aux gens que j’arriverai à tous les visiter chaque mois, parce qu’avant, j’étais dans une paroisse dans la région de Manalava avec de nombreuses communautés et que là, il y en avait peu. Alors j’ai essayé de le faire.

Mais, à la deuxième tournée, chaque communauté visitée me parlait d’autres villages qui n’ont pas encore entendu parler du Christ et m’appellait à y aller. Alors je décide d’aller très très loin, dans un village à 160 km à pieds où personne n’a encore été. Quand j’y arrive, ils m’envoient à un autre village encore plus loin et une vieille dame me dit : « Si tu ne trouves personne pour t’accompagner, j’irai avec toi. » Et puis, maintenant, je n’arrive pas encore à avoir visité tous les villages. Et je viens de trouver encore un village. Toujours une nouvelle communauté qui nait. Ce sont des villages où aucun chrétien n’était encore venu.

Quand j’arrive et que je trouve des gens qui n’ont pas encore entendu parler de Jésus, je parle de la tradition chrétienne par rapport à la tradition de la tribu. Je parle du Messie, du Fils de Dieu. J’essaye d’expliquer le but de la vie chrétienne, la vie de Jésus. Je les invite à recevoir la vie de Dieu, à s’accrocher à Dieu, à vivre avec Dieu, le Dieu de Jésus Christ. Nous, les malgaches, nous avons la foi en Dieu. Mais j’essaye de dire comment est Dieu : il est amour, paix.

J’explique que la foi chrétienne, ce n’est pas la foi des Vazaha (européens). La foi chrétienne, c’est né de Dieu qui nous a donné son Fils, qui est venu au monde, qui nous a révélé l’amour de son Père. Cela n’était pas dans notre tradition. Je raconte tout ce qu’il a fait, son désir de révéler l’amour de son Père, de nous partager sa vie, de nous donner son corps et son sang, sa résurrection. Il n’est pas resté dans le tombeau, son corps n’est pas comme nous.

Je les appelle à recevoir le baptême, à l’aimer, à arranger leur vie selon son enseignement, à s’aimer les uns les autres, à jeter les traditions qui nous détruisent, les interdits qui nous oppriment.

Ils y a des traditions qui sont fondées sur une idée fausse de Dieu, comme l’encouragement à voler, à ne pas avoir le goût de la vie ensemble. Et puis, dans un village, ils croient que Dieu veut que toutes les filles du village de 8 à 15 ans aillent « dormir avec le roi » chaque jour. Elles sont enceintes à 12 ans. Il faut qu’ils aient une bonne idée de Dieu.

C’est pour cela que des gens sont heureux de m’accueillir. D’autres, au contraire, les prêtres de la religion traditionnelle en particulier, sont en colère. Ils disent que je veux imposer la religion des vazaha et nous faire quitter la foi traditionnelle.

Quand les gens ont découvert la foi en Jésus Christ, le premier changement, c’est qu’ils encouragent leurs enfants à aller à l’école. Mais, souvent, ils sont exclus du village. Ils n’osent pas dire qu’ils sont chrétiens parce qu’on les exclut. Ils sont persécutés.

Par contre, quand plusieurs familles se convertissent, leur vie s’améliore. Ils quittent les tabous, comme tous les interdits de travailler certains jours et ils peuvent améliorer leur vie.

Et puis, dans un village, il y a des fady (interdits) funéraires qui font qu’on ne peut pas travailler pendant 4 mois. Il y a quelqu’un qui est mort à Pâques, et il n’a été enterré que la semaine dernière (juillet), juste avant notre départ. Toute la vie est bloquée : personne n’a le droit de travailler, de se laver. Le corps est laissé au milieu des gens pendant 4 mois.

La foi en Jésus Christ est libératrice. Ils ont une idée fausse de Dieu, ce qui donne une idée fausse de l’homme, une destruction de l’homme. La religion chrétienne doit s’accompagner d’une amélioration de la vie, d’une libération, de l’accès à l’école, de la possibilité de travailler, vendre.

(Témoignage d’un autre prêtre qui entre dans le partage)

Ailleurs, c’est l’islam qui domine et la relation aux femmes en souffre. Ils ont plusieurs femmes. Quand l’homme arrive à respecter sa femme, à y être fidèle, qu’il prend conscience que c’est bien pour la femme, bien pour les enfants, et ça arrive, alors tout change. Par exemple, mon grand-père n’était pas chrétien. Il a connu ma grand-mère quand ils étaient jeunes et ils ont été fidèles. Il y a des gens qui découvrent ça, mais, le vivre, c’est autre chose. La religion chrétienne doit les aider sur ce chemin. Les gens changent trop de femmes. Il y a trop de filles mères. En A.C.O., quand on se présente, nombreuses les femmes qui se présentent et ont des enfants sans père. Il y a des femmes qui veulent se marier, mais qui ne trouvent pas d’homme prêt à vivre ça. Il est interdit pour une femme de tromper son mari quand il est en voyage et elle peut être punie pour ça ; par contre, c’est normal que l’homme en voyage aille avec d’autres femmes. Si tu arrives à ce que l’homme se convertisse, alors, la vie change.

(reprise du témoignage de Théophile)

Il y a des endroits où les gens ne sont pas contents de me recevoir, d’autres endroits où ils sont contents. Je ne vais pas frapper aux portes, mais je les rencontre sur la route, sur les places. Je cherche une occasion de rencontre.

Quand j’arrive dans un village, je vais saluer le chef du village et je lui dis que je suis prêtre et que je viens leur parler de la religion chrétienne. Il a des villages où l’on me rejette à haute voix : tabou. Mais il y a toujours une ou deux personnes qui demandent à m’entendre.

Dans certains villages, j’ai été rejeté. Dans d’autres villages, je reste une semaine.

Dans le dernier village où je suis passé avant la session, ils étaient tellement heureux qu’ils ne voulaient pas me laisser partir et ils ont voulu une garantie que je reviendrai. Ils m’ont dit : « Donne-nous le signe que tu reviendras de nouveau. » J’ai dû laisser mon aube, mon étole, ma chasuble et mon calice pour qu’ils soient sûrs que je reviendrai après notre Assemblée du Prado. J’irai le 26 août. Je suis dépouillé maintenant. Au retour, mes bagages étaient allégés. C’est à 175 km de Diego à vol d’oiseau, à l’extrêmité du diocèse avec Ambanja au pied de la montagne la plus haute de Madagascar. C’est à 150 km du centre de ma paroisse, accessible seulement à pied. J’irai le 26 août. Il y a 19h de marche pour y aller à partir du dernier village déjà évangélisé, 2 jours de marche. Ce sont des sentiers très montagneux.

C’est ça l’évangélisation. Je comprends maintenant cette phrase du Christ : « La moisson est abondante mais les ouvriers sont peu nombreux. » Je comprends la parole d’Antoine Chevrier : « Le prêtre est un homme mangé qui donne tout à l’Eglise, tout au Christ, tout aux gens. » La paroisse me demande toute ma vie, toute ma force.

Comment moi-même et mon église annoncent la richesse de J.C. aux pauvres ? (Protais Emmanuel Gervais Abdon, Ambositra)

D’après moi cette Richesse de Jésus Christ en un mot c’est son amour pour la pauvre humanité. Donc annoncer cette Richesse c’est proclamer la Bonne Nouvelle, faire connaître et parler de Jésus Christ, né de la Vierge Marie, souffert, mort et le troisième jour réssuscité. Essayer de l’imiter dans la vie avec les pauvres.

Toutes les manières pour annoncer cette Richesse de J.C. sont stratégiquement bonnes ; mais nous cherchons le moyen le plus efficace afin que tout le monde se tourne vers cette Richesse et y courent. Si les gens ne sont pas convaincus que Jésus Christ les aiment, ils ne viendront jamais vers Lui.

Alors il faut moi-même me mettre à la place des pauvres, me comporter comme eux, comme le Christ par amour pour nous. Cet amour se manifeste dans l’abaissement, dans le fait de se mettre au rang de ceux avec qui on vit. Le Christ Lui-même s’est fait pauvre. Il n’a pas tenu son rang qui l’égalait à Dieu. Lui, pour annoncer l’Amour du Père au monde, ses stratégies, ce sont l’abaissement et la pauvreté. C’est par ma vie et mes exemples donc, en essayant de représenter le Christ, que je peux permettre aux pauvres de connaître et aimer le Seigneur. Il est bon de leur parler de Jésus Christ, mais c’est mieux de le leur montrer par la vie concrète de pauvre. Dans ce cas, les prêtres pauvres ont plus chance pour pouvoir comprendre, connaître, aimer, suivre de près et annoncer le Christ. Les pauvres aussi recoivent et acceptent facilement parce ce que les prêtres sont pauvres comme eux et ils disent des paroles vraies, annoncent ce qu’ils vivent.

Cette annonce n’est pas simplement une proclamation d’un thème ou une sorte de publicité, ou un slogan, mais c’est un témoignage par la vie, c’est à dire une imitation de la personne du Christ. Se mettre à le suivre de plus près jusqu’à se conformer à Lui dans les actes et les paroles. Pour le Christ l’acte et la parole ne font qu’un. En réalité l’acte est plus parlant que la parole elle-même.

J’ai bien remarqué dans la pratique que les gens font plus attention à ce que je fais qu’à ce que je dis. Ils voient et connaissent mieux le Christ dans ce que je fais et je vis que dans ce que je dis et je proclame.

Je suis convaincu que, pour que cette annonce soit fructueuse, il faut « étudier » l’Evangile de manière contemplative, à la manière du Père Chevrier. Dans ma vie de prêtre, je fais n’importe quoi si je ne me conforme pas au Christ. Je ne peux connaître et faire connaître le Christ tel qu’Il est que par l’étude d’Evangile. Je ne peux pas l’aimer et le faire aimer comme il faut si je n’étudie pas sérieusement l’Evangile. Quand je fais systématiquement et habituellement l’étude d’Evangile d’une manière sérieuse, je me sens vrai et honnête dans ce que je dis dans l’homélie et ce que je vis et fais dans ma journée.

La meilleure manière pour annoncer la richesse de Jésus Christ aux pauvres, c’est l’approndissement de l’Evangile. On ne peut pas parler de cette Richesse sans scruter au fond le Christ dans son Evangile.

Bon parleur bon étudiant d’évangile !

A la suite du Bon Berger à l’écoute des séminaristes (Jean-Louis Totozafy, Diego)

Depuis un an, les Evêques de l’Archidiocèse nord m’ont appelé pour être éducateur au Grand Séminaire Paul VI de Diego. Mon rôle est d’accompagner spirituellement les séminaristes. Ce service me demande une bonne connaissance des séminaristes, chacun par leur nom et prénom. Et, comme ils sont un certain nombre (62), je suis obligé de faire des fiches individuelles pour chacun. Au bout d’un an, j’arrive à les connaître chacun par leurs noms et prénoms.

Je me suis décidé à lire l’Evangile du Bon Berger pour connaître l’idée de Jésus pour faire son ministère à partir de la connaissance de ses brebis.

Durant l’année, ils sont revenus à plusieurs reprises individuellement. Ils se sentent à l’aise. Je trouve aussi les progrès des uns et des autres. Ce sont eux qui m’ont ouvert les yeux pour trouver ma place au Grand Séminaire. On m’appelle « Zokibe » (grand ancien) et cette nomination m’interpelle, m’a fait mûrir et m’a aidé à grandir avec les jeunes.

En accueillant les jeunes, je les écoute, je les laisse mener la discussion mais je les amène à aller plus loin dans leur découverte de la foi, à l’image du Bon Berger.

Ma conversion, c’est de garder patience, et il faut de la patience pour écouter pour sentir le besoin des uns et des autres.

Annoncer la richesse de Jésus Christ en accueillant une demande de sacrement des malades (Flavien, Ambanja)

Une femme vient me voir pour demander l’onction des malades pour sa mère sans savoir ce qu’est vraiment le sens et la grâce qu’apporte le sacrement. En allant chez elle, sur la route, cette femme me dit comme ceci : « Mon Père, donne la l’extrême onction », qui se traduit en malgache : « Famotsorana farany » (onction dernière). « Pourquoi tu demandes cela pour ta maman chérie ? » Je continue à l’interroger. Est-ce qu’elle sait quelque chose sur ce sacrement ? Elle me répond : « Non, pas vraiment, mais je sais (ou je pense), elle sait, elle pense qu’après de recevoir le sacrement, le malade, meurt. » Alors, je demande : « Tu veux bien que ta maman meure ? » Elle répond : « oui, oui, car la fête de l’indépendance du 26 juin arrive bientôt (nous étions le 22 juin) et la raison qui m’empêche de fêter le 26 juin, c’est ma maman ! »

En entendant tout cela, j’ai été choqué, mais je contrôle mes sentiments, je reste calme en même temps, je prie bien et je demande l’aide de l’Esprit Saint : Dieu merci !

Je me pose des questions, je m’interroge : « Qu’est-ce que Dieu me dit dans ce fait ? »

Nous sommes bien arrivés à la maison. Je vois beaucoup de monde : sa famille, les gens du quartier, des chrétiens et des non-chrétiens autour du lit de la dame en question.

Je dis que je ne suis pas venu pour tuer cette femme-là. Je commence à expliquer le sens et la grâce qu’on reçoit en recevant ce sacrement de l’onction des malades. Je commence à catéchiser les gens au moyen de la Parole de Dieu. Après, je lui donne le sacrement en question.

Telle est la richesse de Jésus Christ que je dois manifester et annoncer aux pauvres.

Ma décision : je suis prêt pour faire et prendre l’étude d’Evangile au sérieux au moins trois fois par semaine et faire révision de vie !

Messe dans un village où personne ne venait (Samba, Ambanja)

Récit d’une manière personnelle que j’ai vécu dans ma paroisse.

Un jour du Seigneur, le dimanche, j’ai visité des gens du village en brousse. En arrivant chez eux, je ne trouve que le catéchiste à l’église. Et je lui ai dit : « Où sont les autres ? » Il m’a répondu qu’ils sont restés dans leur case car ils ne pensent pas venir ici pour prier. Alors je lui demandais de chercher les gens qui ne sont pas venus pour qu’ils puissent prier avec nous. Il se mit d’accord avec moi et nous avons fait le tour du village. Nous les avons rencontrés les uns après les autres.

Quand on a posé la question : « Quel est le programme aujourd’hui ? » Ils ont répondu qu’ils partiront à la rizière pour récolter le riz. Mais après avoir écouté que je suis prêtre qui est à la recherche des chrétiens pour prier, ils n’ont eu aucune réaction contre moi, mais tout de suite, la réponse en général a été : « Oui, mon Père ». C’est la raison pour laquelle nous avons atteint le nombre d’une soixantaine de personnes à l’église.

A la lumière de notre semaine spirituelle pradosienne, et par rapport à cette expérience vécue, je vois que c’est une œuvre de Dieu. Et c’est la force de l’Esprit Saint qui travaille pour rassembler son peuple.

Je me rappelle l’attitude de Jésus et sa miséricorde dans l’Evangile d’aujourd’hui (Mc 6, 30-34 / Les foules sans berger). Ici, le Christ est présenté comme celui qui, revêtu des sentiments de Dieu, rassemble son peuple dispersé et, tel un Bon Pasteur, le conduit « au pré d’herbe fraîche » (Jn 10, 1-21)

Victor (Ambanja)

Je n’avais jamais vu dans l’Evangile que Jésus aide les gens matériellement, à l’exception de la multiplication des pains et des poissons, des miracles qu’il a accomplis, et quand il a changé l’eau en vin.

Comme j’ai peu de ressources matérielles, je ne peux pas aider les pauvres du point de vue matériel. Comment puis-je aider les pauvres matériellement alors que moi-même, financièrement j’ai zéro !

Quand j’étais en brousse, un jour, il y avait un petit gamin qui était grièvement malade. Son père me demandait une somme d’argent (environ 40 000 Ariary) pour évacuer son fils à l’hôpital en grande ville. Franchement, je lui répondais que je suis sans sou. Ce que je possède, c’est le sacrement des malades qui est au nom du Seigneur. Cela rejoint le livre des Actes des Apôtres (Ac 3, 6). « Voulez-vous que je fasse cela ? », lui ai-je demandé. Il m’a répondu : « C’est accordé ». Je le faisais. Et, un jour après, l’état de santé de ce petit gamin était complètement rétabli. Ce qui m’avait profondément touché encore, c’est qu’il y avait une vieille dame dans la maison voisine, qui, en entendant que le petit gamin était guéri, demandait à un catéchiste de m’appeler pour que je lui rende visite pour lui donner le sacrement des malades, car cette vieille dame était aussi malade.

Là, c’est le sacrement de Jésus que je dois distribuer gratuitement aux pauvres, que ce soit physiquement ou spirituellement.

Et je me suis rendu compte que ce n’était pas moi le propriétaire de la richesse en question, mais c’est le Christ qui est plus précieux que l’ordonnance du docteur.

Je suis là pour être à son service et j’en suis très disponible pour être son Véritable Disciple à la lumière de Père Antoine Chevrier.

Annoncer la richesse de Jésus Christ aux pauvres dans l’attention aux choses concrètes de la vie (Patrice, Fenoarivo Atsinanana)

Dans notre secteur, les tournées sont réparties selon les temps forts de l’Eglise : Noël, tournée des baptêmes des petits enfants ; mois de mai, fête du Saint Sacrement et tournée des premières communions, les enfants à l’âge de raison ; temps de carême, tournée des catéchumènes ; en dehors de tout cela, il y a des tournées prévues pour les communautés en difficultés.

Le récit que je voudrais présenter ici se passait à l’occasion d’une tournée catéchumène. En ce temps-là, 1 600 personnes étaient rassemblées dans un village qui devait accueillir cette tournée. Mon premier réflexe, c’est de réunir tous les responsables de communautés : catéchistes, inspecteurs, etc. en leur disant :

–     « Nous sommes rassemblés dans ce village pour apporter la Bonne Nouvelle de Jésus Christ. Il faut que notre organisation soit nette : l’accueil, la cuisine, la gestion des côtisations et surtout les lieux sanitaires (douches, WC pour les hommes et pour les femmes, sinon ce sera l’épidémie). »

Tous les responsables ont exécuté l’ordre comme ils pouvaient.

Après une journée, je faisais le tour du village. Que vois-je ? Des immondices partout parce que beaucoup de gens n’ont pas encore l’habitude l’aller aux WC. Pour la deuxième fois, j’ai rassemblé les responsables en leur disant :

–     « J’ai fait le tour du village, j’ai remarqué qu’il y a des saletés partout. Donc, allez dans chaque maison du village pour emprunter une pelle ou une bêche et enlevez ces saletés pour les mettre dans les WC que vous avez préparés, sinon, c’est moi-même qui vais le faire. »

Ça a été le remue-ménage dans le village. L’ordre a été bien exécuté. En fait, les villageois eux-mêmes n’avaient pas de lieu de toilette. Cette scène est devenue une question pour eux. La tournée de quatre jours terminée, après la célébration, c’est le départ de tout le monde. Voilà un vieux du village, le sacrificateur, âgé de 74 ans, qui demande à voir le prêtre. J’y suis allé avec deux inspecteurs. Il nous a dit :

–     « Depuis ma naissance, je n’ai jamais vu ce que j’ai vu ici : les jeunes gens et jeunes filles se respectaient. Avec une foule pareille, pas de bagarre. Je n’ai pas vu de gens saouls. Je veux être chrétien comme vous. »

Nous pouvons bénéficier de la richesse de Jésus Christ en priant, en recevant dans la foi les sacrements, et en faisant attention à la vie, aux évènements à travers lesquels Dieu nous parle.

Annoncer la richesse de Jésus Christ en sauvant une enfant d’une mise à mort (Pierrot, Mananjary)

La scène se passe au district de Sahavato où je suis encore curé jusqu’à maintenant. Il y avait un garçon qui s’appelle Frido. Il était âgé de 7 ans. Un jour, il a joué avec sa cousine âgée de neuf ans et ils sont allés jouer au bord d’une rizière. Il y a aussi une chienne à leur suite.

Alors, avant de rentrer à leur maison, la petite fille a vu Frido qui caressait la chienne et qui a pris du lait avec et qui l’a bu, ce qui est « fady » (interdit par la religion). En arrivant à la maison, la petite fille a raconté cela à sa mère, et cette dernière a averti le roi du village.

A ce jour même, ce roi a transmis cette mauvaise nouvelle aux rois des villages voisins et ils ont organisé une réunion pour réfléchir ensemble à ce tabou transgressé. Pendant cette assemblée, ils ont bien interrogé la fille qui avait été témoin occulaire. Ainsi, au terme de cette discussion, on a tranché que Frida était impur. Donc il méritait la mort en le jetant dans l’eau profonde ou bien d’être donné à une personne qui pourra le recevoir, telle que les sœurs ou les prêtres. Même les parents de ce garçon seront marginalisés de la société s’ils laissent cet impur rester chez eux.

Alors, au lieu de le jeter dans l’eau, ses parents l’ont amené au prêtre de l’Eglise toute proche. C’est pour quoi, de bon matin, juste après la messe, ils sont arrivés dans mon bureau et ils ont expliqué la raison de leur venue. Ils étaient très pauvres extérieurement et leurs visages étaient très malheureux.

Alors, j’ai pris l’enfant à la mission et j’ai écrit une lettre pour les rois des villages en fixant une date de rencontre pour bien examiner cet évènement. Je me suis fait accompagner par trois personnes.

Comme moyen et stratégie :

Pour commencer la discussion, j’ai fait entrer la petite fille et lui ai demandé ce qu’elle avait bien vu sur le sujet. Ensuite, j’ai fait entrer le garçon en question. Et ce dernier a nié vivement tout ce que sa cousine avait raconté à propos de son geste ou acte impur ou mauvais.

Après, une division existait entre les intervenants ainsi qu’entre les rois des villages qui ont eu la même idée à la première réunion.

A mon tour, j’ai demandé aux rois des villages s’ils étaient capables de juger une personne comme étant injuste sans avoir écouté l’autre, et s’ils étaient sûrs, en tant qu’éducateurs, de ce qu’avait raconté la petite fille qui n’avait même pas l’âge de raison, et s’ils ne pensaient pas qu’on ne pouvaient « prendre à la lettre » les paroles des enfants. En effet, nous aussi nous n’avons pas pu prendre notre responsabilité de garder nos enfants ou bien de les éduquer tels qu’ils sont selon leur âge. Et puis j’ai conclu : « Vous pouvez écrire une lettre et signer tous ceux qui sont d’accord pour dire que ce petit garçon est impur. Après, nous irons à la mairie pour « valoriser » vos accords. Vous pouvez aussi au contraire rendre pur cet enfant et nous en sommes les témoins. Au vu de cette demande, tout le monde s’est accordé avec la deuxième idée.

C’est ainsi que nous avons réussi à remettre l’enfant à sa famille et rendu sa dignité à cet enfant qui a des droits comme tous les enfants.

Avant de terminer, je peux dire que par l’intermédiaire du prêtre appelé par l’arrivée de ces parents amenant leur enfant, j’apercevais les fruits et la richesse de Jésus Christ qui veut donner la lumière aux peuples Betsimisaraka sur le Tabou et sa limite.

Et puis, comme conversion : quelques membres de la famille de ce garçon ainsi que ses parents se sont convertis à la foi chrétienne catholique. C’est la raison pour laquelle tous les chrétiens étaient pleins de joie et ont rendu grâce à Dieu car il a sauvé les pauvres.

Prostitution des mineures à Nosy Be (Emmanuel, Ambanja)

J’ai eu l’occasion de participer à deux matinées de rencontre des laïcs sur le thème : « Prostitution des mineures à Nosy Be ». Je devais remplacer mon évêque d’Ambanja retenu par une autre mission en dehors du diocèse. La rencontre était organisée par une O.N.G.

1. Ma première impression :

Etonnement sur le thème (Prostitution des mineures), sur le lieu (hôtel Ravinala), sur le nombre de participants (variés et nombreux), sur la qualité de la participation (intérêt et partage).

2. Réflexion du groupe :

Il y a eu un grand intérêt et une conscience des dégâts. Il a déjà fréquenté d’autres réunions de ce genre avant. Tout le monde est d’accord pour faire quelque chose pour essayer d’éradiquer ce mal et chacun s’est engagé à poursuivre les efforts selon son poste de responsabilité.

Le groupe a décidé de nouvelles pistes d’action avec la mise sur pied de clubs des parents, des jeunes, des enfants.

3. Réflexions personnelles pendant et après cette rencontre :
  • Je suis venu à cette rencontre non seulement à la demande de mon évêque, mais je me suis intéressé à m’informer sur la réalité de la prostitution des mineures.
  • J’ai essayé d’avoir la volonté d’écouter beaucoup et d’apprendre de ces laïcs intéressés par ce problème.
  • J’ai apprécié leur participation au débat et leur intérêt au phénomène.
  • J’étais convaincu que ce problème était un problème grave, un problème social et un problème d’Eglise.
  • J’ai décidé de mener des actions prioritaires qui sont :
  • ouvrir les yeux et conscientiser,
  • parler au curé et aux vicaires,
  • permettre aux laïcs adultes de parler de ce qu’ils savent (exemple : des parents qui envoient leur fille se prostituer),
  • secouer et pousser les militants d’Iray Aina de participer et à être des éléments dynamiques dans les clubs des parents.

La grâce qui m’a été donnée :

  • c’est de raviver ma foi à ce Dieu qui a créé la dignité des enfants et des jeunes atteints par ce mal.
  • c’est aussi de me réjouir du développement et de la prise de conscience et du travail accompli et à poursuivre.
  • C’est d’être présent comme Eglise active dans ce peuple de Nosy Be.

Dans tout cela, le Christ apparait comme l’Incarné mais aussi comme le Ressuscité. J’espère que la Puissance de l’Esprit Saint accompagnera notre prise de conscience et notre petite prise de responsabilité.

Annoncer la richesse de Jésus Christ au cours d’une absoute (Gaston Cyrille, Toliary)

Un jour, dans ma paroisse, je suis vicaire à la paroisse cathédrale, une personne m’a demandé de faire une absoute parce que sa maman était morte. Je vais là-bas. Dans la maison, toute la famille se rassemble à côté du cadavre. Je me suis habillé et ai mis l’aube et l’étole. Puis je leur ai dit : « Faites le chant d’entrée ». Au commencement, personne ne parle ni ne chante. Donc je n’arrive pas à poser la question mais je chante : « Ô mivoha ny varavaran’ny lanitra » (Ouvre la porte du ciel). Certains d’entre eux chantent à voix basse. Quand je commence la salutation apostolique, personne n’a rien dit. Et j’ai jeté un coup d’œil sur le cadavre. Qui est-elle ? C’est une femme vazaha (européenne) qui est morte. Donc je continue encore la prière : hira fifonana (prière pénitentielle) et l’oraison. C’est moi qui fait la lecture de la parole et les psaumes ainsi que la proclamation de l’Evangile jusqu’à l’homélie. Après, c’est moi qui finis tout. Au retour chez nous, j’ai partagé ce fait. Tout le monde s’est étonné. La question qui se pose : qu’est-ce qu’on fait lorsque pendant la prière ou la messe, personne n’arrive à participer même s’il est présent devant le prêtre ? Est-ce que nous ne pouvons pas arrêter tout de suite la prière ?

Annonce de Jésus Christ à l’occasion d’un accident (Philibert Rabe, Farafangana)

Un jour, je suis allé à Sandravinany pour dire une messe le dimanche. Le bac était en panne. Alors j’ai traversé la rivère en pirogue, avec la moto. En traversant, la moto était tombée. Je suis resté presque 10 minutes dans l’eau et la moto deux nuits. La rivière n’était pas loin du village, à 800 mètres de Manambondro. La nouvelle s’est répandue rapidement et beaucoup croyaient que j’étais mort parce que pas mal de gens ont perdu leur vie dans cette rivière. Les gens se sont précipités pour me voir en pleurant. Plusieurs personnes disaient que le prêtre est un homme de Dieu, il ne peut pas se noyer. Cette réaction est une surprise pour moi. L’accident s’est passé vers 5h du soir et pendant toute la nuit les gens ne cessent pas de me féliciter. J’en profite pour transmettre ma confiance au Seigneur. Comme le gens aiment les prêtres malgré notre faiblesse ! C’est un évènement qui m’encourage dans ma pastorale.

Un enthousiasme pour annoncer aux pauvres la richesse de Jésus Christ qui s’est renforcé (Odon Pascal, Ambositra)

Ce n’est pas un hasard pour moi d’être Prado, depuis des années que j’avais aspiré à entrer dans cette association pradosienne. La fréquentation avec Mgr Marcellin, au moment où j’étais curé à Fandriana a fait mûrir et fortifier mon choix. Dès que j’arrive à Vohitsoa, la formation donnée par le Père Bernard me pousse à avancer de plus en plus loin. J’étais convaincu personnellement que connaître Jésus Christ dans l’Evangile, c’est un trésor, c’est une vitalité dans la vie des prêtres. Voilà l’importance de l’étude d’Evangile et du cahier de vie. D’ailleurs, le Tableau de Saint-Fons récapitule la vie de Jésus Christ Serviteur Incarné, Serviteur Souffrant, Serviteur pain de vie, Serviteur des serviteurs. Jésus n’a fait que la volonté de Dieu. Il est venu pour nous sauver sans exception. Il est venu pour les pauvres, au service des pauvres et pour le salut des âmes.

J’admire la fraternité pradosienne dans le monde entier qui, surtout à Madagascar, qui se réunissent régulièrement. J’admire l’intimité de chacun, ravi de joie, collaborant ensemble pour faire l’étude d’Evangile, suivre les organisations bien structurées. Je vois le zèle apostolique dont chacun vit dans son intérieur avec le Christ sous la force de l’Esprit Saint. Tout le monde a la soif de connaître ce qu’est le Christ : sa vie, son ministère, ses activités, etc.

En bref, je confirme que « connaître Jésus Christ, c’est tout, le reste n’est rien ! » je vous encourage d’aller plus loin pour prêcher, pour sanctifier les brebis et pour sauver toutes les âmes à la suite de Jésus Christ Serviteur Souffrant.

Cette semaine pradosienne à Antsirabe nous renforce encore d’avoir l’enthousiasme à vivre le charisme d’Antoine Chevrier : « Annoncer aux pauvres la richesse de Jésus Christ ».

François d’Assise (Morombe)

Voici quelques partages sur mon ministère dans les lieux où je travaille. Dans mon premier poste (2008 – 2010), j’ai travaillé dans le district comme vicaire. Je me suis occupé de la brousse, parfois devant aller ou marcher à pieds. Je n’ai pas oublié notre charisme de s’approcher des pauvres, voilà mon obligation. Ce n’est pas facile de faire la pastorale dans la brousse, surtout dans notre région plus dangereuse contenant des voleurs de bœufs qui ne tolèrent pas n’importe qui. Dans cette région, 99 % des gens sont pauvres, misérables. Ils ne trouvent pas de quoi manger. Même les maisons pour dormir ne sont pas toutes neuves. A chaque fois où je descends là, je me rappelle notre spiritualité de se faire pauvre pour avoir les pauvres afin qu’ils puissent trouver la richesse de Jésus Christ.

Alors j’ose dire devant vous que bon nombre sont convaincus de ma pastorale parce que je me suis abaissé devant eux. Je mangeais tout ce qui y existe. Je dors sur la terre pendant une semaine. C’est ainsi que Jésus dit : « Le Fils de l’Homme n’a pas où il repose sa tête. » Alors beaucoup de gens viennent à sa recherche et à sa rencontre.

Annoncer la richesse de Jésus Christ aux pauvres en fondant une école (Denis Saotra, Toliary)

Un récit que j’ai vécu. Dans un lieu où je fais mon ministère, il y a un petit village qui est nommé Ambalavy, dans la région où il y a les mines de saphir (Sakaraha). En faisant la tournée sur ce lieu, je traverse une rivière pour aller de l’autre côté, là où il y a le village. Je trouve des enfants qui se baignent dans l’eau. Ils ont entre 5 et 12 ans. Je me suis dit dans mon cœur : « Comment sera donc l’avenir de ces enfants là si tout cela continue ? Car, chez eux, il n’y a pas d’école. »

En trouvant cela, je me dis dans mon cœur que ça serait bien qu’ils aillent à l’école, surtout à l’école catholique, pour qu’ils puissent avoir des connaissances surtout basées spirituellement.

Lors de ma deuxième tournée, je réussis à réunir les parents dans ce village sans distinction de leur foi. Je leur expose une proposition d’ériger une école catholique ici. Donc on a décidé ensemble de mettre une école dans ce village.

Dans ma tournée suivante, je remarque déjà que beaucoup d’enfants vont maintenant à l’église. De même, je trouve aussi leurs parents avec nous dans l’église. C’est une sorte d’évangélisation surtout avec les pauvres.

Devant tout ce fait alors, je constate que les gens qu’on a trouvés et qui sont pauvres spirituellement ont petit à petit goûté la richesse de Jésus Christ par l’intermédiaire de notre pastorale. Ce n’est pas facile mais cela demande toujours des renoncements à soi : c’est la croix.

Pour moi, ici, notre collaboration, notre union et notre solidarité sont des démarches très importantes avec les gens avec qui nous travaillons. Je suis chez eux dans ce temps pour la Bonne Nouvelle et pour le travail du Seigneur. Je suis heureux avec eux.

Epitre apocryphe de Gérard (Fénérive) à Lalance, Linda, Claudine et leurs copines à partir d’Ephésiens 3

Ayant déjà partagé un récit lors de la semaine de spiritualité pradosienne, j’ai écrit une lettre à la manière de Paul aux Ephésiens.

Vous connaissez mon attachement à Jésus Christ. J’essaye de me laisser lier, emprisonner par sa Parole pour être totalement à votre service pour que vous deveniez vraiment la demeure de Dieu dans votre quotidien. Vous savez que Dieu m’a donné cette grâce de le connaître, de connaître son mystère, et, ce qui est nouveau pour vous, c’est qu’à ce mystère là, vous avez la possibilité d’y avoir accès chaque jour. Vous qui avez peur de l’avenir, vous qui supportez le poids d’une vie difficile avec vos bébés sur les bras qui n’ont pas de papa, vous qu’on n’écoute pas, vous qui n’avez aucun droit, le Christ vous déclare membres de son corps, bénéficiaires des mêmes promesses que ceux qui savent, que ceux qui sont riches, qui sont du bon côté de la balance, par l’accueil de l’Evangile, un Evangile qui vous ouvre à un avenir possible et à une dignité toute renouvelée.

Moi, Gérard, Dieu m’a confié cette mission de vous partager l’insondable richesse de l’amour du Christ et de mettre en lumière la grandeur de ce mystère que vous ne connaissez pas encore complètement mais que l’Eglise veut vous révéler.

De quoi s’agit-il ? Il s’agit d’une sagesse infinie en ressources, et vous n’aurez jamais fini de vous en émerveiller, une sagesse que représente la venue du Christ pour nous et parmi nous, une sagesse dont nous pouvons nous approcher par la foi et une confiance totale en Christ. Peut-être me voyez-vous parfois impatient, peut-être me voyez-vous souffrir parce que ça ne va pas assez vite, parce que ça n’avance pas, me voyez-vous souffrir par toutes les résistances que je rencontre dans l’annonce de l’Evangile. N’en soyez pas attristées. Il faut sans doute que je paye le prix de cette Bonne Nouvelle qui elle doit vous enrichir. Que le Père daigne être votre force par son Esprit pour que vous grandissiez en humanité habitée que vous serez par le Christ et donc enracinées dans son amour. Vous parviendrez ainsi à la connaissance de l’amour du Christ dans toutes ses dimensions : la hauteur, la largeur, la profondeur… Cette connaissance, elle est la plus précieuse entre toutes. C’est ainsi que vous vivrez de cette vie divine si riche. Rendons gloire à Dieu notre Père, lui qui est capable de faire en nous bien au-delà de ce que nous pouvons demander. Amen.

Rufin

Annoncer aux pauvres la richesse de Jésus Christ. Tel est le thème de l’Assemblée du Prado international en 2013.

En tant que prêtre formateur au séminaire et originaire d’un diocèse qui n’a pas encore assez de prêtres, je prends comme un grand message pour moi la prière de Jésus sur la vocation et les ouvriers peu nombreux : « Priez le Père qu’il envoie des ouvriers à sa moisson. » Pour que l’Eglise ait des prêtres, les chrétiens, dans chaque célébration, prient pour la vocation. J’aime entendre les chrétiens manifester dans cette prière leur soif de prêtres nombreux et saints.

Pour moi, l’annonce de Jésus aux pauvres, je la vis surtout avec les séminaristes. Les pauvres qui attendent de moi l’annonce, ce sont les séminaristes. Leur pauvreté s’est manifestée surtout sur leur soif de rencontrer Jésus Christ. Je trouve que ma présence au séminaire au milieu d’eux est vraiment essentielle si je veux partager la présence de Jésus Christ. Je ne peux pas annoncer Jésus Christ à eux sans être présent au milieu d’eux.

Que puis-je partager avec eux ? Et d’où vient ce projet ? De Jésus Christ et aussi d’Antoine Chevrier qui nous pousse à travailler à la formation de prêtres et surtout de prêtres pauvres, et de les aider à vivre la pauvreté. Il faut que ma vie témoigne de l’Evangile devant les séminaristes pour qu’ils puissent comprendre ce qu’est la pauvreté demandée par Jésus Christ.

Là aussi, c’est un témoignage et un moyen d’annoncer l’Evangile aux séminaristes. Je leur fais découvrir l’étude d’Evangile. L’après-midi, ils sont au collège. Quand ils rentrent, je leur demande de prendre un temps d’étude d’Evangile et je leur ai expliqué comment faire.

Et puis, dans la vie quotidienne, je leur apprends à suivre Jésus Christ, y compris dans la manière de gérer la vie quotidienne. Le séminaire n’est pas un lieu pour trouver tout ce qu’on cherche, et aussi pour payer les études. Il y a beaucoup de pauvres qui font des dons pour que le séminaire puisse vivre. Alors je demande aux séminaristes de répondre en travaillant bien et de comprendre que ce sont les pauvres qui les aident par leurs dons.

Une fois par semaine, nous réfléchissons au programme.

J’essaye de partager les responsabilités avec les séminaristes. Il y a un séminariste qui tient la comptabilité. Un autre est responsable de la vie spirituelle.

Je voudrais faire étude d’Evangile avec les autres prêtres de l’équipe, mais tous n’y sont pas prêts. Par contre, je le fais avec les deux régents et avec William.

Pour annoncer aux pauvres, je vois qu’il faut former des prêtres pauvres. Et je vois des séminaristes qui se laissent former par l’Esprit Saint. Mais, le difficile, c’est de savoir voir le travail de l’Esprit Saint. Il y en a pour qui ça se voit immédiatement. Pour d’autres, c’est plus long à apparaître. A la fin de l’année, que dire, que décider ? Qu’avons-nous vu de l’œuvre de l’Esprit Saint ?

Quand il y a un séminariste qui a du mal, je l’appelle, j’essaye de parler avec lui de ce qui me soucie et j’essaye de l’aider à avancer. S’il n’arrive pas à avancer, on est obligé de l’arrêter.

Il y a aussi ceux qui ont des difficultés scolaires parce qu’ils ont peu étudié. La plupart arrivent de brousse où il n’y a pas d’école qui leur permettent d’étudier. Alors, on a lancé une année préparatoire. On ne regarde pas seulement le niveau scolaire. Il y en a qui ont du mal à l’école, mais ils ont une vie personnelle qui manifeste qu’ils ont la vocation et je regarde cela tout autant que le niveau scolaire. Je demande à ceux qui ont des capacités d’aider ceux qui ont du mal et de travailler en équipes.

Annoncer la richesse de Jésus Christ avec des théâtres d’Evangile et des missions (Bruno Cadart, Fianarantsoa)

Ce thème de notre prochaine assemblée me renvoie à plusieurs réflexions :

  • D’abord un appel à reprendre l’Etude d’Evangile de fond dans ma vie, car comment annoncer la richesse du Christ sans l’accueillir d’abord, l’approfondir longuement, ce qui revient dans les réponses reçues pour l’assemblée du Prado de Madagascar.
  • Pour connaître la richesse de Jésus Christ et pour la faire connaître, le chemin privilégié, c’est vivre et proposer la rencontre de Jésus dans l’Evangile. C’est le chœur du charisme du Père Chevrier.
  • Benoît XVI nous le rappelle avec force dans ses deux exhortations apostoliques post synodales « Verbum Domini » (suite au synode sur la Parole de Dieu) et « Africae Munus » (notamment § 16, 34, 35, 45, 61, 96, 109, 148, 150, 151, 161, 164)
  • Cet appel retentit dans notre Eglise de Madagascar où force est de constater que l’Evangile n’est pas au centre de la vie des prêtres (la moitié sont venus à la retraite diocésaine sans Bible), ni de la vie des chrétiens qui ne l’ont pas, ne le lisent pas, et qui est peu proposé dans les rassemblements d’Eglise alors que l’Eglise ne cesse d’appeler toutes les familles à avoir la Bible et à prier avec chaque jour.

Des initiatives pour aider les pauvres à connaître Jésus Christ dans l’Evangile et trouver là la force de se mettre en route

  • A chaque messe, après la proclamation de l’Evangile et avant de partager ma propre méditation, je demande qui accepte de partager une « Parole de vie », le verset qu’il retient dans l’Evangile (ou autre lecture) proclamé et qui l’aide à prier.
  • Wilson a institué un long temps d’Etude d’Evangile par équipes à toutes les rencontres de catéchistes sur les Evangiles des dimanches du mois qui suit. Chaque équipe partage ensuite aux autres le fruit de sa recherche.
  • Pour aider les gens à se décider à acheter la Bible ou le Nouveau Testament, nous vendons 3000 Ar le Nouveau Testament acheté 7000 et 8000 Ar la Bible achetée 15000. L’appel est relancé à presque chaque messe. Le diocèse de Farafangana finance pour sa part la moitié du prix des bibles.
  • Pour que les jeunes ne soient pas seulement à écouter les paroles des catéchistes lors des retraites de 1ère Communion et de confirmation, pour qu’ils entrent dans la compréhension de l’Evangile, nous avons lancé des retraites avec « théâtres d’Evangile » (tableau vivant). Les jeunes mettent en scène un Evangile, puis ils partagent les « Parole de vie » et les « lumières ». Cela a eu beaucoup de succès auprès des jeunes, des catéchistes, des communautés et, à chaque messe, une équipe prépare et joue l’Evangile après la proclamation par le prêtre et avant l’homélie.
  • J’appelle « Lumière », ce que l’on peut comprendre et aimer soit de Jésus, soit de la vie de chrétien dans l’Evangile lu. L’autre jour, à la retraite de première communion, un catéchiste était émerveillé parce que 3 garçons ne sachant pas lire avaient trouvé des lumières dans l’Evangile de l’appel des disciples chez St Jean pour leur première communion :
  • 1ère lumière : faire sa communion, c’est être appelé par Jésus.
  • 2ème lumière : faire sa communion, c’est décider de suivre Jésus.
  • 3ème lumière : faire sa communion, c’est décider d’aller appeler d’autres à suivre Jésus.
  • Une joie : dans une petite fiangonana, le couple de professeurs commence chaque jour en lisant un texte d’Evangile et en appelant les enfants à partager « Parole de vie » et lumières.
  • Avec les jeunes du Centre de Promotion Rurale et les Responsables du F.E.T., une trentaine ont démarré un « cahier de paroles de vie » : chaque jour, ils recopient une « Parole de vie ». C’est un moyen de servir leur rencontre du Christ, mais aussi de les aider à apprendre à lire et écrire.
  • En août, avec ces mêmes jeunes, nous allons faire des missions de 4 jours dans deux fiangonana, pour continuer à les faire entrer dans cette dynamique : « annoncer aux pauvres la richesse de Jésus Christ ».
  • Ils arriveront le mercredi soir.
  • Le jeudi, par équipes, ils prépareront la mis en théâtre des Actes des Apôtres chapitres 1 à 9 et ils prépareront les visites dans les familles.
  • Le vendredi, nous monterons dans la montagne visiter une communauté. Par équipes de 4, ils iront visiter toutes les familles, dialoguer avec elles, partager l’Evangile de Zachée avec elles, les inviter à la messe à la fiangonana pour celles qui sont catholiques ou ont envie de connaître.
  • Le samedi matin, nous célèbrerons la messe dans la communauté et ils joueront le théâtre du livre des Actes des Apôtres.
  • L’après-midi, nous redescendrons au centre et feront la relecture, et nous préparerons la messe du centre.
  • Le dimanche, ils joueront les Actes des Apôtres pour toutes les communautés et animeront la messe du Centre.

C’est une manière de poser un signe pour l’ensemble de notre district que nous ne pouvons pas attendre que les gens viennent. C’est une manière de donner à « connaître la richesse de Jésus Christ aux pauvres ». C’est une manière de former des disciples et apôtres parmi les jeunes, et avec les catéchistes qui les accompagneront. L’objectif est que, à Noël, chacun fasse une mission dans sa propre communauté et qu’avec les autres jeunes de leur communauté, ils visitent toutes les maisons de leur communauté et invitent les gens à venir voir le théâtre de Noël, les chapitres 1 et 2 de Luc complets.

Bruno Cadart (Fianarantsoa)

« Annoncer aux pauvres la richesse de Jésus Christ » en faisant des missions (Bruno Cadart, Fianarantsoa)

1. Genèse et objectifs d’une initiative

En arrivant en brousse à Madagascar, si j’ai été émerveillé par la foi des gens et leur force pour faire des kilomètres pour venir célébrer, j’ai souffert de voir que notre action évangélisatrice se limitait trop à organiser, à « faire du culte », à ramasser le « Vokatra », à faire des retraites dans lesquelles les gens étaient passifs et devaient écouter pendant des heures sans être acteurs et sans que l’Evangile ne soit au centre.

Je souffre aussi quand on fait « passer des examens de catéchisme » où le plus pauvre, celui qui est moins soutenu par sa famille, se trouve recalé et où la foi est présentée comme un ensemble de notions et prières à réciter, tout en ne contestant pas l’importance d’un bagage à transmettre.

Arrivant du Brésil où « toutes » (évidemment pas toutes… mais beaucoup) les familles, même pauvres et illettrées ont la Bible, j’ai aussi été étonné de voir que presque personne n’avait la Bible ou au moins le Nouveau Testament chez lui.

Cela m’a amené à appeler les gens à acheter le Nouveau Testament en le vendant 3 000 Ariary au lieu de 7 000, à appeler les jeunes « sessionnistes » qui viennent se former une fois par mois au Centre de Promotion Rurale d’Ikalalao et aux responsables du F.E.T. (Mej en France) d’acheter le Nouveau Testament 1 000 Ar à condition qu’ils s’engagent à faire un « Cahier de Paroles de Vie » (fourni gratuitement), c’est-à-dire à essayer de lire la Parole de Dieu chaque jour, à choisir un verset qui leur touche le cœur, à écrire la date, la référence du texte médité, le verset ou « Parole de vie » choisi.

Par ailleurs (voir autre récit et vidéo sur le site internet), nous avons lancé des « Théâtres d’Evangile » ou « tableaux vivants » dans toutes les retraites (communion, confirmation) ou rassemblements d’Eglise (congrès F.E.T., etc) et nous appelons les fiangonana à préparer un « Théatre d’Evangile » joué après la proclamation normale de l’Evangile et avant l’homélie.

Le Père Chevrier, fondateur du Prado, disait que « connaître Jésus Christ, c’est tout », et il a été inventif pour étudier l’Evangile de manière contemplative, le faire étudier, provoquer les jeunes de la Persévérance à jouer l’Evangile (ceux qui avaient appris à lire, écrire et fait leur communion dans l’ancienne salle de bal du Prado pendant leur séjour de 6 mois et qui étaient maintenant autonomes, inserrés dans la vie).

Quand on fait étude d’Evangile sur tout ce qui est dit sur « Parole de Dieu », « Bonne Nouvelle », on voit qu’elle est non seulement un objet à transmettre, mais le sujet, l’acteur même de la transmission. Je suis convaincu qu’il faut aider les gens à « manger la parole » et servir ensuite ce qu’elle va provoquer dans les cœurs des gens. Je suis convaincu que l’urgence est d’autant plus grande que les sectes arrivent et attaquent les catholiques en disant que « les prêtres leurs interdisent d’avoir la Bible » parce qu’ils ont peur que les gens la lisent et s’aperçoivent qu’ils font de l’idolâtrie » en vénérant Marie. L’absence d’ancrage fort dans la Parole de Dieu rend plus vulnérables les gens aux pressions des sectes.

Quand je regarde Madagascar et tout ce qui peut être blessé dans le cœur des gens qui fait qu’ils volent les planches des ponts par exemple, que les aides reçues de l’extérieur sont souvent détournées ou amènent les gens à tout attendre de l’extérieur, à partir aussi de ce que j’ai pu vivre au Brésil, je suis convaincu que l’Evangile mis dans la main des pauvres peut toucher les gens et aider à se mettre debout.

Je dirais exactement la même chose en France où les blessures dans les cœurs des gens sont autres, mais où c’est la même urgence à aider à rencontrer la personne du Christ dans l’Evangile.

Les partages à partir de la guérison du paralysé de la Belle Porte ou sur le mensonge d’Ananie et Saphira en faisant le lien avec notre vie n’ont fait que me confirmer dans ce chemin.

Il ne faut pas sous-estimer tout l’impact de ce travail d’appel à lire l’Evangile, à le mettre en théâtre pour aider des jeunes à avoir envie de lire, écrire, s’exprimer, s’organiser, réfléchir, choisir, agir. Cela rejoint la dynamique éducative de Paulo Freire au Brésil qui a donné beaucoup de fruits.

Par ailleurs, en entendant souvent les catéchistes ou les prêtres se plaindre que, une fois que la première communion ou la confirmation aient été faites, les gens ne viennent plus, je me suis demandé comment aider à passer de « l’attente passive que les gens viennent à la fiangonana » à « l’action pour que l’Eglise aille vers eux ». Dans l’Evangile, nous ne voyons pas le Christ attendre que les gens viennent, même s’il doit parfois les fuir, mais nous le voyons sortir, aller vers.

Je voyais aussi la difficulté pour les équipes F.E.T. à se réunir, à mener des actions. Le lancement des « Théatres d’Evangile » pendant les célébrations des fiangonana avait déjà dynamisé des équipes, mais comment vivre « l’aller vers » ?

Encouragé par le Père Wilson Rakotonirina, directeur du district, lui-même en mission en France pour deux mois, et en profonde communion de prière avec lui que j’ai associé à notre mission devant les jeunes tout au long de ces jours, j’ai donc proposé de faire deux missions au mois d’août, période qui présentait deux avantages :

–     pas d’autre activité pastorale qui pourrait être en concurrence

–     présence des jeunes qui étudient en ville pendant l’année.

L’appel a donc été lancé auprès des sessionnistes pour une mission à Ikalalao (15 au 19 août 2012) et auprès des responsables F.E.T. pour la mission à Befeta (22 au 26 août 2012). Il a été élargi aux jeunes intéressés, aux catéchistes an-sitrapo (bénévoles) ou en titres ainsi qu’à des professeurs de l’école catholique.

J’ai aussi lancé cette initiative à cette période en pensant à tous ceux pour qui les J.M.J. sont inaccessibles à cause de leur coût. Je pensais aussi à ceux qui iraient aux J.M.J. pour qu’ils trouvent là une préparation, une formation.

Parfois, je m’inquiète de savoir comment, au-delà du fait de rassembler de nombreux jeunes, de vivre cette force du rassemblement, il va leur être donné d’entrer personnellement dans la rencontre du Christ dans l’Evangile, comment il y a eu une préparation, comment il y aura un suivi, une structuration d’une vie de disciple et d’apôtre.

Nous avons perdu toute la pédagogie des mouvements comme l’action catholique où le grand rassemblement était précédé par tout un travail en amont avec cahier de militant, méditation de l’Evangile personnelle et en équipe, regard sur la vie, vie en équipe, initiatives pour aller vers, accompagnement personnel des responsables, le tout se célébrant lors de grands rassemblements.

2. Le schéma type de la mission :

  • Mercredi soir :
  • Arrivée au centre
  • Jeudi matin :
  • Préparation par équipes du théâtre des Actes des Apôtres chapitres 1 à 9. Nous avons gardé le texte même en faisant des coupures (le choix de Mathias a été supprimé, les homélies de Pierre ont été légèrement raccourcies, celle d’Etienne a été réduite à l’introduction et à la conclusion, le reste étant résumé en une phrase), et en mettant en style direct les dialogues, en introduisant tel ou tel élément pour faciliter la mise en scène. Les noms géographiques (Ac 2, 8-11) ont été actualisés pour être compris par les jeunes (note : je tiens à disposition de qui veut les textes des évangiles ou des Actes des Apôtres déjà préparés pour être mis en tableau vivant).
  • En fin de matinée, présentation par chaque équipe de son travail, pour permettre une première écoute et améliorer la mise en scène ou corriger ce qui n’aurait pas été compris par les jeunes.
  • Jeudi après-midi :
  • Messe avec liturgie de la Parole constituée par la présentation par chaque équipe de son théâtre, suivi du partage des « Paroles de vie » trouvées par les membres de l’équipe, et d’un dialogue avec le prêtre sur les « lumières » pour nous aujourd’hui, pour la mission. Entre les théâtres et au sein même des théâtres, s’intercalaient des chants facilitant l’écoute. Le choix d’une lecture longue était pour permettre une connaissance solide de la fondation de l’Eglise, de sentir la force de l’Esprit Saint chez les apôtres, hommes « simples et sans instruction », de voir la place centrale de Pierre, mais aussi celle de Marie, de permettre toute une catéchèse.
  • Se sont ainsi succédées 6 équipes :
  1. Ascension et Pentecôte jusqu’au portrait de l’Eglise idéale (Ac 1 et 2) ;
  2. La guérison du paralytique, le discours de Pierre, le passage devant le tribunal (Ac 3 et 4) ;
  3. Ananie et Saphira, l’action des apôtres, nouvelle arrestation et comparution avec prise de parole de Gamaliel (Ac 5) ;
  4. L’institution des 7 diacres, le témoignage d’Etienne et son martyr ( Ac 6 et 7) ;
  5. La mission de Philippe en Samarie puis avec l’éthiopien (Ac 8) ;
  6. La conversion de Saul (Ac 9, 1-30)
  • La messe a ainsi duré 2h45 et cela a permis aux jeunes de vivre le théâtre comme une prière et non un simple jeu. L’homélie s’est faite sous forme de dialogue avec eux après le passage de chaque équipe : « Paroles de vie » ? Lumières pour votre vie, la mission ?
  • Préparation des visites dans la fiangonana (Ankarana pour Ikalalao, Ambodimanodila pour Befeta)
  • Vendredi :
  • Messe d’envoi en mission avec lecture de l’Evangile de l’envoi des 72 et bénédiction de l’eau pour bénir les maisons emportée par chaque équipe.
  • Trajet pour la communauté et constitution d’équipes avec les jeunes de la communauté chargés de guider les « missionnaires » (6 équipes à Ankarana, 14 à Ambodimanodila)
  • Visite de tous les hameaux de la communauté choisie (voir ci-après)
  • Déjeuner des équipes dans les hameaux visités
  • Après-midi : visites d’autres hameaux
  • Préparation messe du lendemain
  • Nuit sur place à Ankarana, retour au centre pour la mission à Ambodimanodila
  • Samedi :
  • Messe dans la petite communauté avec présentation de Actes 1 à 5 en théâtre puis lecture de l’Evangile du jour
  • Déjeuner avec la communauté
  • Après-midi : retour au centre et relecture (voir ci-après)
  • Préparation de la messe de toutes les communautés liées à la communauté du centre
  • Dimanche :
  • Messe au centre avec les 8 ou 9 communautés liées à ce centre
  • Les premières lectures ont été remplacées par Ac 6 à 9 sous forme de théâtre, tableau vivant. On a gardé l’Evangile du dimanche. (voir vidéo martyr d’Etienne en suivant ce lien : http://www.youtube.com/watch?v=PCi7y9faVlc&feature=plcp
  • On trouvera d’autres vidéos du même type en se rendant sur mon site bruno-cadart.com

3. Le contenu des visites

Il s’agissait d’aider les catholiques à participer à la vie de la communauté et de donner un signe d’amitié aux personnes non catholiques, sans faire de prosélytisme comme peuvent le faire certains groupes religieux. Pour éviter que ça soit mal compris, les catholiques de la fiangonana visitée avaient prévenu les protestants du sens de notre initiative.

Un jeu de rôle avait permis de préparer les jeunes à visiter les gens, à dialoguer avec eux et à faire une proposition qui tienne compte de leur religion et de leur désir.

Dans le village principal, nous avons commencé par la visite de toutes les maisons. Les équipes se déplaçaient en chantant des cantiques, frappaient aux portes, se présentaient comme catholiques, demandaient si les gens étaient prêts à les recevoir (le cas le plus fréquent), dialoguaient avec les gens (votre famille ? votre religion ?).

Quand les gens n’étaient pas croyants : heureux de vous saluer, nous croyons en un Dieu qui aime tous les hommes, souhaitez-vous néanmoins que nous prions pour vous, que nous bénissions votre maison ? Dans ce cas-là, nous prions avec, à chaque fois, la lecture de l’Evangile de Zachée.

Quand les gens étaient protestants : heureux de vous rencontrer, vous qui êtes nos frères dans la foi, voulez-vous que nous prions ensemble ? Lecture de Zachée et partage des « Paroles de vie », prière du Notre Père mais pas du Je vous salue Marie, bénédiction si les gens le souhaitaient.

Chez les catholiques : idem avec questionnement sur la participation à la vie de la communauté, invitation à la messe du lendemain, prière du Je vous salue Marie en plus de chants, de l’Evangile de Zachée, du Notre Père, d’un partage d’intentions.

Dans les petits hameaux, nous arrivions en chantant, en appelant les gens à se rassembler sur la place du hameau. Nous nous présentions, invitions les gens à prier, lisions l’Evangile de Zachée. Souvent, nous l’avons mis en « théâtre », invitant les enfants à se joindre à la scène en faisant la foule qui suivait Jésus. Suivait un dialogue collectif à partir de l’Evangile : « Comment Jésus peut entrer aujourd’hui dans nos maisons, dans nos vies ? »

Dans un deuxième temps, nous avons suivi les gens qui souhaitaient que nous entrions chez eux et bénissions leurs maisons.

4. Réalisation :

4.1 Mission à Ankarana « fiangonana », communauté, qui dépend du centre de Ikalalao du 15 au 19 août

Le 15 août après-midi, la mission a commencé, mais pas comme je m’y attendais. 40 sessionnistes avaient promis de venir et je m’attendais à ce que, avec leurs amis, ils soient 50 ou plus. Ils n’étaient que 5. Il y avait aussi Mr Christian, formateur au Centre de Promotion Rurale.

Il n’y aurait eu aucun jeune, j’étais déterminé à monter quand même à Ankarana. J’ai été heureux de voir que le petit nombre ne m’avait pas déstabilisé et j’ai de plus en plus la conviction que c’est le Christ qui conduit, alors peu importe le nombre de personnes qu’il nous envoie.

Je ne peux pas oublier non plus qu’il commence lui-même « à la crèche », comme dit le Père Chevrier, de manière petite, humble, et que s’il y a les foules, on le voit prendre beaucoup de temps pour quelques uns, pour former les apôtres. J’étais heureux de pouvoir vivre cela avec Mr Christian et avec ces 5 jeunes filles : Florentine et Vola d’Ankarimbahoaka, Pascaline de Tsito, Janina d’Ambohibe, Marie-Roseline d’Anjoma.

Jeudi 16 août, nous avons préparé le théâtre du livre des Actes des Apôtres 1 à 5 et les visites des gens.

Vendredi 17, après avoir attendu que le crachin s’arrête, nous sommes montés à Ankarana. J’avoue que j’étais un peu inquiet : le catéchiste d’Ikalalao n’est même pas venu nous saluer alors qu’il habite contre l’Eglise et le Mpiadidy Paul n’était pas avec nous pour cette préparation… En descendant à pied le sentier rendu très glissant par la bruine qui plonge vers le ravin, j’ai fait une belle chute, sans conséquences.

Quand nous sommes arrivés à Ankarana, Paul nous attendait avec 15 jeunes et le catéchiste d’Ankarana. Tout était merveilleusement préparé, mais pas du tout comme je l’avais imaginé : je pensais qu’on aurait commencé par visiter les maisons une par une et eux avaient prévu d’appeler les gens pour qu’ils se réunissent sur la place de chaque hameau pour dialoguer et prier, ensuite de quoi, nous avons visité quelques maisons pour les bénir. Nous avons fait 6 équipes et visité tous les hameaux. Quelqu’un a été prévenir les gens de la fiangonana de Marodita que nous devions aussi visiter pour les prévenir que nous ne viendrions pas vu notre nombre réduit. Nous avons prévu d’aller les visiter le samedi 15 septembre.

L’accueil variait suivant les lieux, suivant s’il y avait des chrétiens catholiques engagés ou non, mais il a été bon partout. A 13h, nous avons déjeuné à l’église d’Ankarana, répété le théâtre avec les jeunes d’Ankarana, puis nous avons visité toutes les maisons du hameau du Mpiadidy.

La communauté avait tenu à ce que nous dormions sur place, chez l’habitant et a offert les repas du vendredi midi au samedi midi, merveilleux fruit de l’Esprit Saint que cette joie de nous accueillir et de partager avec nous.

Le samedi 18 août, nous avons joué les chapitres 1 à 5 des Actes des Apôtres pendant la messe. L’après-midi, nous sommes revenus à Ikalalao avec Christian et les 5 sessionnistes et nous avons fait la relecture (voir ci-après). Le dimanche, même chose pendant la messe des communautés dépendant d’Ikalalao.

4.2 Mission à Ambodimanodila, « fiangonana », communauté, qui dépend du centre de Befeta

Mercredi 22, je suis arrivé à Befeta avec les 5 mêmes sessionnistes enthousiasmées par la première mission et demandant à faire la deuxième, plus des jeunes d’Ankarana et des amis des 5 sessionnistes. Nous avons retrouvé de nombreux jeunes venus des diverses communautés de Befeta, ainsi que tous les catéchistes de ce centre et de nombreux professeurs, tous invités par le Mpiadidy Philibert. Au total, 79 personnes ont participé à la mission à Befeta dans la fiangonana d’Ambodimanodila.

Jeudi 23, en 6 équipes, nous avons mis en scène les chapitres 1 à 9 des Actes des Apôtres dans un climat vraiment très bon. Cela a donné un très bon partage à la messe du jeudi soir.

Vendredi 24, nous avons constitué 14 équipes et visité les 14 hameaux de la Fiangonana Ambodimanodila et tous les hameaux entre Ambodimanodila et Befeta lors du retour au centre le soir. A l’entrée de Befeta, les équipes s’étaient donné rendez-vous pour traverser Befeta ensemble en chantant.

J’avais remarqué que Père Victor, originaire d’Ambodimanodila, avait été ordonné prêtre à Befeta le 6 août 1992 il y a juste vingt ans. Aussi, nous l’avions invité à venir nous rejoindre pendant la mission et célébrer cet anniversaire avec nous. Il était donc avec nous le samedi matin à Ambodimanodila. Les jeunes ont joué les chapitres 1 à 5.

Quand les gens ont vu celui qui jouait le rôle d’Ananie mourir et être portés pour être enterrés avec les chants habituels pour la circonstance, ça a marqué les esprits, et, quand j’ai demandé ce qui avait tué Ananie : la parole de Pierre ? Mais comment l’apôtre d’un Dieu d’amour peut-il tuer ? Et d’alerter sur le mensonge qui tue dans nos vies, c’est peu de dire qu’ils écoutaient.

Beaucoup de joie profonde autant chez les jeunes, les catéchistes, que chez les gens d’Ambodimanodila.

Je crois que Victor était très ému et aussi étonné de voir la manière de faire la mission. Dans son mot après la communion, il a évoqué les divisions dans sa famille suite à des questions d’héritage, sa famille étant présente, et il a pu saluer de nouveau un oncle qui ne lui parlait plus.

L’après-midi : relecture avec les mêmes questions qu’à Ikalalao (voir ci-après). Le lendemain, messe avec toutes les communautés de Befeta présidée par Victor.

4.3 Relecture le samedi soir

Après avoir lu la suite de l’Evangile de l’envoi en mission des 72, quand Jésus réunit ses apôtres et leur fait raconter ce qu’ils ont vécu, l’après-midi a été consacrée à la relecture par équipes. Ensuite, nous avons inclu la remontée des équipes dans l’office de Vêpres. Avant chaque psaume ou cantique, 2 équipes partageaient leurs réponses à partir des questions suivantes :

–     Où ai-je vu des signes de l’œuvre de l’Esprit Saint pendant les visites ?

–     dans la vie des gens rencontrés ou dans les Actes des Apôtres, ai-je perçu quelque chose de l’appel de Dieu ?

–     quelles décisions à partir de là ?

Mpiadidy Philibert et moi-même ont partagé notre relecture avant le cantique de Marie. Ce qui revenait aussi bien à Ikalalao qu’à Befeta :

  • Signes de l’œuvre de l’Esprit Saint :
  • la joie dans nos cœurs et dans ceux des gens visités ;
  • nous n’avions pas honte, pas peur pour parler aux gens ou jouer les Actes des Apôtres ;
  • dans certains hameaux, on voyait des gens profondément croyants ;
  • l’accueil des gens, tous les dons en argent, nourriture, qu’ils faisaient, y compris des familles protestantes.
  • Appels :
  • en voyant des hameaux où presque personne ne savait lire, ou les gens disaient ne pas prier, ne pas aller à la fiangonana, on se dit qu’il faudrait faire quelque chose, que d’autres les visitent ;
  • en voyant la joie des gens à se retrouver, j’ai fait part de l’expérience des gens du Brésil qui font des « groupes bibliques » et qui se retrouvent une heure toutes les semaines dans tous les hameaux pour prier une heure en lisant un texte d’Evangile, partageant les « Paroles de vie » et les lumières, les intentions de prière. Ils le font le mardi soir, mais pourquoi ne pas chercher quelque chose du même type dans les hameaux qui y seraient pêts ? Pourquoi ne pas le faire le jeudi (symbolique du jeudi saint) pour ne pas être trop prêt du dimanche et que ça ne remplace pas la prière à la fiangonana mais soit un appel pour y aller.
  • Malgré les visites, l’Eglise d’Ankarana était loin d’être pleine et nous avons croisé Zakeu, qui était responsable dans cette communauté et est entré dans une secte évangélique. Il est important d’aider les gens à connaître la fondation de l’Eglise dans les Actes des Apôtres, d’aller les visiter.
  • J’ai relancé l’appel par rapport à la maladie alcoolique et parlé du chemin des sessionnistes qui s’aident à devenir abstinents.
  • Décisions des jeunes et adultes ayant fait la mission :
  • Acheter le Nouveau Testament pour ceux qui ne l’ont pas, faire cahier de vie ;
  • Lancer une équipe F.E.T. et/ou aller faire des missions dans les hameaux avec les enfants ;
  • Appeler les gens à prier dans le hameau ;
  • Avancer vers la vie religieuse pour ceux qui sont sur ce chemin.
  • Pour deux, décision de venir participer aux sessions du Centre de Promotion Rurale d’Ikalalao

Le courage de Pierre et Jean pour annoncer l’Evangile malgré la prison et obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes, la guérison du paralytique aidé à se remettre debout, à sortir de ce qui le paralyse, le mensonge qui tue, la lapidation d’Etienne priant avec les mots de Jésus, puis le chemin de Philippe s’approchant de l’Ethiopien et faisant route avec lui, la conversion de Saul, ont touché les cœurs. Des jeunes et adultes ont acheté 4 bibles, 6 nouveaux testaments et il faut que je renouvelle le stock. Tous demandent à faire d’autres missions.

Les catéchistes devaient avoir une réunion entre eux avec le Mpiadidy pendant la mission. Philibert a fait le choix que leur réunion consiste à participer tous à la mission et ils étaient manifestement très marqués.

4.4 Accompagnement d’aspirantes à la vie religieuse et de séminaristes au cours de la mission :

A Ikalalao, parmi les 5 jeunes filles, il y avait Florentine, 17 ans. Je l’avais repérée avec son dynamisme lors des sessions d’une semaine chaque mois au Centre de Promotion Rurale. J’étais passé visiter sa famille quand son père venait de mourir et, bien qu’elle soit la cadette, c’est elle qui avait mené l’accueil puis la prière avec beaucoup d’autorité. Je l’ai aussi vu animer avec beaucoup d’amour et de force une équipe d’enfants pendant la retraite de première communion, j’avais vu son « Cahier de Paroles de Vie » tenu très fréquemment depuis 9 mois, dans lequel elle marquait aussi les lumières qu’elle trouvait dans l’Evangile, et je m’étais dit que j’allais essayer de parler avec elle, mais elle avait pris les devants et était venu me dire :

–     « J’aurais voulu être religieuse mais ma maman m’a dit que ce n’était pas possible car j’étais trop pauvre et que je n’avais pas pu étudier au-delà du CEP ».

Depuis, elle a découvert le Prado et qu’il n’y avait pas besoin d’avoir le bac ou le bepc et elle s’apprête à faire un stage en communauté. Elle a vécu la mission avec une intensité qui m’a émerveillé.

Il y avait aussi Mr Christian (formateur au centre d’Ikalalao). Il est aussi en recherche de vie religieuse après deux essais qui n’ont pas abouti, entre autre à cause de son niveau scolaire (CEP). Il a commencé une réflexion pour être laïc consacré du Prado, ayant la même vie que tous les laïcs, mais faisant le choix de suivre le Christ au milieu des pauvres dans le célibat consacré à l’école du Père Chevrier.

Cette mission en petit comité a été un temps particulièrement propice pour accompagner Mr Christian et Florentine.

Parmi les 79 personnes, il y avait 2 aspirantes à la vie religieuse et 5 petits séminaristes originaires de notre district plus un autre originaire d’un autre diocèse et en vacances à Befeta.

A Befeta, le premier réflexe des séminaristes a été de chercher un lit dans le presbytère, de penser qu’il y aurait un repas à part pour eux avec le prêtre, de vouloir diriger. Il a fallu leur indiquer un autre chemin et j’ai pris un temps de relecture spécifique avec eux le samedi soir.

Au moment de la relecture finale avec tout le monde, une des choses qui est revenue dans les expressions de plusieurs des 6 équipes : « Ce qui a été super, c’est qu’il n’y avait personne à part ; le mpiadidy et le prêtre ont mangé avec nous, comme nous ; on était tous ensemble. Il n’y en avait pas qui était « au-dessus des autres ».

Je ne pouvais pas ne pas penser au travail du Père Chevrier avec les jeunes qu’il accompagnait vers le ministère ou la vie religieuse au milieu des autres jeunes. Je ne pouvais pas non plus ne pas partager ses questions sur la formation des prêtres de son temps qui éloignait les jeunes des pauvres et d’une vie simple au milieu et avec les pauvres, en vivant comme eux.

Pourquoi cette tradition des prêtres, des religieuses, mis à part, mangeant mieux que les autres, servis et non pas signes du Christ lavant les pieds de ses apôtres et choisissant la dernière place ?

En plus des 8 petits séminaristes et aspirantes à la vie religieuse, à la messe du dimanche, il y avait 3 séminaristes en théologie à Vohitsoa, un séminariste qui étudie à Yaondé pour être O.M.I. et une religieuse carmélite, tous originaires du district de Befeta… Sans oubier Victor qui présidait… Impressionnant !

4.5 Une expérience de la Providence

J’ai invité les 5 jeunes qui ont fait la première mission à venir sans kapoaka de riz et de tsara maso parce que j’avais senti qu’ils avaient envie de faire la deuxième mission mais ne pouvaient pas apporter la quantité demandée à deux missions consécutives en période de soudure. Je comptais aussi sur eux pour aider les autres, peut-être peu nombreux comme à Ikalalao, que nous allions trouver à Befeta. 6 autres jeunes sont venus sans nourriture. Avec les dons faits spontanément par les gens visités, y compris par des protestants, il semble, bilan encore provisoire, que les dons ont compensé les sorties ou les non entrées. C’est quelque chose que j’ai déjà constaté d’autres fois et qui m’étonne toujours.

5. Conclusion et perspectives :

Jésus a exulté sous l’action de l’Esprit Saint en voyant les apôtres revenir de mission. Il y avait quelque chose de cela dans mon cœur, dans celui des Mpiadidy.

Je sais bien que nous n’en sommes qu’au début, mais j’espère que cela suscitera des initiatives chez les catéchistes, les responsables F.E.T., à commencer par la période de Noël. L’an dernier, le 24 décembre, dans les 36 fiangonana du districte, les jeunes ont mis en tableau vivant l’intégrale des chapitres 1 et 2 de St Luc plus quelques extraits de Matthieu.

Cette année, s’il était possible que, le 23, dans toutes les fiangonana, ils s’organisent pour aller visiter tous les hameaux, jouer le passage de la naissance de Jésus, interpeller les gens en leur demandant s’il y a place chez eux pour que le Christ puisse naître, comment préparer cette place, et inviter à la célébration avec tableau vivant de Luc 1 et 2 à la Fiangonana le 24, et à la messe de Noël au Centre le 25, ça pourrait être une belle suite…

En attendant d’entendre que des équipes F.E.T. se sont effectivement lancées dans des visites aux enfants des villages.

« Annoncer aux pauvres la richesse de Jésus-Christ »… Quel annonce de la richesse de Jésus-Christ aux responsables dans la société ? (Armand Tsontso, Ambanja)

Lors d’un partage d’Evangile à partir de le rencontre entre Philippe et l’eunuque Ethiopien (Actes des Apôtres 8, 26-40), Armand Tsontso a repris l’accompagnement de ceux qui sont en responsabilité dans la société. Nous le joignons aux récits sur le thème de notre Assemblée : « Annoncer aux pauvres la richesse de Jésus-Christ »

Dans cette péricope, on nous parle de l’ange, du grand chef païen, de Philippe. Entre ces trois personnes, il y a l’appel.

Le Seigneur envoie Philippe et lui dit : « Pars… ». Pars sur une route déserte ? C’est curieux. Une route abandonnée ? En tous cas, une route qui sort de Jérusalem et n’y amène pas.

Et il rencontre quand même une personne, un haut fonctionnaire païen, étranger. C’est quelqu’un qui est venu de loin en pèlerinage et qui en revient. Il est dit qu’il lit l’Ecriture. Une grande remarque. Le poids, l’importance de la Parole de Dieu en nous, en nous tous, y compris chez les païens.

Et il tombe sur le prophète Isaïe.

Philippe est envoyé à cette personne.

Les réactions de Philippe : avance et rejoins ce char… cela dit le statut de cette personne… pas n’importe qui. Il n’est pas à pied ou sur un âne. Il a son honneur, son grade, son influence dans son pays.

Et Philippe qui est pieds nus doit monter sur le char.

Ce ne sont pas seulement les chrétiens, les Juifs, qui cherchent Dieu et que Dieu cherche. Cet homme aussi. Et c’est un homme riche… On peut ne pas le vouloir, mais cet homme riche cherche Dieu.

Et Philippe questionne comme il aurait questionné un enfant : « Comprends-tu vraiment ce que tu lis ? »

Et le païen accueille Philippe.

Je me suis arrêté là. Philippe ose s’adresser à cette personne dans sa grandeur en lui parlant comme à un enfant… Si Philippe avait été raisonnnable, il aurait hésité à s’approcher et à lui parler.

L’Esprit Saint rend fou, mais Philippe n’est pas fou, c’est Dieu qui l’amène à aborder cette personne

De là, je fais la relecture de mon ministère.

Là où je suis, à Antsohihy, les grands de ce monde sont petits. Celui-là, il avait la Parole de Dieu dans les mains, et les miens ? Mais moi, souvent je m’éloigne d’eux, ou je ne m’approche d’eux que pour les choses matérielles. Jamais je ne m’approche d’eux pour les choses spirituelles. Jamais je ne leur ai proposé de partager la Parole de Dieu. Ils n’ont jamais l’occasion qu’on les approche pour les choses spirituelles, pour rencontrer Jésus. On ne leur propose pas Jésus.

Comment pourrai-je savoir si personne ne me présente Jésus ? C’est un peu ce que disait Paul dans sa lettre aux Romains : « …Et comment croiraient-ils en lui, sans l’avoir entendu ? Et comment l’entendraient-ils, si personne ne le proclame ? » (Rm 10, 14-19) Voilà ce qu’ils peuvent me dire.

Il y a peu d’occasion pour les grands d’entendre la Parole de Dieu. Le petit peuple a dix fois plus de propositions que les grands de ce monde. Souvent, on fait des propositions et tout s’annule après. Aujourd’hui, je prends conscience de ça. Quel ministère de la Parole de Dieu auprès des grands, jusqu’aux sacrements ?

J’ai eu l’occasion de préparer le mariage du précédent chef de (…). Il est venu pour se marier.

–     Tu es baptisé ?

–     Non.

–     On va préparer.

–     Mon Père, je n’ai pas le temps.

Et puis je me suis adapté à son rythme, en l’accueillant quand il était de passage. Et j’ai découvert que cet homme était heureux de découvrir la personne de Jésus, son enseignement. Je lui ai offert la Bible.

Ces grands monsieurs et dames, c’est peut-être nous qui n’osons pas nous approcher d’eux. Ils sont grands et riches, mais ils sont pauvres car on ne leur propose pas le Christ.

Je suis en train de préparer un mariage, celui du (…). Il est toujours là de passage, mais il est content que je me libère pour l’accueillir, que nous puissions lire la bible avec eux.

 

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