Chers amis,
Aujourd’hui, nous nous souvenons du moment où Antoine Chevrier a acheté la salle de balle mal famée du Prado, dans le faubourg de la Guillotière. Dans une lettre à Claude Farissier, un des quatre premiers prêtres formés au milieu des « gônes » de la Guillotière, il écrit :
Le 10 décembre, nous avons eu notre fête particulière, l’adoration perpétuelle du St Sacrement. Nous avons fait coïncider cette fête avec le jour de notre prise de possession du Prado. Il y a 12 ans, à pareil jour, je pris possession de ce lieu, c’était le jour de la solennité de l’immaculée Conception et, en même temps, le jour de Notre-Dame de Lorette ; n’ayant d’autre ressource et d’autre appui que la confiance en Dieu, convaincu que si je donnais le pain spirituel aux âmes, Dieu nous donnerait le pain, je tremblais bien ce jour-là, Dieu me cachait bien des peines et des tribulations, depuis ce temps il s’est passé bien des choses dans ce lieu, quelques âmes s’y sont converties, c’était là tout mon désir ; on y a beaucoup travaillé et peu fait d’ouvrage.
Toutefois, au milieu de tout cela, j’ai toujours demandé à Dieu qu’il fit naître un noyau de prêtres, pauvres et dévoués, qui n’aient d’autres pensées et d’autres désirs que se dévouer au salut des âmes, à la gloire de Dieu, en vivant dans la pauvreté et le sacrifice, qui doivent travailler pour Jésus-Christ, avec Jésus-Christ, pour continuer sur la terre sa vie de sacrifice, de dévouement et de charité ; devenez d’autres Jésus Christ, étudiez-le, c’est votre modèle. Visitez souvent en esprit la Crèche, le Calvaire et le Tabernacle, pour y puiser l’esprit et la vie qui doivent vous animer pour toujours. Croyez que dans mes prières et mes sacrifices vous avez toujours la plus large part. Je vous demande aussi une bonne part des vôtres.
Cela fait 25 ans que j’ai commencé ce compagnonnage avec le Prado. Je me sens bien loin de cet idéal dont parle Antoine Chevrier, mais toujours aussi attiré que quand j’ai fait mon engagement dans la chapelle du Prado, le 10 décembre 1989.
1. Lancement du Prado du diocèse de Cachoeiro de Itapemirim
Aujourd’hui, nous nous sommes réunis pour notre première rencontre de Prado du diocèse de Cachoeiro de Itapemirim. 10 avaient annoncé leur intérêt… un seul est venu, très accroché, très intéressé, et qui a demandé à entrer en première formation du Prado. Jusque là, toutes nos rencontres se faisaient une fois par trimestre avec le Prado de tout l’Etat do Espírito Santo. Dorénavant, nous nous rencontrerons une fois par mois par diocèse sauf 3 fois où la rencontre aura lieu pour tout l’Etat.
Nous sommes donc 4 :
– Juarez qui termine sa première formation et qui est vraiment la perle qui m’a été donnée ici, il y a 2 ans maintenant, avec qui j’ai beaucoup de joie à vivre le ministère.
– Antenor, qui termine son année de reprise avec nous et repart pour la Bahia lundi prochain. Il nous aura rendu bien des services, même si nous avons eu à cœur de le provoquer à vraiment vivre une année de retraite, d’étude d’Evangile. Il aura été un frère très agréable dans une vie fraternelle.
– Wagner, prêtre de la paroisse voisine, qui demande à entrer en première formation et souffre beaucoup avec un des nombreux prêtres en difficultés dans cette Eglise du Brésil.
– et moi-même.
Comment parler de manière juste de ces fragilités d’une Eglise jeune, ayant beaucoup de jeunes prêtres ? Il y a bien sûr nombre de prêtres dévoués, attachés au Christ. Mais la manière d’appeler au ministère dans un pays où beaucoup sont pauvres, où le prêtre est adulé, riche en comparaison du peuple, où, dans le même temps, les tentations sont très fortes, attire des personnes n’ayant pas forcément la vocation, la perdent en cours de route, ou la vivent d’une manière bien éloignée de ce qu’Antoine Chevrier pressentait comme une urgence pour que tous découvrent l’amour du Christ.
Je sens fortement cette nécessité de partager une spiritualité profondément diocésaine comme celle d’Antoine Chevrier, si adaptée à un tel pays, qui m’aidait tant en France aussi. Nous avons vraiment besoin de nous aider à rester pauvres, à passer des heures dans l’Evangile, à nous encourager à mettre l’Evangile dans la main des pauvres et à écouter ce que l’Esprit-Saint fait naître, à tenter de résister à la mentalité qui marque si fort ceux qui animent les diocèses.
J’ai la chance en tous cas de recevoir ce que je cherchais au Prado, des frères qui m’aident à chercher à suivre le Christ quand je sens si fort que ma fragilité m’en éloignerait. Cette fraternité qui m’a vraiment aidé à entrer dans l’Eglise du Brésil, je l’ai trouvé très fortement dans le compagnonnage avec Juarez (avec Olimpio aussi, mais nous nous voyons moins).
Je continue avec beaucoup de joie le soutien mensuel par conférences téléphoniques Internet avec 3 autres prêtres français partis en même temps que moi en Algérie, Uruguay, Bolivie.
2. Changements dans l’équipe
Je viens d’être officiellement nommé responsable de la paroisse de Dores, mais je continue à être vicaire à Guaçuí où je célèbre le lundi et le jeudi soir, et à trouver là ce soutien d’une vie fraternelle.
Nous avons la chance de partager cette recherche avec une communauté de Sœurs Sacramentines de Bergame. Je travaille plus directement avec Sœur Maria do Socorro, une jeune sœur habitée par le Christ, et ayant un impact fort sur les jeunes, les enfants. Margarida, responsable de la communauté de Guaçuí va partir pour une autre mission. Une autre responsable va arriver ainsi qu’une quatrième sœur qui va venir s’investir plus sur Dores avec Socorro.
3. Annoncer l’Evangile dans la gestion matérielle
La paroisse de Dores a été sinistrée par un prêtre ayant de multiples problèmes, à qui l’évêque a dû retirer la paroisse il y a 7 ans. Depuis, il avait été accueilli dans le diocèse voisin, mais l’évêque voisin vient de lui retirer la charge de la paroisse où il a reproduit les mêmes problèmes. Ce prêtre a une soixantaine d’années.
Cela, avec de multiples autres facteurs, a laissé la paroisse de Dores sans argent. La tentation des gens est de ne pas donner au denier de l’Eglise mais de faire des lotos, de faire appel aux politiques pour qu’ils fassent des dons « visibles » pour construire des chapelles dans chaque communauté. Il y a la tentation de chercher à avoir la chapelle plus grande, plus belle que la communauté voisine, tout cela « pour la gloire de Dieu ».
Là encore, une telle analyse est incomplète : elle ne dit pas toute la générosité et la foi des plus pauvres qui partagent ce qu’ils ont pour construire leur communauté, prier, et qui vivent une foi impressionnante.
Depuis le début de l’année, nous avons lancé une campagne de réflexion pour voir comment vivre de manière juste cette dimension matérielle, découvrir le « denier de l’Eglise ». Nous le faisons en refusant les arguments fondamentalistes utilisés par de nombreuses Eglises protestantes (Caïn n’avait pas donné un bon denier et il n’a pas été accueilli par Dieu… Si tu donnes largement, plus jamais tu ne seras pauvre, etc.), et que, malheureusement, notre diocèse répercute.
Nous essayons d’aider les gens à réfléchir sur ce qu’est être chrétien, vivre l’Evangile, accepter de participer à la mission, ne pas avoir le souci seulement de construire sa chapelle, mais participer aussi des frais de formation, de la mission, du diocèse, et partager 5 % du fond paroissial avec les pauvres par le biais de la conférence Saint Vincent de Paul.
Au mois d’août, un homme à qui nous avions pourtant retiré la responsabilité de trésorier, a commis beaucoup d’infractions graves pour construire la chapelle de sa communauté, profitant de sa réputation d’homme de prière, profitant de la tentation des membres de sa communauté d’avoir une église plus belle que les autres. Il a mis les finances de la paroisse en danger et je remercie ceux d’entre vous auxquels j’ai fait appel et qui m’ont aidé à passer ce cap.
Une phrase de l’Evangile a beaucoup résonné pour moi à ce moment-là : « quand il y aura de multiples difficultés, des catastrophes, cela vous donnera l’occasion de rendre témoignage » (Lc 21,9-13)
De fait, cet événement a été l’occasion de beaucoup réfléchir avec toutes les communautés, d’annoncer l’Evangile, d’aborder toutes ces questions sans détour.
Lors de l’assemblée paroissiale d’hier, tout le monde a confirmé le travail visant à en finir avec toutes les manières pour gagner de l’argent qui ne correspondent pas à l’Evangile, à renoncer à tous les dons visibles qui amènent les plus riches à se mettre en évidence, à aller moins vite dans la construction des chapelles, à rechercher plus de simplicité dans les constructions, à vivre une vraie solidarité entre les communautés, à mettre en premier la solidarité avec les plus pauvres, la mission, la formation de laïcs, pour cela à renoncer à des traditions fortement ancrées.
Un responsable de communauté a dit :
– « Je suis totalement d’accord, mais quand je vais rentrer dans ma communauté, je vais me faire critiquer. Je ne peux pas voter cela, car je vais me faire critiquer. »
Un autre a pris la parole pour expliquer comment il avait répondu à quelqu’un qui voulait faire un don important de manière visible, en nature, pour que ça ne risque pas d’être partagé avec les autres communautés, qu’il n’accepterait son don qu’en argent, dans le secret de l’enveloppe du denier de l’Eglise pour qu’il soit partagé. Il a préféré perdre ce don que de ne pas vivre l’Evangile.
De là a surgi une réflexion sur le rôle du responsable de la communauté de base : il n’est pas délégué de communauté, mais élu comme étant celui que l’Esprit-Saint nous donne et chargé de nous aider à vivre l’Evangile, chargé d’être « Pasteur » et forcément amené à connaître la croix, à se retrouver en opposition parfois avec la majorité de sa communauté, au nom de l’Evangile.
Derrière ces quelques lignes, ce sont des heures de palabre de communauté en communauté, pour permettre aux gens d’exprimer leurs incompréhensions, et, en exposant des situations très concrètes, faire toujours la même question : « Qu’est-ce qui vous paraît juste, conforme à l’Evangile ? »
Exemple de questionnement dans une communauté qui avait fait travailler des entreprises sans déclarer, sans payer les charges sociales :
– « Prendre le risque qu’un ouvrier ait un accident sans être assuré, de refuser de payer la pension de ceux qui sont à la retraite, de ceux qui sont malades, c’est juste ? C’est conforme à l’Evangile ? »
Et d’appuyer ce questionnement avec des paroles des divers prophètes sur les sacrifices que Dieu souhaite : la justice, le respect du pauvre.
Je ne m’étais jamais tant préoccupé d’argent. Je n’avais jamais tant senti qu’il ne s’agit pas seulement d’une question matérielle, mais d’un lieu très concret pour annoncer l’Evangile. C’est Jean-Baptiste qui nous exhortait dimanche à ne pas seulement se dire « fils d’Abraham », mais à produire des fruits qui prouvent notre conversion.
Le « leilão », vente aux enchères qui se fait lors des fêtes de communautés ou après les messes, est une forme de don traditionnel qui pose problème et que le Conseil Pastoral Paroissial avait choisi d’interdire. Quelqu’un offre quelque chose (veau, poule, nourriture), et tout le monde sait qui a offert. Ensuite, on fait une vente aux enchères et celui qui peut mettre le plus d’argent récupère le lot. L’argent va à la paroisse, du moins restait dans la caisse de la communauté de base sans être partagé. Trois communautés se sont révoltées contre « l’interdiction par le prêtre de cet élément important de la culture ».
Lors de l’assemblée paroissiale, nous avons pris un long temps de débat sur le chemin que le C.P.P avait décidé à l’unanimité des membres présents. Quelqu’un d’une autre communauté a pu expliquer comment, étant pauvre, il avait été humilié par cette pratique, parce qu’il voyait les lots passer, et il ne pouvait jamais en bénéficier.
Alors que 90 % des participants à l’assemblée étaient pour la confirmation de cette interdiction, j’ai proposé que la décision ne soit pas prise immédiatement, mais qu’une réflexion ait lieu dans chacune des 3 communautés qui contestaient cette décision avant qu’un vote ait lieu au prochain C.P.P.
Ce dimanche 9 décembre, dans l’une des trois communautés, lors de l’heure de partage avant la messe pour relire avec la communauté les signes de l’action de l’Esprit-Saint au cours de l’année, voir comment avancer l’an prochain à partir des appels perçus, en m’aidant d’un tableau, j’ai repris tout le chemin fait depuis un an. La responsable a fait écho aux réflexions des autres communautés. A la fin : unanimité pour renoncer au leilão.
J’ai aussi senti combien il me fallait prier pour arriver à aimer, écouter, ne pas humilier. Un responsable de communauté, défendant une manière de gagner de l’argent a dit :
– « Vous savez parler, vous avez une formation. Nous n’osons pas répondre devant vous. Les gens critiquent après. »
Les multiples visites faites dans toutes les communautés, les heures à écouter, lui ont permis de dire cela et de dire aussi combien ils appréciaient notre équipe par sa simplicité, par les visites faites.
Nous n’avons pas encore de chiffre global, mais le denier de l’Eglise a augmenté de 50 % dans de nombreuses communautés avec une augmentation aussi bien du nombre de personnes qui donnent que de la somme partagée par chacun.
4. Mission des jeunes
Lors du dernier courrier, j’annonçais la 4ème mission des jeunes de l’année, dans la ville de Dores cette fois-là. Ce sont 110 jeunes qui ont vécu cette mission :
– Méditation de la mission de Paul à Philippe pour se préparer à passe de maison en maison :
- Comment s’y est-il pris ? Quelles lumières pour nous ?
- Il va rencontrer les gens là où ils sont
- Il connaît le nom de Lydie, ce qu’elle fait, sa foi… il a donc écouté, et non pas d’abord été préoccupé de parler. Le texte dit même qu’il s’est assis. Les jeunes ont été invités à noter ce qu’ils avaient découvert de la famille entre deux visites et éventuellement à faire une fiche de signalement pour le « Circuit Biblique local » ou pour l’équipe pastorale
- Il a prié
- Accueillant la foi de Lydie, du gardien de la prison, il a proposé le baptême, les sacrements
- Il a connu aussi la persécution, etc.
- Quelle « parole de vie » ?
– Des adultes, membres des « circuits bibliques » avaient compté les maisons de la ville et organisé une répartition pour que toutes les maisons soient visitées. Ce sont 33 équipes de 3 ou 4 jeunes qui ont sillonné la ville tout le samedi. Chaque circuit biblique avait prévu une maison pour accueillir les jeunes pour les repas et pour dormir.
– Ils ont été aussi bien dans les maisons des personnes catholiques que protestantes, « espirite », ou non croyantes. Ils avaient été invités à ne surtout pas faire de prosélytisme, de polémique, et à adapter leur proposition à la famille rencontrée. Ils ont presque partout été très bien reçus, avec des moments de prière forte avec des personnes d’autres religions.
– De maison en maison, ils essayaient de faire connaissance, proclamaient le texte de la conversion de Paul (Ac 9), partageaient la « parole de vie », les intentions de prière, priaient le Notre Père puis bénissaient la maison. Ce sont des « litre d’eau bénite » qui ont été répandus. Ce serait inimaginable en France…
– les enfants de la ville qui préparaient leur première communion (10 à 12 ans) ont été invités à se joindre aux aînés. C’est une manière de leur faire percevoir que les aînés n’ont pas arrêté une vie d’Eglise. C’était aussi une manière de faire une première sensibilisation pour fonder « l’Enfance Missionnaire » (Mej)
– Une femme de 70 ans, s’est agenouillée devant une jeune de 15 ans, lui a dit qu’elle n’avait jamais pu découvrir la foi, qu’elle souhaitait que le prêtre passe, et a demandé à cette jeune de la bénir.
– Ailleurs, une équipe a relancé un Circuit Biblique qui ne se réunissait plus.
– après le dîner à 18h dans les maisons, les jeunes ont invité toute la ville à participer d’une veillée de prière au cours de laquelle ils ont proclamé l’histoire de Paul, comme dans les autres missions, et chanté. Et là, ils ont fait l’expérience de Paul. Quand les Eglises des communautés rurales rassemblaient toute la communauté et débordaient, seuls 15 adultes se sont déplacés…
– le dimanche matin, temps de récollection
- Lecture d’une contraction de la lettre de Paul aux Philippiens (j’avais enlevé quelques passages pour raccourcir un peu)
- Temps personnel pour chercher des « paroles de vie » et partages par équipes. Ce qui est impressionnant, c’est qu’avec 110 jeunes adolescents et préadolescents dans un gymnase, l’animation se passait sans aucune difficulté. Tous étaient dans le coup. Nous étions 3 adultes pour animer.
- Temps de rédaction de lettres à Saint Paul, pour répondre à sa lettre aux Philippiens. Et proclamation de quelques lettres de toute beauté. C’est impressionnant combien ils se retrouvaient de plein pied avec cette lettre, cet appel à connaître le Christ, cet appel à avoir une vie qui corresponde à cette connaissance du Christ qui surpasse toute connaissance. Une très jeune s’est laissée toucher par la contemplation de Paul du Christ qui se fait obéissant jusqu’à la mort sur la croix. Je faisais une fois de plus l’expérience que la parole de Dieu, l’Evangile, les lettres de Paul, peuvent vraiment parler aux hommes et femmes d’aujourd’hui, aux jeunes.
- Après, proposition de 4 débats sur des thèmes choisis par eux :
- L’alcool et la drogue à partir de notre vie concrète
- Les préjugés
- Les relations parents enfants
- L’avortement, « namorar » aimer, mais je ne sais pas traduire complètement la nuance de ce verbe. Cela a été une première occasion pour moi de questionner sur ce qui les aidait à aimer en se construisant mutuellement. J’ai demandé ce qu’ils pensaient d’un « namor » entre un gars de 21 ans, 25 ans, 40 ans et plus et une fille de 12 ans, 13 ans, situation extrêmement courante au sein même de notre groupe. Réponse : s’ils s’aiment, où est le problème ? C’est une des questions qui me préoccupent. Je ne parle pas du nombre d’avortements, de grossesses chez des adolescentes.
– le dimanche après-midi, temps d’animation avec les enfants du caté de toute la paroisse. Ce temps a été plus difficile à animer.
– à 16h, messe avec la centaine de jeunes, les 120 enfants du caté de toute la paroisse, leurs familles, soient 500 personnes. Grippé depuis le matin, je me suis retrouvé complètement aphone à partir de midi et je donnais mes indications en écrivant sur un papier. Antenor a présidé, mais ce sont les jeunes qui ont fait l’homélie en lisant quelques-unes de leurs lettres et en racontant telle ou telle visite qui les avait touchés.
5. Quelques-unes des « lettres à Saint Paul » publiées dans le journal paroissial
Karina :
« Olà, Paul ! Je suis de nouveau ici, essayant de suivre tes pas et portant la parole de Dieu à ceux qui croient et à ceux qui ne croient pas. Une phrase de ta lettre m’a beaucoup touchée :
“Non que j’aie déjà obtenu tout cela ou que je sois déjà devenu parfait ; mais je m’élance pour tâcher de le saisir, parce que j’ai été saisi moi-même par Jésus Christ.” (Ph 3,12)
Personne n’est parfait, mais nous essayons de faire le meilleur que nous pouvons. Je suis venue ici parce que je le voulais, mais, au fond de mon cœur, j’ai entendu un appel : c’était Jésus-Christ qui me demandait de venir et de faire ce que nous avons fait, et je fais l’expérience que c’est bon et gratifiant. Merci beaucoup. »
Anonyme :
« Paul, j’ai reçu ta lettre aujourd’hui, et ma joie a été si grande, parce que tu nous montres un monde nouveau et meilleur, que, parfois, pris par les choses terrestres, nous ne voyons pas. De fait, suivre ton exemple est difficile, mais pas impossible. Tu nous donnes l’exemple que la foi est capable de transformer le monde avec cette parole :
“Au reste, frères, tout ce qu’il y a de vrai, tout ce qui est noble, juste, pur, digne d’être aimé, d’être honoré, ce qui s’appelle vertu, ce qui mérite l’éloge, tout cela, portez-le à votre actif.” (Ph 4,8)
Tu nous montres que par des actes simples, nous pouvons devenir des personnes meilleures. Paul, je te remercie, parce que tu me montres une fois de plus que si nous reflétons tes sentiments, nous pouvons vivre plus heureux.
C’est la quatrième mission et la dernière de l’année. Comme les autres, elle a été merveilleuse. Nous avons fait des connaissances, trouvé des amis. Nous avons permis à des personnes qui avaient déjà la foi de se fortifier, à d’autres qui ne l’avaient pas, de découvrir la foi.
Merci, mon Dieu, d’avoir envoyé Pe Bruno, Maria do Soccorro et Rita, dans nos vies, parce qu’ils nous enseignent beaucoup et nous aident quand nous en avons le plus besoin. Je remercie toutes les familles qui nous ont accueillis chez eux. Que Dieu les illumine tous ! Et qu’il y ait d’autres missions comme celle-la, parce que les missions nous apprennent beaucoup et unissent les jeunes avec un unique idéal :
« Connaître et aimer Christ plus que tout » (Ph 2,10 et 3,7-9) »
Suelen
Cher ami Paul,
Une fois de plus, je suis ici, réfléchissant à partir des tes paroles. Un verset m’a touché très fort :
“Alors comblez ma joie en vivant en plein accord. Ayez un même amour, un même coeur ; recherchez l’unité ; ne faites rien par rivalité, rien par gloriole, mais, avec humilité, considérez les autres comme supérieurs à vous. Que chacun ne regarde pas à soi seulement, mais aussi aux autres. 5 Comportez–vous ainsi entre vous, comme on le fait en Jésus Christ :” (Ph 2,2-4)
Si souvent, nous faisons des choses en pensant recevoir quelque chose en échange. Mais nous ne pensons pas que la plus grande récompense, c’est celle qui vient de Dieu.
Anonyme
« (…) « Je peux tout en Celui qui me fortifie. » (Ph 4,13)
Ce verset m’aide à comprendre que je ne peux arriver à quelque chose, que si Jésus est proche de moi et moi proche de lui pour qu’il me fortifie dans la foi, l’amour, l’unité et tous les sentiments bons. »
Anonyme :
« Paul, j’ai aimé cette parole de toi :
“Mais il s’est dépouillé, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes, et, reconnu à son aspect comme un homme, il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, à la mort sur une croix.” (Ph 2,7-8)
L’homme le plus puissant de la terre est venu en se faisant le plus simple. Il nous montre comment nous devons être à l’intérieur. »
Hévelin :
« L’appel de la mission nous convertit pour annoncer l’Evangile de Paul à nos copains qui ne sont pas venus participer à cette lecture de la lettre de Paul aux Philippiens. C’est important de CONNAÎTRE, ANNONCER CHRIST et vivre de Lui. Merci de m’avoir appelé à cheminer. »
Ana-Maria Aparecida
« Paul,
Ma joie est tellement grande qu’elle déborde de mon cœur, parce que, même étant en prison de manière injuste, tu continuer à témoigner de l’Evangile en disant :
“Car je sais que cela aboutira à mon salut grâce à votre prière et à l’assistance de l’Esprit de Jésus Christ ; suivant ma vive attente et mon espérance, je n’aurai pas à rougir de honte, mais mon assurance restant totale, maintenant comme toujours, Christ sera exalté dans mon corps, soit par ma vie soit par ma mort. Car pour moi, vivre, c’est Christ, et mourir m’est un gain.” (Ph 1,19-21)
Essayer de t’imiter, c’est le défi que nous sommes appelés à accueillir aujourd’hui. »
6. Première Formation du Prado à Florianópolis
A 21h, j’étais dans le bus qui m’a amené lundi 12 novembre à 4h du matin à la gare routière de Rio de Janeiro. Après 8 heures d’attente à l’aéroport, j’ai décollé à 13h pour Florianópolis, ville située sur une île au sud du Brésil pour lancer une équipe de Première Formation du Prado.
Sergio, un des 8 qui avait participé au mois pradosien réalisé en janvier dans la communauté Sainte Isabelle, avait convaincu 3 autres prêtres de commencer une vie d’équipe Prado. Olimpio m’avait demandé d’assurer l’accompagnement de cette équipe.
J’ai du animer sans pouvoir parler, chuchotant, mais les provoquant surtout à raconter l’histoire de leur vocation, pourquoi ils cherchaient du côté du Prado.
Sergio a découvert le Prado en vivant un temps de mission dans la Bahia et en rencontrant Esmeraldo, prêtre du Prado qui a été responsable du Prado du Brésil avant d’être appelé comme évêque d’un diocèse de la Bahia et qui vient d’être nommé évêque de Santarém en Amazonie, dans ces diocèses encore plus marqués par l’injustice et la violence.
J’ai éprouvé un double sentiment :
– je me suis senti très proche d’eux quand ils exprimaient leur questionnement sur la manière d’être prêtre, sur les besoins qu’ils percevaient pour rejoindre les gens, en particulier les plus pauvres ;
– je me suis senti très distant : leur histoire n’a vraiment rien à voir avec la mienne. Les trois venaient de familles nombreuses rurales très pauvres et étaient entrés très jeunes au séminaire.
Nous nous sommes retrouvés dans la « maison des prêtres du diocèse de Florianópolis ». Cette maison, conçue pour que les prêtres du diocèse puissent se retrouver à quelques-uns pour des moments de détente a été payée à partir de dons de l’Eglise d’Allemagne : jardin somptueux, grande piscine couverte, sauna, terrain de football de salle. Ils l’ont présenté comme « l’éléphant blanc » du diocèse, pour dire que cela ne servait à rien et était un scandale. Il y a quelque chose d’équivalent dans le diocèse voisin de Cachoeiro de Itapemirim, diocèse de Colatine.
Les prêtres du diocèse de Cachoeiro de Itapemirim se plaignent que les chaises de la maison de rencontre du diocèse ne soient pas assez confortables, qu’il n’y a pas l’air conditionné. Ils avaient demandé à ce que la retraite du diocèse se fasse de nouveau à 500 km dans une maison de luxe. A plusieurs reprises, j’avais essayé de questionner. Récemment, un autre prêtre est monté au créneau et un vote a amené l’évêque à décider que la retraite aurait lieu dans la maison diocésaine. Je m’en suis réjoui.
C’est un gros investissement humain et financier que d’aller 4 fois dans l’année accompagner ce groupe dans leur découverte des écrits d’Antoine Chevrier, des pratiques du Prado : vie d’équipe, étude d’Evangile, cahier de vie, révision de vie, mais quelle joie et quel ressourcement ! C’est la raison de ma présence ici.
Quand je vois l’argent que le Prado dépense pour aller rejoindre quelques prêtres, il m’arrive de penser au Père Chevrier qui a fait plusieurs voyages à Rome, avec les moyens de l’époque, pour initier 4 séminaristes pauvres, à sa spiritualité du « Véritable Disciple ».
J’ai deux autres sessions à animer ou à suivre à Salvador. Toute la difficulté est de trouver du temps pour préparer.
Nous sommes aussi en train de préparer l’édition en portugais de toutes les lettres d’Antoine Chevrier.
7. Retraite des confirmands, premières communions d’adultes, mariages de personnes cohabitant depuis des années au cours de la messe paroissiale
Après avoir pris un avion jeudi de Florianópolis pour Rio de Janeiro et attendu 10 heures à la gare routière de Rio de Janeiro, j’ai pris un bus à 23h qui m’a amené à Guaçuí à 4h du matin vendredi où j’ai enchaîné diverses rencontres et la messe dans une communauté rurale le soir. Samedi, j’ai participé à la récollection du Conseil Pastoral Paroissial animée et préparée par Socorro.
Dimanche 18 novembre, pendant la messe paroissiale de 8h, nous avons célébré un baptême d’adulte, 3 mariages de personnes qui cohabitaient depuis des années, 15 premières communions d’adultes, fruits des visites faites par divers groupes de maisons en maisons. Parmi eux, plusieurs personnes illettrées, des personnes qui n’étaient pas mariées parce que trop pauvres pour payer aussi bien l’Eglise que le mariage civil. Nous célébrons beaucoup de mariages sans rien faire payer et en demandant une « dispense de mariage civil », pour qu’ils n’aient pas à payer.
A 10h, j’ai rejoint 60 des 95 confirmands jeunes et adultes qui se sont retrouvés pour une récollection. Après un temps de méditation personnelle des lectures qui allaient être faites lors de la confirmation, puis un d’expression par équipe sur leur histoire de foi, ce qui les amenait à demander la confirmation, ils ont écrit une lettre à l’évêque dans laquelle ils exprimaient leur motivation pour demander la confirmation. Cette pratique est très courante en France mais inconnue ici. Elle a beaucoup touché Dom Célio.
Plus de la moitié des jeunes confirmands ont participé à une mission au moins, certains aux 4 et tous ceux qui y ont participé demandent quand sera la prochaine.
Toute la difficulté est de savoir comment animer un groupe qui grandit chaque fois, comment le nourrir et le loger matériellement… Je comprends bien l’inquiétude des apôtres qui voulaient renvoyer la foule…
Un enfant de 8 ans, a dit en parlant de Lucas :
– « Mais qu’est-ce qui se passe ? Il participe à tout maintenant et ne manque pas une messe. Il dit qu’il fera la prochaine mission et qu’il invitera d’autres copains. »
Lucas, fils de la responsable paroissiale de la musique, adolescent rebelle et allergique aux messes et aux activités d’Eglise, s’apprêtait à faire sa confirmation « par obligation ». Il a fini par se joindre à des copains pour faire les visites lors de la mission dans Dores et en est sorti transformé.
8. Quelques lettres de confirmands jeunes et adultes
Gisèle
Cher Dom Célio,
Je ne sais ni lire ni écrire, mais quelqu’un écrit ce que je voudrais vous dire. J’ai commencé à aller à l’Eglise quand j’avais 18 ans. J’ai 23 ans et cohabitais avec mon compagnon. Pe Bruno m’a invitée à me marier. Ça a été très important pour moi. Je me suis sentie aimée par Dieu. Maintenant que je me suis mariée, je sens le désir de toujours participer aux célébrations de ma communauté. Tous les jeudi, moi et mon époux, nous participons au « Circuit Biblique ». Pour nous, c’est toujours un moment de grâce.
Je suis très heureuse car je vais recevoir le sacrement de la confirmation. Chaque fois qu’il y a une messe, j’adore y participer. Sans Dieu, nous ne sommes rien.
Aloisio
Je m’appelle Aloisio. J’ai 24 ans, je suis ouvrier agricole e je prépare ma Première Communion, ma confirmation et mon mariage.
Quand j’ai commencé ma préparation, j’allais au catéchuménat par amour pour mon épouse ; mais, avec le temps, Jésus a touché mon cœur de manière si forte que j’ai un goût immense d’être ici à lire la parole de Dieu.
La phrase de l’Evangile de Jean 15 que j’ai beaucoup aimée est celle-ci : « Demeurez en moi et je demeurerai en vous. »
Claudio
Cher Dom Célio,
J’ai 14 ans, je vais à l’école du matin et, l’après-midi, je travaille dans les champs. J’aime Jésus parce que, sans lui, nous ne sommes rien. C’est Lui qui m’illumine dans ma vie de chaque jour. Je prie cherchant dans sa Parole le chemin pour qu’il ne m’arrive pas des choses qui détruisent dans la vie avec les gens.
Je veux recevoir la confirmation, pour renouveler l’Esprit-Saint, recevoir un second baptême, croire en Jésus et en l’Esprit-Saint.
J’ai été transformé par les missions. Avant, je n’allais pas à la messe, ou je partais avant qu’elle ne finisse. Je veux devenir disciple et missionnaire parce que c’est important de faire quelque chose de sa vie. Etre animateur de jeunes est une bonne chose.
Que Jésus me donne la force pour continuer dans cette mission de vie, qu’il me donne la force pour ne pas suivre le chemin du mal, que l’Esprit-Saint me conduise sur le chemin du bien. Amen.
9. Pastorale de la sobriété
Samedi 25 et dimanche 26 novembre, 40 personnes, jeunes et adultes, de 11 des 15 communautés de la paroisse, ont participé à une formation proposée par la pastorale de la sobriété.
De visite en visite, j’avais été marqué par ce fléau. J’avais commencé une réflexion dans la communauté Saint Sébastien du Cêrro et cette communauté avait organisé deux réunions avec les Alcooliques Anonymes (cf. courriers précédents). Récemment, le responsable de cette communauté m’a appelé pour visiter cette maman, malade de l’alcool, que j’avais visitée juste après mon arrivée à Dores. La situation avait empiré jusqu’à ce qu’elle n’arrive plus à donner à manger à ces 4 enfants. La Pastorale de l’Enfant, qui accompagne les mamans enceintes et ayant des enfants en bas âge a été jusqu’à prendre en charge sa famille et la faire hospitaliser. 3 mois après, elle est ressuscitée, rayonnante, racontant son histoire, s’apprêtant à se marier à l’Eglise.
Il y a un an, le diocèse avait présenté cette dernière création de la C.N.B.B (Conférence Nationale des Evêques (Bispos) du Brésil) et nous avions envoyé 3 laïcs pour se former.
Le C.P.P de juin avait porté totalement sur cette question, provoquant les responsables de communauté à regarder cette réalité dans leur communauté et faisant de la fondation de la « Pastorale de la Sobriété » dans notre paroisse une priorité, et les provoquant à lancer un appel dans leurs communautés pour que des personnes viennent suivre une formation.
40 laïcs du diocèse avaient été se former à la rencontre du diocèse. 40 laïcs de Dores ont participé à cette même formation réalisée sur la paroisse. Une auberge a mis gratuitement ses chambres à disposition des participants pour qu’ils n’aient pas à retourner dormir chez eux. La mairie a mis deux bus à disposition pour le transport de tous ceux qui sont venus des communautés rurales. Certaines sont à 30 km de Dores.
Voilà ce que Elielton a dit lors de l’assemblée de la paroisse, devant les 60 autres responsables et qu’il avait écrit pour le prochain journal paroissial.
Je lis ce texte à la fin de chaque homélie et propose à ceux qui le veulent de se confesser après la messe pour se préparer pour Noël. Que de gens viennent alors parler de cette maladie.
10. Témoignage de Elielton
« Je m’appelle Elielton, j’ai 28 ans. Je suis agriculteur. J’ai commencé à prendre des boissons alcoolisées quand j’avais 11 ans. Au début, je buvais toujours en groupe d’amis. Après, ça a été en augmentant et je buvais seul, toujours en me disant : je bois seulement en étant maître de moi, j’arrête quand je veux.
Mais le temps passait et j’ai vu que ce n’était pas vraiment ainsi. J’ai commencé à rentrer ivre à la maison, parfois plein de boue comme un porc, ce qui donnait une grande tristesse à mes parents. Je suis déjà revenu blessé. J’ai des cicatrices sur le corps et dans mon âme qui jamais ne disparaîtront.
Il y a trois ans, j’ai essayé d’arrêter de boire, mais je n’ai pas réussi. Je sortais le soir et je buvais. Le matin, je me repentais et je faisais la promesse de ne plus jamais boire. Mais, le soir suivant, tout recommençait. J’avais honte de demander de l’aide et je continuais à boire, mentant, n’assumant pas mes engagements, en terminant avec ma vie.
Je suis responsable de communauté de base et ministre de la Parole, et je laisse à désirer dans mes responsabilités à cause de l’alcool. Quand j’ai entendu le Père Bruno parler de la fondation de la Pastorale de la Sobriété, j’ai pensé : comment je vais parler pour la communauté si je ne suis pas un exemple, si je suis dépendant de l’alcool ?
J’avais peur et honte de parler de mes problèmes jusqu’à ce que, lors de visites faites par le Père Bruno et la sœur Marie du Secours dans la communauté, quelqu’un les alerte. Peu de temps après, j’ai été remettre ma démission de responsable de la communauté de base et de ministre de la Parole, sans parler de l’alcool, en donnant un autre prétexte. Là, le Père Bruno m’a parlé de l’alcool, me disant que quelqu’un l’avait alerté. Il a refusé ma démission et m’a demandé de faire de cette fragilité un chemin pour annoncer l’Evangile. Il m’a appelé à participer à la formation proposée par la « Pastorale de la Sobriété ».
J’y ai été et j’ai pu constater que j’avais besoin d’aide pour m’en sortir et récupérer la vie. Dans la rencontre, j’ai fait le « premier pas[1] » qui est d’admettre que je suis malade, que j’ai le vice de l’alcool, et que, tout seul, je n’y arriverai pas.
Le dimanche suivant, alors que, comme ministre de la Parole, j’animais la célébration de la communauté, j’ai dit devant la communauté que j’étais malade de l’alcool et que je demandais leur aide.
Ce qui m’a beaucoup marqué, c’est quand, quelques jours après, j’ai été au bistrot où j’avais l’habitude de boire, pour retrouver les copains et qu’ils m’ont proposé à boire. La tenancière du bar a répondu : « Non, il ne va pas boire. Il a demandé notre aide. »
Je ne suis pas guéri, et je ne peux pas dire que j’ai arrêté de boire. Mais le fait d’avoir fait le « premier pas » à travers la « Pastorale de la Sobriété » est déjà une grande victoire.
Si tu as un problème avec l’alcool, comme moi-même, demande de l’aide, n’aie pas honte ni peur de faire le « premier pas ». La « Pastorale de la Sobriété » est prête à t’aider.
11. L’assemblée paroissiale du samedi 8 décembre : reconnaître l’Esprit à l’œuvre en relisant l’année écoulée et discerner ses appels
La réunion du Conseil Pastoral Paroissial d’octobre, rencontre de tous les responsables de communautés de base, et des responsables paroissiaux de mouvements, de pastorales (ministres de l’eucharistie, de la parole, de la musique, de la liturgie, des jeunes, de la catéchèse, de la pastorale de l’enfant (prévention de la mortalité anténatale, périnatale et infantile), pastorale de la sobriété, du denier de l’Eglise, de la famille, et j’en oublie…), a consisté à faire une relecture l’année sous forme de révision de vie :
– où avons-nous vu des signes de l’action de l’Esprit-Saint au cours de l’année ?
– quels appels ?
Suivait une énumération de lieux, d’événements, pour aider chacun à faire mémoire de l’année en sortant de la recherche du « positif ou négatif », du quantitatif, savoir s’il y avait beaucoup de monde ou non.
Par exemple, la crise grave de la communauté Saint Jean-Baptiste a été relue sous l’angle de ce que l’Esprit-Saint avait fait grandir à travers cet événement, et non des 20 000 Reais de dette.
Cela a permis un premier exercice. Ensuite, chacun était appelé à faire le même travail au niveau du conseil de sa communauté, de son mouvement, de sa pastorale. Chacun devait transmettre un compte rendu écrit de cette relecture lors du C.P.P de novembre qui s’est déroulé sous forme de récollection.
Nous avons fait une synthèse de tous ces textes, et, ce samedi 8 décembre, nous avons eu l’assemblée paroissiale avec 60 responsables.
Après un temps d’étude de l’Evangile de ce dimanche, nous avons présenté la synthèse des relectures. Ensuite, en 6 carrefours, chacun a souligné les signes de l’action de l’Esprit-Saint et les priorités à soutenir pour l’an prochain.
Ce qui m’a émerveillé, c’est que les 6 carrefours ont perçus les mêmes signes forts de l’action de l’Esprit-Saint, dont notre arrivée avec Juarez et Maria do Soccorro, l’action de l’Esprit-Saint dans le cœur des jeunes, la fondation de la Pastorale de la Sobriété, la proposition des sacrements aux personnes éloignées.
Tous ont adopté comme thème pour l’année qui vient, le thème de la Conférence des évêques d’Amérique Latine et des Caraïbes qui a eu lieu à Aparecida au mois de mai :
« Disciples et missionnaires du Christ pour qu’en Lui nos peuples aient la vie en abondance ».
Tous ont mis en priorité absolue le soutien aux « Circuits Bibliques ». Il s’agit de la cellule essentielle de l’Eglise ici. Les maisons voisines s’organisent pour partager l’Evangile du dimanche suivant. Chaque semaine, on change de maison pour se réunir. Une communauté de base est formée de plusieurs Circuits Bibliques. La paroisse est constituée de plusieurs communautés de base (25 à Guaçuí, 15 à Dores).
En assemblée, nous avons réfléchi pour que le Circuit Biblique ne soit pas seulement le lieu du partage de l’Evangile du dimanche suivant, mais que ce soit le lieu où se réfléchisse la mission :
– pour aller faire circuit biblique chez des familles éloignées d’une vie d’Eglise
– pour envoyer des membres du circuit biblique visiter les familles éloignées ou en difficultés, pour aller visiter les familles d’autres Eglises, mais sans faire pression, seulement pour soigner la vie fraternelle dans le hameau ;
– pour voir comment soutenir des personnes qui accepteraient ce soutien pour sortir de la maladie alcoolique ;
– pour accompagner des familles dans une éventuelle demande de sacrement, même s’ils sont loin de tous les critères de l’Eglise.
Les autres appels qui ont été repris par tous :
– soutenir les jeunes et les enfants, fonder l’Enfance Missionnaire, continuer les missions
– développer « l’école de théologie biblique »
– développer la « Pastorale de la Sobriété »
Ce qui m’a touché et confirmé, c’est de voir l’unanimité des participants reprendre à leur compte tout ce que nous avions pu pousser avec Juarez et Maria do Soccorro.
12. Ecole de théologie biblique
J’ai déjà présenté ce travail entamé au début de l’année pour former tous ceux qui ont une responsabilité (ministres, responsables de communautés, de mouvements, catéchistes) et tous ceux qui le souhaitent en s’initiant à l’étude d’Evangile à la manière du Père Chevrier. Nous avons lu en suivant l’intégrale de l’Evangile de Luc.
– Ceux qui le peuvent lisent deux chapitres, mettent des titres à chaque passage lu, choisissent et copient une « parole de vie », écrivent éventuellement une prière à partir de tel ou tel verset. Ils pouvaient aussi écrire un fait de vie qui leur parlait de l’aujourd’hui de l’Evangile lu. Cela ne s’est jamais fait.
Les rencontres se sont passées de la manière suivante :
– temps de silence en attendant les derniers où chacun recevait un extrait à relire et à présenter aux autres
– Partage des prières inventées par les uns ou les autres
– lecture des deux chapitres à tour de rôle, paragraphe par paragraphe, par ceux qui venaient de préparer plus, et chacun disait ensuite ce qu’il comprenait de ce passage, aussi ce qu’il ne comprenait pas, les autres pouvant compléter. Pendant ce temps de silence permettant à chacun de parler, je faisais 3 fois la lecture d’un extrait à une personne totalement illettrée. Ensuite c’est elle qui présentait ce passage au groupe.
– Approfondissement à partir de là de telle ou telle question.
– Prière finale.
Ces rencontres ont eu lieu en deux points de la paroisse distants de 30 km. Lors de la troisième rencontre, il y a eu 70 personnes à Dores, 30 à Pedra Menina. Ensuite, les rangs se sont clairsemés et il n’est resté que 15 de chaque côté malgré de multiples rappels. La richesse de ce qui s’est vécu avec ces personnes justifie à elle seule de continuer. Nombre de personnes ont abandonné à cause des difficultés de transport.
Aussi, nous avons décidé de proposer ce travail dans chacune des communautés soit en prenant 2h un autre jour que le jour de la messe mensuelle de la communauté, soit en proposant à ceux qui le souhaitent de rester une heure après la messe mensuelle de la communauté de base.
Ce qui m’a étonné c’est de voir que cette proposition a été accueillie avec enthousiasme. Je ne sais pas si les gens arriveront à y venir dans la durée, mais nous avons prévenu que, même s’il n’y avait qu’une personne, nous assurerions ce service. Avec les deux sœurs, nous allons nous répartir les communautés.
Nous avons essayé de demander un effort exceptionnel l’an prochain en disant que nous allions lire les Actes des Apôtres, texte fondamental qui raconte finalement ce que vivent ces communautés de base.
C’est aussi pour nous une manière de ne pas limiter le contact avec les communautés de base rurales à la célébration de la messe, de connaître mieux les personnes, de les amener à découvrir qu’elles sont capables de prendre la parole, de les armer face à la pression des sectes de tout poil, de les accompagner, de les former comme disciples et apôtres.
13. Ouverture au monde
Lors de l’assemblée paroissiale, Maria-José, responsable de la communauté de base de Dores, a présenté la prochaine « Campagne de Fraternité », campagne lancée pendant le carême mais qui est vécue toute l’année et proposée au niveau de toute l’Eglise du Brésil, qui est soutenue par des publicités sur les chaînes de télévision. Cette année, il s’agit de « défendre la vie » de la naissance à la mort.
Nous avons décidé de d’abord valoriser ce qui se fait déjà, tant au niveau de notre paroisse (Pastorale de la Sobriété, Pastorale de l’enfant, etc.) que de la ville.
Ces derniers temps, j’ai pu me rendre présent à plusieurs événements de la ville, ce qui ne s’était jamais fait à Dores et a marqué les gens. Le prochain numéro du journal paroissial, manière aussi de lancer la campagne de fraternité sur la défense de la vie, va présenter un article sur chacun de ces événements :
– Caravane du P.E.T.I. : manifestation pour Promouvoir l’Eradication du Travail Infantile
– Foire culturelle du collège : les élèves ont fait de multiples réalisations et ouvert les portes du collège pendant 3 jours aux parents, à la population en générale, à d’autres écoles venues les visiter.
– Fête de la famille dans une école maternelle.
Dimanche prochain, nous avons lancé une invitation aux 150 ouvriers qui construisent une usine hydroélectrique sur une des cascades de notre paroisse, pour qu’ils viennent participer à la messe du soir, et, s’ils sont d’autre religion et ne le souhaitent pas, à un temps fraternel autour d’un buffet, avec remise d’une carte de Noël.
14. Occupé, mais pas débordé… Privilégié
En faisant une relecture sur deux mois, en essayant de donner de la chair et de ne pas rester au niveau de généralités, cela peut donner l’impression d’un programme surchargé.
Paradoxalement, je n’ai pas ce sentiment. J’ai vraiment la chance de me « reposer » en passant des heures à lire l’Evangile avec les gens, à être témoin de l’œuvre de l’Esprit-Saint, en ayant de bons temps de relecture, avec les diverses équipes Prado, en accompagnant l’équipe de Florianópolis. Les temps d’attente à l’aéroport se transforment en moment pour relire, faire étude d’Evangile, assis par terre à côté d’une prise électrique pour brancher l’ordinateur. S’ajoutent la réco mensuelle avec les sœurs et Juarez, le partage hebdomadaire avec Juarez (et Antenor cette année) de l’Evangile du dimanche, de nos joies ou préoccupations, la prière commune tous les matins où je suis à Guaçuí (lundi, mardi, jeudi)
C’est aussi un ministère fait de grande proximité avec des personnes simples et ouvertes à la foi.
Je me sais aussi porté dans la prière par chacun de vous et ne vous oublie pas. Je suis toujours très heureux de recevoir un email personnel et j’y réponds chaque soir.
Le thème de notre éditorial de décembre était :
« Accueillir Christ qui veut naître dans nos vies »
Ce sont vraiment mes vœux pour chacun de vous pour Noël et pour l’année qui vient. Que ceux qui ne partagent pas notre foi retraduisent ces mots dans leur propre tradition religieuse ou philosophique.
Très fraternellement.
Bruno
[1] La « Pastorale de la Sobriété » reprend les 12 pas des Alcooliques Anonymes